Pascal De Sutter

Et si le gouvernement supprimait la TVA sur les produits bio ?

Pascal De Sutter Psychologue politique à l'UCL

La Commission européenne vient de publier un nouveau rapport qui affirme que l’eau et l’air sont de moins mauvaise qualité aujourd’hui qu’il y a quelques années. Ouf, on respire ! Il est d’ailleurs de bon ton de dire qu’il faut combattre la pollution, boire plus d’eau et manger mieux.

Le rapport souligne cependant que la biodiversité continue à se réduire en Europe et que les politiques environnementales manquent d’ambition. Ajoutons à cela que notre espérance de vie en bonne santé diminue. Selon les experts, les causes principales en sont la « malbouffe » et la dégradation de notre environnement.

Une partie du problème se réglerait si l’on se nourrissait mieux et polluait moins. Non seulement les chercheurs de l’Inserm ont démontré que la qualité nutritionnelle des produits bio est 30 % supérieure au conventionnel, mais une étude récente (2) montre que le bio contient plus d’antioxydants qui contribuent à la longévité. Le gouvernement wallon avance de timides mesures pour soutenir l’agriculture biologique. Mais rien ne sert d’augmenter la production si le consommateur ne suit pas. Actuellement, les ménages belges ne consacrent que 1,6 % de leurs dépenses alimentaires aux produits bio. Cela s’explique essentiellement à cause du coût (légèrement) plus élevé de ces aliments de qualité. Le consommateur paie 6 % de TVA sur le prix d’un litre de jus de pommes biologiques. Et il paie également 6 % de TVA pour un soda contenant toutes sortes de saloperies chimiques nocives à la santé.

Le consommateur paie 6 % de TVA sur le prix d’un litre de jus de pommes biologiques. Et il paie également 6 % de TVA pour un soda.

De même, on paie 6 % de TVA pour une confiserie hypercalorique distribuée par une multinationale qui a son siège social dans un paradis fiscal (l’évasion fiscale coûte environ 1 000 milliards d’euros aux finances publiques européennes). Et 6 % pour une carotte bio cultivée en Belgique par un honnête contribuable assommé de réglementations contraignantes. On paie aussi le même taux de TVA sur quelque chose fabriqué par des travailleurs rémunérés décemment chez nous que pour ce qui est produit dans des conditions inhumaines ailleurs. Pourquoi la TVA appliquée est-elle aussi injuste, absurde et autodestructrice ? Le rapport européen insiste pourtant sur le fait que « les politiques environnementales stimulent l’emploi ».

L’industrie du bio est l’un des rares domaines économiques en croissance continue ces dernières années. Est-on trop riche et avons-nous trop d’emplois en Wallonie pour se permettre de si peu encourager la production locale du bio ? Il est vrai qu’une ferme sur dix est « biologique » en Wallonie pour seulement une ferme sur 25 en Flandre. Favoriser la consommation de bio enrichirait donc d’abord la Wallonie. Et en Belgique, on a vu que chaque fois qu’une occasion de redresser l’économie wallonne se présente, les élus fédéraux flamands lui mettent des bâtons dans les roues. Or, cette fois, il s’agit de la santé de tous les habitants du pays. Demandons donc au gouvernement fédéral de supprimer la TVA sur toutes les marchandises bio produites en Europe et la diminuer sur le bio qui vient d’ailleurs. Il convient aussi d’augmenter la TVA sur les aliments qui ont un impact négatif sur la santé et sur l’environnement, qui ne respectent pas des conditions décentes de travail ou dont le distributeur est exilé dans un paradis fiscal.

Cela me semble indispensable si nous voulons vivre en meilleure santé dans une nature préservée. Et c’est une belle opportunité pour la Wallonie de retrouver sa richesse et sa dignité. Mais rien ne vous oblige à penser comme moi…

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