Gérald Papy

Hollande : au centre-gauche et à gauche toute ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le choix du Premier ministre sera le premier marqueur de la présidence de François Hollande : Ayrault ou Aubry, centre-gauche ou gauche-gauche ?

Passation de pouvoir très républicaine en France. Une grande sobriété a présidé dimanche soir aux commentaires, à gauche comme à droite, de l’élection qui a conduit un socialiste à l’Elysée, après 17 ans d’opposition. Même le Président sortant, dans une allocution très peu politique, a fait preuve d’une retenue à laquelle il ne nous avait pas habitué. La gravité de la conjoncture, en France et en Europe, et la personnalité du nouveau Président, François Hollande, ont indéniablement contribué à ce climat. La place de la cathédrale à Tulle, petite ville d’une vingtaine de milliers d’habitants dans le centre-sud de la France, aura symbolisé les premiers pas du Président élu, à mille lieues du Fouquet’s des Champs Elysées il y a cinq ans.

La gravité de la conjoncture socio-économique, François Hollande l’a aussi assimilée en rappelant, dans son premier discours et lors des brèves déclarations arrachées par les journalistes dans une quête aussi futile que pathétique, que les défis qui l’attendaient étaient « nombreux et lourds » : « le redressement de (la) production pour sortir (le) pays de la crise, la réduction (des) déficits pour maîtriser la dette, la préservation (du) modèle social (…), l’égalité entre les territoires (quartiers (des) villes et départements ruraux), la priorité éducative (…), la réorientation de l’Europe pour l’emploi, pour la croissance, pour l’avenir ».

Dès dimanche soir, du reste, le principe de réalité a balayé les excès, délibérés ou attisés par l’adversaire, inhérents à une campagne électorale. François Hollande a eu l’intelligence de tendre la main, seule nation étrangère mentionnée, à l’Allemagne d’Angela Merkel, « au nom de l’amitié et de la responsabilité ». Sa proposition de « renégocier le traité budgétaire » parfois présentée comme l’apocalypse pour l’Union européenne, est désormais bien comprise comme la « simple » adjonction au traité existant de mesures complémentaires en faveur de la croissance. Une nouvelle orientation, pas une rupture. Si les marchés dévissent ce lundi, ce sera sans doute plus en raison de l’incertitude sur la formation du gouvernement en Grèce après les élections législatives qu’à cause du changement politique dans l’Hexagone.

Il n’empêche que François Hollande sera jaugé sur ses premiers actes. La désignation du premier ministre notamment. Un des principaux enseignements de cette présidentielle 2012 réside dans le constat qu’une France majoritairement à droite (si on lui associe l’extrême droite, bien qu’une partie des électeurs de Marine Le Pen ait voté Hollande au second tour) est dirigée par un Président de gauche. Autre leçon : le candidat socialiste doit sa victoire, pas aussi ample qu’espérée, aux électeurs du Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon comme à certains du Modem centriste de François Bayrou. Bref, François Hollande se retrouve déjà écartelé entre une orientation de centre-gauche et une « gauche-gauche ». Tous deux cités comme possible premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le maire de Nantes et président sortant du groupe PS à l’Assemblée nationale, représenterait la première option, alors que Martine Aubry, l’ancienne secrétaire générale du PS, symboliserait plutôt la seconde. Du choix de l’un ou l’autre dépendra la posture future du patronat français comme du gouvernement allemand.

François Hollande a indiqué dimanche soir qu’il poserait chacun de ses actes à l’aune de ses ambitions en faveur de la justice (l’égalité) et de la jeunesse. Une preuve que dans son esprit de Président élu, l’économique ne guide pas tout. Même s’il sera vite rattrapé par les urgences dans ce domaine.

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