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L’Europe aura-t-elle la peau du tram liégeois ?

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Et de deux ! Déjà recalé en mars, le dossier du tram de Liège a reçu cet été un deuxième avis négatif de l’Europe. Les négociations sont en cours et le projet n’est pas mort. Pour le moment. En cas d’abandon ou de retard important, les conséquences seraient désastreuses pour la ville.

Les abords du stade du Standard sont devenus un enchevêtrement de déviations et de barrières de chantier. Seule la circulation locale est autorisée à s’y frayer un chemin. Les automobilistes occasionnels, eux, se perdent dans ce dédale de sens interdits. Les quelques commerces des environs ont connu des jours meilleurs, dépourvus de poussière et du vacarme des machines.

Le prix à payer, pour accueillir le tram. Les travaux préparatoires de la rue Ernest Solvay à Sclessin sont les plus longs à devoir être réalisés. Entamés en février 2014 afin de déplacer les impétrants se trouvant sous le futur tracé, ils ne devraient être achevés qu’en juin 2016, si le calendrier initial est respecté. Les désagréments et les investissements en vaudront-ils la chandelle ? Depuis que l’Europe a donné son coup de massue, plus personne n’oserait répondre par l’affirmative.

Les 15 millions d’euros (budget initial) consentis par la Région wallonne pour la réalisation de ces travaux démontrent à quel point personne n’avait venu venir l’assommoir. Ni les ministres, ni leurs cabinets, ni les entreprises impliquées, ni les avocats et autres experts en la matière.

L’Oosterweelverbinding, le bouclage du ring d’Anvers, aurait pu leur mettre la puce à l’oreille. Dans ce dossier aussi, Eurostat – le statisticien-gendarme européen – avait rappelé en septembre 2014 ses nouvelles normes comptables au bon souvenir du gouvernement flamand, le sommant d’intégrer la dépense (de 3,25 milliards d’euros) d’une traite dans son budget.

Six mois plus tard, la Région wallonne recevait la même gifle concernant le tram liégeois. Confirmé fin juillet. Eurostat considère que l’investissement de 380 millions d’euros aurait dû être inscrit en une fois dans le budget régional, et non supporté par le partenaire privé sélectionné (une association momentanée entre Alstom et BAM).

Difficile de savoir si la Région et la Société régionale wallonne du Transport (SRWT) planchent déjà sur un plan B : elles se taisent dans toutes les langues, affirmant ne pas vouloir perturber le bon déroulement du dialogue contradictoire. « J’espère que ce silence radio ne signifie pas que l’on est en train de digérer une mauvaise nouvelle », glisse Christine Defraigne, cheffe de file de l’opposition MR à Liège. « On devrait en savoir plus d’ici les prochains jours, lorsque tout le monde sera rentré de vacances », rassure Willy Demeyer, bourgmestre socialiste de la Cité ardente.

Si les négociations actuelles n’aboutissent pas, il restera en théorie une deuxième option : la modification du contrat en intégrant les différentes critiques, pour ensuite solliciter un nouvel avis européen. Soit rendre le projet davantage public ou davantage privé. Avec tous les choix politiques que cela impliquerait. Beaucoup craignent que face à trop de difficultés, la Région enterre le tram. « Ce sont Magnette, Prévot et Di Antonio qui décident au gouvernement, or ils n’en ont rien à faire de ce qui se passe à Liège », peste un principautaire.

Même dans le meilleur des scénarios, le dossier ne s’en sortira probablement pas sans retard. L’échéance de 2017, annoncée lorsque Liège espérait encore organiser l’exposition universelle, ne tient plus depuis belle lurette. La SRWT avait ensuite parlé de l’automne 2018, avant d’admettre que la deadline serait difficile à respecter vu le contexte. Les espérances portent désormais sur 2019, voire 2020.

L’enquête dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

– Les entreprises impliquées pourront-elles se permettre de patienter ?

– Les conséquences sur d’autres chantiers « tramo-centrés »

– L’impact sur le prix de vente des terrains et la location d’espaces

– Ce que l’arrêt du tram bloque ou freine

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