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Enseignement : « Un besoin urgent de retrouver une certaine forme d’autorité »

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Dans le nord du pays, en quatre années, le nombre d’élèves avec des problèmes de comportement a augmenté de 30%, conséquence d’une éducation trop laxiste, selon le pédopsychiatre Peter Adriaenssens. Le quotidien flamand De Morgen pose la question suivante : comment apprendre aux enfants à acquérir un esprit critique sans perdre de son autorité ?

En Flandre, des statistiques du « Centra voor Leerlingbegeleiding » (« Centres de Conseil aux étudiants ») montrent que le nombre d’élèves présentant des problèmes de comportement en classe est en hausse de 30%. Il se chiffre à 7.919 jeunes. Ce rapport récent sembleconfirmer ce qui est vécu depuis quelque temps déjà au sein des établissements scolaires : les jeunes rencontrent de plus en plus de difficultés avec l’autorité et n’arrivent pas à respecter les limites qu’on leur donne, qu’elles émanent du corps professoral ou de leurs parents. « Il y a un manque d’autorité difficilement supportable », réagit le pédopsychiatre Peter Adriaenssens, dans les colonnes du quotidien De Morgen. « Nous devons rapidement, tous ensemble, ouvrir grand les yeux et apprendre à nos enfants à apprendre à se soumettre à l’autorité. »

Autorité. Le terme semble sortit d’une autre époque, une époque où les professeurs étaient extrêmement stricts et où donner son propre avis était fortement déconseillé. Alors qu’aujourd’hui, les parents et enseignants privilégient la discussion et la négociation aux ordres unilatéraux. « Le temps où les élèves ne bougeaient pas d’un poil sur leur banc terrorisés par un professeur sévère est bien révolu. Et heureusement d’ailleurs. Tout le monde parle de citoyenneté et prône l’intérêt de former des élèves critiques et capables de s’exprimer« , déclare Rania el Mard, de la coupole des écoles flamandes (« Vlaames Scholierenkoepel »). Elle ajoute dans ce sens : « N’allons pas reprendre des recettes du passé. Travaillons plutôt à une meilleure école et à de meilleures règles scolaires, plus d’autorité ne doit jamais être la réponse. »

Une bonne chose pour le directeur du Centre de Conseil aux étudiants de Roeselare, Patrick Lancksweerdt interviewé par De Morgen. Mais une évolution, qui, selon lui, ne doit pas non plus se faire en lâchant trop la bride.

En tant que parents, il est d’avis que nous sommes aussi un peu responsables de cette situation. « Nous avons élevé nos enfants à force de discussions et de négociations. Nous nous sommes astreints à tout leur justifier et nous sommes allés trop loin. Revenir un pas en arrière sera difficile mais pas impossible. Nous devons oser dire aux jeunes que certaines choses ne sont pas permises, sans leur donner trop de justifications, sans que cela ne parte dans des discussions interminables. »

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La situation est donc ambiguë : former des jeunes citoyens capables de formuler des arguments critiques mais tout en gardant une certaine forme d’autorité intransigeante. Une attitude qui demande beaucoup de temps et d’énergie, deux notions que la majorité des parents n’ont pas forcément à l’heure actuelle, écartelés entre leur travail et leur vie de famille prenante.

Une éducation plus libre influence aussi l’ambiance en classe. « Les enseignants « babyboomers » partent un à un à la retraite et la génération qui les remplace est beaucoup plus permissive avec les élèves », témoigne un professeur d’histoire au Morgen. « Les élèves sont beaucoup plus libre de prendre la parole en classe mais ils ne sont pas toujours aussi respectueux envers leurs professeurs. « 

D’où le besoin de recadrer certains comportements et de mettre à nouveau en place certaines limites. Patrick Lancksweerdt lance des pistes pour y arriver : « Personne ne veut revenir en arrière. Mais il y a bel et bien besoin urgemment d’une nouvelle forme d’autorité. Nous devons éduquer les enfants à devenir des êtres dotés de sens critique et capables de l’exprimer. » Et comment y arriver ? Le directeur propose de conclure des contrats clairs avec les jeunes. « C’est aussi ce qui leur attend dans le monde adulte. On peut négocier son contrat avec son patron, mais une fois qu’il est signé, il faut s’en tenir à ces conditions. Et si elles ne sont pas respectées, il y a des conséquences. Nous devons donc aussi apprendre à conclure des contrats clairs avec nos jeunes.  »

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