Droit d’accès aux documents des autorités publiques: transparence renforcée?

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Promesse des partis oblige, le droit d’accès aux documents des autorités publiques est consolidé, davantage en Wallonie qu’à Bruxelles. Un enjeu visiblement très politique.

La transparence des cabinets ministériels passe aussi par la Cada, la Commission d’accès aux documents administratifs. Ou plutôt  » les  » Cada, car il en existe une par entité institutionnelle belge, soit sept au total… Ces Cada, chargées de faire respecter le droit constitutionnel (article 32) de  » consulter chaque document administratif et de s’en faire remettre copie « , examinent les recours des citoyens qui se voient refuser une telle consultation par une autorité publique. Il existe des exceptions : sécurité, vie privée… La Cada est chargée de trancher au cas par cas.

Jusqu’ici, ces commissions n’avaient qu’un pouvoir consultatif, sauf pour les documents liés à l’environnement. Dans notre baromètre précédent sur la transparence des cabinets, nous avions constaté que certains ministres (Rudi Vervoort, Fadila Laanan, pour ne pas les citer) n’avaient que peu de considération pour ces avis. Après Publifin et le Samusocial, les gouvernements wallon, bruxellois et de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) s’étaient engagés à davantage de transparence, en renforçant notamment le pouvoir de leurs Cada respectives. Il aura fallu attendre la fin de la législature pour le voir. Cela n’a pas été sans mal, surtout côté wallon et bruxellois. Les débats furent houleux, les pressions énormes, les échanges fort nerveux. Pour un résultat pas tout à fait à la hauteur des espérances.

La FWB a été la première à donner un pouvoir décisionnel à la Cada fin mars dernier, mais l’amendement lui donnant un pouvoir de sanction a été refusé par la majorité PS-CDH. Côté wallon, le bras de fer a été rude : le parlement de Wallonie a examiné la proposition Ecolo, après que le gouvernement a tenté d’avancer son propre texte. Sa mise en minorité après le départ de la députée MR Patricia Potigny pour les listes Destexhe l’a fragilisé et c’est le texte Ecolo qui a finalement été examiné et adopté, rendant la Cada décisionnelle, avec, en outre, un amendement habilitant le gouvernement à arrêter des sanctions. Au final, le texte wallon est donc plus fort qu’en FWB.

En Région bruxelloise, ce fut plus agité encore. Il y avait aussi deux textes en lice, un du parlement (poussé par Ecolo et le MR), s’inspirant de propositions de l’association Transparencia, et un du gouvernement, moins contraignant. Le ministre-président Rudi Vervoort et le PS ont fait le forcing, convaincu le CDH et DéFI, et c’est le projet de l’exécutif qui a été examiné. Comme les autres, la Cada bruxelloise aura désormais un pouvoir décisionnel. Côté sanctions, elle ne pourra imposer d’astreintes financières aux administrations récalcitrantes. Mais elle pourra requérir les forces de l’ordre pour obtenir les documents requis : une mesure dont la faisabilité reste à éprouver dans la pratique.

Plus interpellant : cette Cada aura une indépendance toute relative. La moitié de ses membres, hors président, seront désignés au sein de l’administration et auront une voix délibérative. L’initiative parlementaire prévoyait, elle, que tous soient nommés par le parlement. Enfin, les demandes introduites devront être accompagnées d’une copie de la carte d’identité. Cette mesure, unique parmi toutes les Cada et qui a déchiré le PS bruxellois, vise clairement, comme le dénonce l’association elle-même, à compliquer la tâche du site Transparencia.be, bête noire de Rudi Vervoort.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire