Pierre Havaux

Flandre: « Jobs, jobs, jobs  » ? D’abord  » check-check-check »

Pierre Havaux Journaliste au Vif

Fichu temps, à ne plus mettre un nez dehors. Ni plus ni moins qu’ailleurs dans le monde, la Flandre se mue en camp retranché pour résister au mieux aux ravages du coronavirus. L’épreuve vaut bien un cri de guerre, à mémoriser impérativement. Il y a eu le « jobs, jobs, jobs » version coalition suédoise, voici le « check-check-check » à la flamande.

Check : rester à la maison et se laver régulièrement les mains. Check : ne rester qu’en contact téléphonique ou digital avec ses parents. Check : garder la distance réglementaire si par malheur il faut tout de même sortir. Télévision, radio, magazines, quotidiens, Internet : les autorités flamandes ne négligent aucun support pour prêcher la bonne parole sous la bannière #IKREDLEVENS. Difficile de prétendre qu’on ne savait pas lorsqu’on est confronté au visuel en grosses lettres noires sur fond jaune. BV (Bekende Vlamingen) et influenceurs sont appelés à la rescousse pour enfoncer le clou.

Pour sauver les meubles, un seul réflexe : acheter local, promouvoir local, manger local, écouter local. La Flandre se serre les coudes, l’heure est au civisme, y compris artistique. Le monde des radios flamandes a confectionné un kit de survie à l’attention de celles et ceux qui frisent l’asphyxie financière parce qu’ils se retrouvent brutalement orphelins de la scène. #playlocal, #luisterlokaal, les programmations musicales leur sont grandes ouvertes et c’est le ministre des Médias Benjamin Dalle (CD&V) qui est ravi, lui qui encourage vivement à streamer, downloader et passer en boucle les artistes flamands. Qu’au moins ils puissent ainsi percevoir des droits d’auteur. Pour ceux et celles qui ont du mal à trouver le sommeil en ce moment, la station Q-Music a même démarré un répertoire de slaapwel-songs. Et si toute cette mobilisation peut aider à donner gentiment mauvaise conscience, c’est encore mieux : un groupe de new wave louvaniste se fend d’un single, Corona- hamster, une façon de faire en chanson la leçon aux consommateurs qui succombent à la manie d’amasser sans raison.

Dans les chaumières flamandes, on tient bon. On n’en est pas encore à s’en remettre à Dieu et à sa clémence. La première messe du dimanche matin retransmise par la VRT depuis une église désormais vide a capté 139 855 fidèles, ni plus ni moins que l’audience d’un office religieux relayé à la télé avant la crise sanitaire. Dans l’après-midi en revanche, c’était la grosse foule devant le petit écran : ils étaient près de 400 000 à vibrer pour la course Gand-Wevelgem saison… 2015 rediffusée par la chaîne publique. Se retrouver privé de classiques cyclistes, là est le vrai châtiment pour un Flamand.

C’est dire si rien n’est négligé pour soutenir le moral du hardwerkende Vlaming réduit à l’inaction mais appelé tôt ou tard à se retrousser les manches. Pour peu que son poste de travail ne lui ait pas été entre-temps dérobé. La N-VA y veille, en appelant à protéger légalement les joyaux de l’économie flamande de possibles  » hold-ups  » honteusement commis depuis l’étranger. Il importe de maintenir l’outil en état et de mettre la Flandre en ordre de bataille quand viendra le moment de repasser du mode  » check-check-check  » à la phase  » jobs, jobs, jobs « .

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