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Fraude fiscale : comment l’Etat perd des millions

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Comme pour la KB-Lux, le procès du prince de Croÿ risque de tourner au fiasco pour l’Etat belge. Un de plus dans les méga-dossiers de fraude fiscale qui ont émergé dans les années 1990. Compte-rendu et analyse.

C’est un procès hors norme qui vient de se terminer devant la Cour d’appel de Bruxelles. Hors norme par son ampleur. Le prince Henri de Croÿ et consorts comparaissaient pour une fraude fiscale estimée à plus de trois milliards de francs belges. Les premiers faits datent du milieu des années 1990. En première instance, 43 personnes – dont un avocat, un notaire, le directeur d’une banque luxembourgeoise et des patrons d’entreprise -, se sont retrouvées sur le banc des prévenus.

Hors norme par son caractère symbolique aussi. C’est la fraude aux sociétés de liquidités qu’on juge ici, un mécanisme importé des pays scandinaves, qui vise à éluder l’impôt en dépouillant des sociétés artificiellement gorgées de liquidités. Le manque à gagner aurait représenté, à l’époque, 30 milliards de francs belges pour les caisses de l’Etat. Avec la KB-Lux et la QFIE (quotité forfaitaire d’impôt étranger), il s’agit d’une des plus grosses fraudes de l’histoire fiscale belge, dont le dossier de Croÿ – avec ses 18 sociétés de liquidités – est emblématique.

Hors norme, enfin, par la longueur de la procédure (quinze ans) et la virilité des débats.

Lors de l’avant-dernière audience, fin juin, la défense a plaidé les récents développements de la jurisprudence belge. Il s’agit, en l’occurrence, d’un arrêt de la Cour de cassation intervenu deux mois après le procès en première instance. Cet arrêt rendrait les accusations de Bernard Ouazan, le témoin principal, à l’égard des prévenus irrecevables, ce qui fragiliserait le dossier. Il n’en faudra peut-être pas plus pour que la Cour prononce la nullité des poursuites à l’égard des prévenus, le 21 octobre prochain. Comme dans l’affaire KB-Lux.

Si c’est le cas, ce serait alors une véritable claque pour l’Etat belge qui, dans les trois dossiers mammouths déterrés par le fisc dans les années 1980 et 1990, n’aura pas pu récupérer grand-chose. Or, pour la QFIE, la KB-Lux et les sociétés de liquidités, le montant global de la fraude était évalué, à l’époque, à environ 1,5 milliard d’euros. De quoi boucler sans stress un budget fédéral en période d’austérité…

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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