© Reporters

Ghislain Londers, l’ingénu

Ghislain Londers, le premier président près la Cour de cassation et plus haut magistrat de Belgique, a remis sa démission au ministre de la Justice Stefaan De Clerck (CD&V) pour raisons strictement personnelles. L’occasion de revenir sur ce magistrat qui fit déjà beaucoup parler de lui.

Avocat originaire de Louvain, puis juge gravissant tous les échelons (première instance, appel, cassation), Ghislain Londers, à peine 60 ans, n’avait jamais été chef de corps lorsqu’il avait été désigné, le 1er avril 2007, premier président de la Cour de cassation. Il se promet d’ouvrir les fenêtres de la vénérable institution. Elle fête cette année-là son 175 anniversaire. Au conseil supérieur de la justice, il a siégé pendant quatre ans dans la commission d’avis et d’enquête. Il a eu le loisir d’observer les rouages de la justice. Il ouvre tous les dossiers. Il s’enhardit.

En septembre 2007, il déclare sans ambages que le blocage des négociations pour le gouvernement fédéral pose de sérieux problèmes à l’institution judiciaire. Il s’insurge fréquemment contre les dérives sécuritaires de l’état. Le 19 décembre 2008, il pose le geste le plus fou et le plus décisif de sa carrière, sans consulter les 29 autres magistrats de la cour et encore moins Jean-François Leclercq, son ami qui en tant que procureur général auprès de la Cour de cassation est l’homme tout désigné pour parler de politique. Lui, le magistrat assis, il porte à la connaissance du président de la Chambre, Herman Van Rompuy (CD&V), dans un courrier estampillé « personnel et confidentiel « , des faits qui l’inquiètent au plus haut point. Des politiques auraient essayé d’influencer la Justice dans l’affaire Fortis

La « bombrief » (lettre bombe) comme on la surnomme alors circule et le gouvernement Leterme Ier tombe. On dit à l’époque qu’il n’aurait pas voulu ça. Qu’il est honnête, ingénu et maladroit. Peu habitué aux hautes eaux politiques, il aurait été dépassé par les évènements.

Mercredi : l’arrêt sur les quatre juges du Fortisgate
Mercredi, la cour d’appel de Gand rendra son arrêt dans le procès des quatre juges du « Fortisgate ». Il s’agit des trois conseillers de la 18e chambre de la cour d’appel de Bruxelles Paul Blondeel, Mireille Salmon et Christine Schurmans et d’Ivan Verougstraete, un ancien président de Cour de cassation. Les deux premiers doivent répondre de faux et usage par fonctionnaire public (ils auraient déclaré qu’un délibéré sur une réouverture de débats avait été réalisé en présence de Christine Schurmans, alors qu’elle s’en était trouvée exclue), ce qui le cas échéant constituerait un crime. Les deux derniers doivent, eux, s’expliquer sur un délit, pour avoir, vrai ou faux, violé leur secret professionnel en transmettant des informations au monde politique.

La saga judiciaire du Fortisgate n’épargne pas non plus Ghislain Londers puisque ce dernier fait l’objet d’une enquête pour violation du secret professionnel. Une enquête ouverte en juin de l’année dernière et qui porte justement sur la « bombrief « , la lettre qui fit tant de bruit.

Pas de fuite en avant
Pour le ministre de la Justice Stefaan De Clerck (CD&V), il ne s’agit pas d’une fuite en avant liée aux développements du dossier Fortis. Les raisons strictement personnelles invoquées par M. Londers « doivent être prises au sérieux« , a commenté le ministre sur les ondes de la VRT.

Stefaan De Clerck lancera aussi rapidement que possible la procédure de désignation d’un successeur. Informé entre-temps par écrit de la décision de Ghislain Londers, il s’est dit surpris par la démission soudaine du magistrat âgé de 64 ans, l’âge de la pension à la Cour de cassation étant plus élevé que 65 ans.

Une fuite malveillante dans la presse

Ghislain Londers, premier président de la Cour de cassation, indique qu’il a bien demandé sa mise à la retraite anticipée pour le 31 décembre 2011. Cette décision est basée uniquement sur des motifs d’ordre privé. « Je suis très attaché à la Cour et à ma fonction et, dès lors la décision de mettre à disposition mon mandat et de quitter la Cour fût extrêmement difficile et n’a pas été prise à la légère« , explique-t-il. Il regrette la fuite liée à cette annonce vers la presse. « J’avais la ferme intention de réserver la primeur de cette nouvelle à mes collègues et aux collaborateurs de la Cour, mais malheureusement une fuite malveillante vers la presse en a décidé autrement« .

Le Vif.be, M.-C.R. et Belga

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire