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Elio Di Rupo:  » La vie serait invivable si les gens pensent que vous êtes un salaud « 

Muriel Lefevre

L’émission Kroost a montré ce qu’elle avait promis : Elio Di Rupo comme on ne l’a jamais vu. L’homme d’habitude si réservé et sous contrôle nous montre qu’il est aussi un être de chair et de sang.

On peut déjà s’en apercevoir lors d’une visite à San Valentino -, le lieu où vivaient ses parents avant que ces derniers n’émigrent en Belgique. Lorsque pour la première fois de sa vie il découvre avec ses frères la maison de ses parents, l’émotion affleure. Di Rupo en Italie – qu’il a visité pour la première fois à 19 ans- est un homme détendu. Alerte, assuré et attentif. Comme s’il était lui-même l’une de ces dames âgées avec qui il déterre les souvenirs et avec qui il parle avec enthousiasme de qui est le filleul ou le neveu d’un tel. Avant de balayer tout ça d’un geste de la main et de conclure que « dans les familles italiennes… »

Signé: Di Donato

Que notre premier ministre soit un fils d’immigré n’a jamais fait l’objet de discussion. Un constat qui peut faire la fierté du pays. C’est d’autant plus remarquable lorsqu’on connait l’histoire particulière de cet homme qui occupe l’un des postes les plus importants de la politique belge.

Elio Di Rupo montre une photo de sa maman penchée avec attention au-dessus d’un livre pour écrire quelque chose. « Maman ne savait ni lire ni écrire. Pour le mariage de mon frère Franco je lui ai appris à signer de son nom. Elle s’appelle Di Donato et il lui a donc fallu près de 2 minutes avant qu’elle ait fini. Elle était très fière de ne pas avoir à signer d’une croix. » Tous ces moments sont des métaphores parfaites du rêve américain que représente Di Rupo : celui qui appose sa signature sur les accords parmi les plus importants de notre histoire doit apprendre à sa mère issue de l’immigration pauvre et illettrée à signer de son nom.

Le bordel

C’est aussi un Elio Di Rupo inattendu qui se montre devant les caméras de Eric Goens. Lorsqu’il dit que c’est le « bordel » dans sa maison. Ou encore lorsqu’il précise que le fait qu’il soit célibataire est un choix parce qu’il ne l’a pas toujours été. Ou encore lorsqu’il fait des blagues lors de la Ducasse et doit serrer plus de mains qu’un poulpe hyperkinétique . Mais aussi Di Rupo qui parle à une salle plein de Wallons sur la situation économique. Que ces derniers ne doivent jamais oublier que s’il représente 33% du pays il n’y contribue qu’à hauteur de 24% ». Et qui reste tout de même toujours un peu Di Rupo qui s’arme de son sourire tour à tour pour charmer ou tenir à distance. Une distance qui s’amenuise lorsqu’il parle d’une des périodes les plus noires de sa vie. En 1996 alors qu’il est vice premier accusé de pédophilie par un affabulateur. « C’est comme si l’on était assommé. J’étais dans le doute, je ne voulais pas jeter le discrédit sur le gouvernement » Di Rupo téléphone à son frère à 3h du matin. La réponse fuse « Tu ne démissionnes pas, tu es innocent ».

Il fut par la suite innocenté, mais en porte encore les stigmates. Il semble encore quelque peu désorienté lorsqu’il aborde le sujet dans son salon. « C’est presque impossible de vivre avec dignité si les gens pensent que vous êtes un salaud » . Il répètera jusqu’à trois fois que tout cela était vraiment ignoble. Durant l’émission le premier ministre dira aussi à trois reprises « That’s life ». Un mantra pour le moins à propos au regard de son parcours.

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