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Dumping social : la Commission européenne critique l’approche belge de la fraude sociale

La Commission européenne s’en prend aux mesures prises dernièrement par la Belgique pour lutter contre la fraude sociale. La Belgique a reçu jeudi un dernier avertissement à l’encontre des dispositions « anti-abus » de la loi de 2013 visant à lutter contre la fraude au détachement. Si la Belgique n’adapte pas sa législation dans les deux mois, l’affaire pourrait être portée devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Les travailleurs qui travaillent temporairement à l’étranger doivent recevoir le salaire minimum, respecter le temps de travail et les prévisions en matière de santé et de sécurité en vigueur dans le pays hôte. C’est ce que prévoit la directive « Détachement des travailleurs ». Les cotisations de sécurité sociale restent dues dans le pays d’origine.

Ces travailleurs doivent pouvoir présenter une « attestation A1 » émise par l’Etat membre où les cotisations sociales sont payées et qui prouve que l’intéressé est en règle avec la sécurité sociale. Quand le pays hôte soupçonne une fraude à cette attestation, il doit prendre contact avec le pays émetteur. C’est un système qui a fait ses preuves, estime le commissaire à l’emploi et aux affaires sociales, Laszlo Andor.

En obligeant à payer des cotisations sociales en Belgique en cas de suspicion de fraude, la Belgique s’essuie, via sa loi « anti-abus », les pieds sur les règles européennes et a décidé unilatéralement d’agir. La Commission a dès lors franchi une deuxième étape jeudi dans la procédure d’infraction contre la Belgique.

Cette procédure a été ouverte en novembre 2013. Le commissaire Andor avait alors expliqué que la Belgique avait le droit de contrôler les abus, mais qu’elle ne peut pas le faire unilatéralement. Selon De Tijd, la Commission reconnaît qu’il y a bien un problème de dumping social, mais que les règles européennes existantes ne peuvent pas être mises sur le côté comme cela.

Le problème du dumping social et des fraudes au détachement des travailleurs est au coeur de l’agenda politique européen depuis plusieurs années déjà. En avril, le Parlement européen a approuvé une directive devant améliorer la mise en oeuvre de la législation en matière de détachement. Il avait alors été notamment convenu que les Etats membres recevraient plus de pouvoir de contrôle et pourraient prendre des initiatives – tant que celles-ci seraient notifiées à la Commission. Mais, juridiquement, la lutte contre la fraude à la sécurité sociale n’a rien à voir avec cela.

En décembre 2013, quand les Etats membres se sont mis d’accord sur des contrôles plus stricts, la ministre de l’Emploi, Monica De Coninck, avait souligné qu’une dynamique venait vraisemblablement d’être créée pour que des Etats membres puissent échanger davantage d’informations. La prochaine commissaire européenne à l’Emploi et aux Affaires sociales, Marianne Thyssen (CD&V), sera certainement saisie du dossier de la lutte contre la fraude sociale. Le nouveau président de la Commission, Jean-Claude Juncker, lui a déjà confié le soin de revoir la directive « détachement des travailleurs » (qui date de 1996) pour éviter « tout risque de dumping social ».

Absurde d’être pointés du doigt parce que la Belgique agit

La ministre de l’Emploi en affaires courantes, Monica De Coninck, n’est pas impressionnée par la nouvelle étape franchie dans la procédure d’infraction contre la Belgique en raison de la loi « anti-abus » de 2013. « Je trouve absurde que la Commission européenne, qui n’a jamais voulu s’engager pour s’attaquer à la fraude sociale, pointe la Belgique du doigt parce qu’elle veut s’attaquer au phénomène », a-telle déclaré jeudi.

La Commission européenne estime que la Belgique enfreint les règles européennes en agissant unilatéralement en cas de soupçons de fraude dans le détachement de travailleurs étrangers. Ce faisant, elle met en cause la loi « anti-abus » du 10 janvier 2013. « Nous ne pensons pas que ces mesures anti-abus soient contraires à la réglementation européenne », a indiqué Monica De Coninck.

Elle a fondamentalement un problème avec la critique de la Commission. « En-dehors des arguments juridiques, qui seront éventuellement débattus devant le tribunal, je trouve absurde que la Commission européenne, qui n’a jamais voulu s’engager pour s’attaquer à la fraude sociale, point maintenant la Belgique du doigt parce qu’elle veut s’attaquer au phénomène. »

La Belgique est demandeuse d’une réglementation européenne pour lutter contre la fraude sociale et le dumping social « et la (future) commissaire européenne Marianne Thyssen aura un rôle important à jouer ». « La fraude sociale mine nos systèmes sociaux, représente une concurrence déloyale pour nos petites entreprises et met également sous pression les droits sociaux de travailleurs vulnérables ailleurs en Europe », a-t-elle conclu.

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