Bruno Dayez : un livre pour dénoncer les failles du système pénal, et carcéral. © Didier Lebrun/photo news

L’affaire Dutroux, le stigmate des Belges

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Marc Dutroux a fait reparler de lui, cette année. Son avocat aussi, pour une cause juste, profitant de la notoriété de son client. Mais ni les victimes ni l’opinion ne semblent prêtes à l’entendre. Trop d’émotion encore…

La page Dutroux n’a toujours pas été tournée, en Belgique. Pour preuve, les réactions virulentes suscitées par la demande de libération conditionnelle introduite par le détenu le plus honni du pays, condamné à la réclusion à perpétuité en 2004 pour l’enlèvement, le viol et le meurtre d’enfants. Même si l’échéance était attendue, même s’il est clair que le  » monstre  » de Sars-la-Buissière a des droits comme n’importe quel justiciable, la question est sur toutes les lèvres, brûlante : pourquoi libérer Dutroux ? C’est aussi le titre du livre écrit par son avocat, paru en février (éd. Samsa).

Bruno Dayez ne s’en est pas caché : il se sert de la sombre célébrité de son client pour défendre le sort de tous les détenus et forcer un débat sur les failles énormes du système pénal, qu’il explique et commente de manière éclairante dans son essai. Vouloir agiter les consciences autour de la question carcérale, via le cas de Marc Dutroux, s’avère néanmoins un exercice improbable. L’avocat fait appel à la raison, alors que la charge émotionnelle provoquée par l’horreur découverte en août 1996 reste tangible aujourd’hui encore. Son livre a d’ailleurs été refusé par plusieurs éditeurs avant que Christian Lutz, des éditions Samsa, l’accepte, sans hésiter. Et la Foire du livre de Bruxelles a repoussé l’idée, proposée par Le Vif/L’Express, d’organiser un débat public avec l’avocat et auteur, officiellement  » pour des raisons de sécurité « .

Le stigmate  » Dutroux  » demeure profond. Il est, forcément, entretenu par les familles des victimes que la démarche de Bruno Dayez a indignées. Elles l’ont fait savoir haut et fort dans les médias.  » Je ne comprends pas que Dayez ne mesure pas le ressenti collectif par rapport à Dutroux « , a dit au Vif/ L’Express Gino Russo, le papa de Melissa. L’avocat n’en demeure pas moins convaincu qu’il faut tenter le coup. Fin août, au nom de son client, il a écrit une lettre aux victimes et aux parents des victimes, première étape pour remplir les conditions d’une libération anticipée. Une lettre  » d’apaisement et d’ouverture « , selon ses propres termes, mais dans laquelle les responsabilités évoquées de Dutroux restent floues. Une lettre qui souligne aussi l’importance de la  » réparation  » : le prochain chantier de Me Dayez qui prépare un nouveau livre, sur la justice restauratrice.

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