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Guerre fratricide à la tête du Parti populaire

Rudy Aernoudt a été évincé du Parti populaire lundi soir. Une décision contestée en interne, notamment par la co-présidente de la section jeunes, qui dénonce la « prise en otage » du bureau du parti par les partisans de Mischaël Modrikamen, ainsi qu’un « virage idéologique » francophone.

Le bureau politique du Parti populaire a voté lundi, en fin de journée, l’éviction du co-président du PP, Rudy Aernoudt, accusant ce dernier d’avoir fomenté une tentative de prise de contrôle du parti par des anciens de LiDé. Cette éviction, adoptée à 75 % des membres présents, est l’aboutissement de tensions qui sont allées croissantes ces dernières semaines entre les « clans » gravitant autour des deux co-présidents, Rudy Aernoudt et Mischaël Modrikamen.

« Voici 10 jours, des proches de Rudy Aernoudt ont contacté Laurent Louis (Ndlr, unique député du Parti populaire) pour tenter – en vain – de le débaucher et d’évincer Mischaël Modrikamen », a affirmé un porte-parole du PP à l’agence Belga. Selon lui, des anciens de LiDé, l’éphémère parti que Rudy Aernoudt a créé fin 2008 avant de le quitter après l’échec de son rapprochement avec le MR, ont alors alimenté des « e-mails accablants » portant sur des prises de position de Laurent Louis concernant la politique du président français Nicolas Sarkozy vis-à-vis des Roms.

Dans ces propos, le député PP estimait notamment que les Roms ne travaillaient pas et volaient ou se livraient à des trafics pour subsister, et avait critiqué le fait que, selon lui, ils ne parlaient pas le français. Révélés en fin de semaine dernière par la RTBF, ils ont ému le Centre pour l’égalité des chances, qui envisage de porter plainte, et ont été dénoncés par certains jeunes du parti, notamment la suppléante de Laurent Louis à la Chambre, Nathalie Noiret (lire ci-après).

Lundi, Rudy Aernoudt les dénonçait à son tour auprès de l’agence Belga, jugeant qu’ils flirtaient avec le racisme et n’entraient pas dans les valeurs du PP. Il réclamait des excuses de la part de leur auteur, sous peine d’une exclusion du parti. Or, Laurent Louis, se référant à la position du parti communiquée vendredi, a reçu le soutien de Mischaël Modrikamen, qui a convoqué dans la foulée un bureau politique.

Ce dernier, après avoir prononcé l’éviction de Rudy Aernoudt au nom d’une tentative de putsch, doit à présent décider de l’avenir de la présidence. « Il est très probable que l’on passe à une présidence unique », a précisé le porte-parole du PP.

De son côté, Rudy Aernoudt a souligné que la confiance était rompue depuis longtemps avec Mischaël Modrikamen, « qui ne parle que de sécurité, de soldats dans les rues et m’accuse maintenant de propos flirtant avec le racisme ». S’estimant le véritable porteur des valeurs du PP, dont il avait rédigé le programme avec l’avocat d’affaires, il a exhorté les personnes « qui ne respectent pas le programme du parti à s’en aller » et laisser aux membres du parti le choix de s’exprimer sur l’élection de leur président.

Mischaël Modrikamen, quant à lui, a convoqué une conférence de presse mardi matin qui portera « sur l’avenir du Parti populaire et sa structure de direction ainsi que sa position au regard des actuelles négociations communautaires ».

Des jeunes du Parti populaire dénoncent une prise en otage du PP

Nathalie Noiret, co-présidente de la section jeunes du Parti populaire et suppléante à la Chambre de l’unique député du PP, a dénoncé lundi soir la « prise en otage » du bureau du parti par les partisans de Mischaël Modrikamen et réclamé l’invalidation de l’éviction de Rudy Aernoudt.

Des personnes convoquées à ce bureau ne font pas partie du bureau officiel, assure-t-elle. En outre, la décision de passer d’un système de co-présidence à un système de présidence unique aurait dû être soumise au vote de l’ensemble des membres du parti en ordre de cotisation, ce qui n’a pas été le cas, ajoute-t-elle.

Pour Nathalie Noiret, qui a condamné les propos de Laurent Louis à l’égard de la politique du président français vis-à-vis des Roms, à l’instar de ce qu’a fait lundi Rudy Aernoudt, « la véritable raison de l’éviction du co-président néerlandophone est le virage idéologique qu’entend effectuer le parti. La motivation réelle n’est plus de constituer un parti fédéral, mais bien un parti exclusivement francophone dont le but serait de défendre les francophones de Bruxelles en les dotant d’une constitution propre. Or, la Belgique fédérale rénovée constitue précisément la raison d’être du parti. »

Modrikamen dénonce des « actes inacceptables » dans le chef d’Aernoudt

Mischaël Modrikamen a estimé, sur les ondes de Bel RTL mardi matin, que Rudy Aernoudt a commis des « actes inacceptables ». Déplorant son « manque de loyauté », l’avocat d’affaires remarque qu’une « co-présidence est toujours difficile à gérer » et que « la politique, ce n’est pas les Bisounours ».

A ses yeux, la réaction de Rudy Aernoudt suite aux déclarations de Laurent Louis sur les Roms n’était qu’un « prétexte » : « Il se rendait compte qu’on arrivait au bout et a monté l’affaire en épingle ! », a-t-il affirmé.

A la suite de l’éviction d’un des deux co-présidents, les membres du PP devront ratifier à la majorité des deux tiers le principe d’une présidence unique, a annoncé Mischaël Modrikamen.

Clash au PP : Aernoudt conteste son éviction et le « séparatisme » de Modrikamen

Rudy Aernoudt a contesté, mardi matin, la légalité de la décision du bureau politique du PP qui l’a évincé du parti lundi soir, et dénoncé le « projet séparatiste » que s’apprêterait selon lui à fonder Mischaël Modrikamen.

Le bureau politique de lundi soir était constitué de 14 personnes alors qu’il est prévu qu’il le soit de quatre personnes seulement. En outre, il doit être convoqué, et son agenda composé, par les deux co-présidents, ce qui n’a pas été le cas puisque Rudy Aernoudt était absent, a relevé ce dernier auprès de l’agence Belga.

« Ce qui y a été décidé n’est pas démocratique et n’a aucune valeur juridique, et ce que Mischaël (Modrikamen) va annoncer ce (mardi) matin en conférence de presse n’a aucune valeur », fustige Rudy Aernoudt. S’estimant toujours co-président du PP, il a l’intention de faire convoquer un bureau « en bonne et due forme » et de demander à l’ensemble des membres de se prononcer.

Il dénonce au passage le « projet séparatiste » Wallonie-Bruxelles que tenterait de mettre sur pied Mischaël Modrikamen, qui « essaie de copier » le succès du président de la N-VA, Bart De Wever.

LeVif.be, avec Belga

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