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Kim De Gelder : « Madame, j’aimerais que vous restiez calme, ceci est une attaque »

Le Vif

« J’ai levé le couteau lentement, pour rester calme, et j’ai dit en lui posant le couteau sur la gorge: ‘Madame, j’aimerais que vous restiez calme, ceci est une attaque' », a détaillé Kim De Gelder lundi après-midi devant la cour d’assises de Flandre orientale, alors qu’il retraçait les différentes « étapes », comme il les a qualifiées lui-même, de son périple meurtrier dans la crèche Fabeltjesland à Saint-Gilles-Lez-Termonde le 23 janvier 2009.

L’accusé a justifié par la panique ressentie les coups portés aux puéricultrices et aux enfants. « Ils étaient sur mon chemin vers la sortie », a-t-il simplement commenté. Il a reconnu être arrivé à la crèche avec l’intention de tuer tout le monde, en commençant par les adultes, mais a affirmé avoir changé d’avis après être entré dans la crèche. « Mais vous cachiez le couteau? », a insisté le président Koen Defoort. « Oui, derrière mon dos. »

Alors que le président essayait d’éclaircir certains points des déclarations antérieures de l’accusé, Kim De Gelder s’est parfois montré insolent. « Vous avez retenu les étapes que je vous ai expliquées? », a-t-il soudain demandé, excédé. « Je ne me souviens plus », a-t-il rétorqué une autre fois en appuyant sur chaque syllabe.

Il a fini par s’emporter sur les questions incessantes. « J’essaie de raconter ce qui s’est passé et je n’y arrive pas si vous me posez tout le temps des questions! », s’est-t-il énervé. « J’arrête », a-t-il ajouté avant de couper son micro et de se rasseoir. Kim De Gelder a cependant immédiatement recommencé à répondre aux questions.

La cour revient sur l’enfance de Kim De Gelder

Le président de la cour d’assises de Flandre orientale Koen Defoort a entamé lundi matin l’interrogatoire de Kim De Gelder en retraçant avec lui son enfance et son adolescence. Le jeune homme de 24 ans, qui comparaît pour quatre assassinats et 25 tentatives d’assassinat en janvier 2009, a indiqué qu’il conservait les motivations concernant ses actes pour la fin du procès, voire pour un procès suivant.

Kim De Gelder a été un enfant choyé, chéri par ses grands-parents maternels qui l’accueillaient très souvent chez eux. De santé fragile -« je souffrais de maux de ventre extrêmes »-, l’enfant manque souvent l’école pour rester chez ses grands-parents. « Ils disent qu’ils vous donnaient tout ce que vous désiriez, c’est vrai? », l’interroge le président. « Tout, peut-être pas », réplique Kim De Gelder. Cette santé fragile lui vaut d’être surprotégé par ses parents, et surtout par sa mère.

Il qualifie d' »années scolaires les plus heureuses de (sa) vie » les trois ans qu’il passe dans une école à pédagogie adaptée, où l’élève apprend à son rythme. Mais le retour à un système plus classique en secondaire ne se fait pas sans mal. Il est en échec à ses premiers examens et est réorienté vers l’enseignement technique. « J’aurais aimé pouvoir continuer un peu en enseignement général », regrette-t-il.

Alors qu’il approche de l’âge de 15 ans, on diagnostique à son père un syndrome de fatigue chronique. « A partir de ce moment-là, il n’a plus fait grand-chose avec moi. » C’est à cette période que Kim De Gelder commence à se sentir « moins heureux », une conséquence de la puberté selon lui. « J’étais plus sensible. » Mais face à ses amis, il ne laisse rien paraître.

Le psychiatre qu’il consulte conclut que Kim De Gelder souffre de dépression en raison du côté surprotecteur de sa mère et lui prescrit des médicaments. « Mais je ne les ai quasiment pas pris », précise-t-il. A cette époque aussi, Kim De Gelder emménage dans un petit studio aménagé pour lui dans la maison familiale. « Vous étiez content? », s’interroge Koen Defoort. « C’était un pas dans la bonne direction, mais mes parents venaient fouiller tous les jours dans ma chambre. »

Le mal-être culmine en novembre 2006 avec une tentative de suicide en se couchant sur des rails de chemin de fer, avortée parce qu’un passant lui disait de déguerpir. « La veille, j’ai écouté ma musique préférée, j’ai regardé un film que j’aimais bien, et puis je me suis comporté normalement et, au lieu d’aller à l’école, je suis allé sur les voies de chemin de fer. » Sa tentative échouée, l’adolescent retourne à l’école.

A plusieurs reprises, le président lui demande s’il entendait déjà des voix à l’époque. « Oh… c’est difficile à dire… Je ne sais pas si on peut dire que j’en souffrais… je ne sais pas. »

« Les personnes qu’on connaît et qu’on aime bien, on ne les tue pas »

« Pourquoi des inconnus? Parce que les personnes qu’on connaît, qu’on aime bien, on ne les tue pas », a expliqué Kim De Gelder. Le président de la cour d’assises Koen Defoort, qui interroge l’accusé sans relâche depuis 09h15, voulait savoir pourquoi Kim De Gelder avait jeté son dévolu sur des personnes qu’il ne connaissait pas du tout.

« Parce que les personnes qu’on connaît, qu’on aime bien, on ne les tue pas », a-t-il répondu. Frapper des inconnus plutôt que des proches lui permettait également de contourner le problème du mobile du crime et d’être donc moins facilement découvert.

Le couteau utilisé pour poignarder à mort tant Elza Van Raemdonck, 72 ans, le 16 janvier 2009, que Marita Blindeman, 54 ans, Corneel Vermeir et Leon Garcia-Arbesu, tous deux âgés de 9 mois, « n’est pas une arme, c’est un ustensile de cuisine », a encore déclaré l’accusé.

Le président de la cour d’assises a également confronté Kim De Gelder à ses anciennes déclarations, selon lesquelles il n’entendait pas véritablement de voix. L’accusé a reconnu qu’il ne s’agissait pas des motivations de ses actes. « Je ne les dirai pas. Je les conserve pour la fin du procès ou pour un prochain procès. »

L’accusé « entendait des voix » parce que son avocat voulait l’interner

« Mon avocat essayait de me faire interner, c’est pour ça que j’ai maintenu cette histoire de voix », a expliqué Kim De Gelder, 24 ans, devant la cour d’assises de Flandre orientale. Régulièrement durant la journée, le président Koen Defoort avait essayé de savoir à quels moments de sa vie l’accusé avait entendu des voix. « Je n’ai pas pu choisir mon avocat », a-t-il souligné.

Kim De Gelder, accusé de quatre assassinats et 25 tentatives d’assassinats, a reconnu s’être comporté différemment en fonction des psychiatres qui l’examinaient. « Vous savez ce qu’est le sarcasme? Dire à un certain moment: partez. Je devais dire quelque chose à ces gens et je voulais les faire rire. Je n’ai pas toujours été honnête avec les psychiatres. »

L’accusé a aussi dit regretter les faits – « comme je l’ai dit à mon avocat dès le début » -, mais il a refusé d’en dire plus car cela risquerait de le pousser à parler de son mobile, ce qu’il « aimerait faire à un autre moment dans sa vie ».

Kim De Gelder estime qu’il a sans doute « des traits psychopathes ». « Je suis aussi manipulateur que tous les avocats dans cette salle », a-t-il relevé. Interrogé sur son avenir, il a hésité: « dois-je vraiment le dire maintenant? » « Je voulais faire une déclaration le premier ou le deuxième jour », a-t-il rappelé.

L’audience a été suspendue une dizaine de minutes.

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