Joyce Azar

« Flanders got talent ou la montée en puissance de la chanson néerlandophone »

Joyce Azar Journaliste VRT-Flandreinfo et co-fondatrice de DaarDaar

Niels Destadsbader : ce nom, un rien compliqué à prononcer, illustre aujourd’hui le succès croissant de l’industrie musicale flamande et la montée en puissance de la chanson néerlandophone. Le 7 février, le chanteur de 30 ans s’est vu couronné de cinq Music Industry Awards (MIA’s), sur un total de sept nominations.

Plus que jamais, cette édition 2019 des  » prix flamands de la musique  » aura été celle des prix de la musique flamande. Si l’anglais reste un choix rationnel pour de nombreux artistes, de plus en plus de chanteurs optent sciemment et sans complexe pour des paroles en néerlandais, quel que soit le genre musical. Comme le remarque l’expert en musique pop belge Jan Delvaux,  » l’époque où la chanson néerlandophone n’était pas prise au sérieux est révolue « .

Tous les ingrédients étaient rassemblés pour faire de Niels Destadsbader une star : une gueule de gendre idéal, une voix sortie d’une comédie musicale et des chansons populaires très accessibles. L’an dernier, le chanteur est même parvenu à détrôner Ed Sheeran grâce à Dertig, devenu l’album le plus vendu en Flandre. Un succès qui lui a permis de faire salle comble, à deux reprises, dans l’impressionnant Sportpaleis d’Anvers. Mais la clé de cette réussite réside aussi ailleurs : chanter dans la langue de Vondel semble immanquablement conquérir le public flamand. D’autres artistes l’ont d’ailleurs tenté. Ces dernières années, des rappeurs tels que Tourist LeMC et Zwangere Guy ou le groupe alternatif Bazart ont conquis la scène musicale flamande, certains de ces musiciens n’hésitant pas à interpréter des morceaux en dialecte. Se lancer dans la chanson néerlandophone n’est aujourd’hui plus un risque. Pour se faire connaître et s’assurer une belle carrière, les artistes bénéficient d’un riche calendrier de festivals, de salles de concert toujours plus modernes, d’une culture médiatique axée sur les  » bekende Vlamingen  » et d’une multitude de plateaux télé friands de talk-shows et de représentations en direct. Des conditions optimales qui ont, en outre, permis à la chanson néerlandophone de sortir de son carcan  » populaire flamand  » pour épouser des styles plus contemporains.

u0022Ce serait super que des artistes flamands puissent aussi être un peu reconnus en Wallonie.u0022 Angèle

Malgré cette floraison musicale, la chanson néerlandophone continue de se heurter au mur linguistique qui sépare le pays.  » La Belgique n’est finalement pas si divisée que ça… Il était temps que des musiciens belges puissent jouer des deux côtés du pays « , se réjouissait la chanteuse francophone Angèle, après avoir été récompensée de trois MIA’s flamands, dont celui du meilleur solo féminin. Son constat ne s’applique toutefois que dans un sens.  » Ce serait super que des artistes flamands puissent aussi être un peu reconnus en Wallonie.  » Le souhait de la star bruxelloise semble être bercé d’illusions : sur les ondes francophones, les artistes flamands demeurent rarissimes, et les chansons flamandes sont perçues comme des curiosités. Angèle et Stromae sont plus agréables à écouter, défendra-t-on. En attendant que les esprits s’ouvrent, la Flandre continuera seule à jouir pleinement de ses multiples talents.

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