Hausse inquiétante des cas de mineurs en danger

Les parquets de la jeunesse ont connu à nouveau ces trois dernières années une augmentation d’affaires protectionnelles, après plusieurs années de diminution, a indiqué vendredi le Collège du ministère public sur base de la présentation des statistiques annuelles 2016, 2017 et 2018.

Cette hausse est due ces trois dernières années à une augmentation de 21% des affaires de mineurs en danger, avec jusqu’à 91.641 dossiers en 2018, un nombre jamais égalé dans les statistiques annuelles du ministère public.

Entre 2015 et 2018, les faits qualifiés d’infraction et les affaires de mineurs en danger, qui composent ensemble les affaires protectionnelles, ont respectivement augmenté de 2% et de 21%. Le nombre d’affaires protectionnelles enregistrées en 2018 (149.606 affaires) reste cependant légèrement inférieur au pic des années 2010 et 2011 (respectivement 156.281 et 157.574 affaires). Sur ces deux années, les faits qualifiés d’infraction (82.938 en 2010) étaient supérieurs aux mineurs en danger (73.343 en 2010). Mais, ces huit dernières années, les dossiers de mineurs en danger ont augmenté de 25% alors que les faits qualifiés d’infraction ont chuté de 30%. Les dossiers de mineurs en danger peuvent concerner des cas de négligence, de mauvais traitement, d’abus, de fugue ou d’absentéisme. Ces trois dernières années, ils concernaient presque autant de garçons que de filles (51%/49%). La moitié de ces mineurs étaient âgés de moins de 12 ans. Pierre Rans, avocat général près du parquet général de Bruxelles, appelle à la prudence quant à la lecture de cette augmentation interpellante des dossiers de mineurs en danger. « Elle est très variable selon les régions linguistiques. Cette augmentation s’est marquée surtout en Flandre, également à Bruxelles, mais pas du tout dans le reste de la communauté française où le nombre de dossiers reste stable. Ces données reflètent le nombre de dossiers qui entrent dans les parquets et ne constituent pas en soi la preuve d’un phénomène d’aggravation de la situation des enfants dans le pays. » Il ajoute que cela donne matière à réflexion pour déterminer les facteurs en cause. Ainsi, il remarque que la politique criminelle de 2006 concernant les violences dans le couple a été révisée en 2014 pour renforcer l’attention sur les enfants, qui sont désormais considérés comme victimes. « Un procureur qui se rend compte que le problème de l’absentéisme scolaire est important dans son arrondissement pourrait ouvrir plus systématiquement des dossiers », envisage Pierre Rans. S’il n’y a pas de statistiques spécifiques aux mineurs étrangers non accompagnés (MENA), il estime cependant que ce problème est important sur Bruxelles. « Du côté flamand, est-ce que l’aide volontaire, non judiciaire, est plus faible et qu’on s’adresse plus aux parquets et tribunaux ? », questionne Pierre Rans. « C’est une hypothèse, mais on ne peut pas l’affirmer avec certitude aujourd’hui. A la manière dont le décret côté flamand est organisé, peut-être qu’on peut plus facilement aller vers une décision de justice qu’en communauté française. A certains égards, c’est vrai ». Cependant, il remarque que le dernier changement du décret en communauté flamande remonte à 2013 et que l’augmentation dans les statistiques de 30% environ en Flandre concerne les trois dernières années. « J’ai posé la question à l’administration de l’aide à la jeunesse en communauté française et ils ne constatent pas de leur côté une augmentation sensible des interventions, ce qui correspond aux chiffres des parquets wallons qui sont stables », note pour finir Pierre Rans. En 2016, 2017 et 2018, les faits qualifiés d’infraction concernent principalement les infractions contre les biens (41%), dont notamment les vols à l’étalage et le vandalisme, les infractions contre les personnes (22%), avec entre autres les coups et blessures ainsi que le harcèlement, les infractions contre l’ordre public et la sécurité publique (12%), dont les menaces, la détention d’armes, les outrages et la rébellion.

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