Etienne Dujardin

Défi va-t-il sauver le PS et le faire échapper encore une fois à l’opposition ?

Etienne Dujardin Juriste et élu conseiller communal MR à Woluwe-Saint-Pierre

Carolo, Affaire Donfut, Publifin, Samusocial… depuis 2007 et même avant au travers d’Agusta, les affaires touchant largement le parti socialiste ont rythmé la vie politique belge.

Le Boulevard de l’Empereur a longtemps régné en maître sur la vie politique du côté francophone et il était incontournable. En 2007, suite au dossier de la Carolorégienne qui avait éclaté deux ans auparavant, le PS a connu une première grosse alerte dans les urnes. Il avait alors frôlé la mise dans l’opposition et n’avait dû son salut qu’à Joëlle Milquet qui n’avait pas voulu mettre en place l' »orange-bleue« . La présidente du CDH de l’époque fut dénommée « Madame Non » et gagna en popularité pendant toute la période de négociation et de médiatisation. Cependant, son parti en souffrit en voyant son image de « scotcher au PS » brouiller son contenu programmatique. Et d’élection en élection, le CDH perdit des plumes.

Aujourd’hui, le même scénario se réitère. Le PS est en grande difficulté suite à des affaires qui éclatent dans différentes parties du pays tous les trois mois. Benoit Lutgen a dit stop aux coalitions qu’il formait avec son partenaire et propose à d’autres partis de le rejoindre. Même si l’opération manquait un peu de préparation (est-ce possible de négocier de nouvelles majorités en secret ?), elle donne l’opportunité unique de repartir d’une page blanche dans toute une série de domaines et de lancer des réformes audacieuses dont la partie francophone du pays a besoin. Tous les partis regrettent la politisation trop forte de l’administration et la toute-puissance socialiste en son sein, la mauvaise gestion de subsides politisés, les privilèges donnés à ceux qui ont la bonne carte de parti. Des réformes structurelles sur la façon de faire de la politique et de gouverner pourraient enfin être mises en place sans le parti qui a installé toutes ces pratiques. Olivier Maingain n’a rien à gagner à passer pour le sauveur des socialistes ou pour celui qui, s’abritant sous les dossiers liés à la gouvernance (ou les désaccords entre partis restent ténus), en oublie les dossiers liés au quotidien de ses électeurs. Les déclarations de ce dimanche où il demande d’établir un cahier de charges de la bonne gouvernance semblent un rien oublier l’ensemble des autres thématiques qui intéressent les citoyens et ses électeurs. De plus, il va être difficile de faire passer dans la population l’idée que les « écuries d’Augias » pourraient être mieux nettoyées dans une majorité avec le PS que sans celui-ci vu le nombre d’affaires à rebondissements le touchant.

Défi a les clefs pour réaliser de nouvelles majorités tant à Bruxelles qu’en Fédération Wallonie-Bruxelles. Des majorités MR-CDH en Région wallonne ou MR-CDH-Défi à Bruxelles et MR-CDH-Défi en Communauté française sont réalisables et pourraient avoir du sens pour Olivier Maingain plutôt fin stratège politique. En effet, il pourrait vendre assez cher son soutien en termes de poids politiques et passer pour l’homme qui a aussi permis de tourner la page d’un parti socialiste tout puissant. Il pourrait quitter son ancien allié de majorité avec élégance n’ayant rien fait pour l’éjecter. Le CDH ne voulant plus gouverner avec le PS à Bruxelles et Ecolo étant peu pressé de le remplacer, l’équation des nouvelles majorités pourrait sembler simplifier la situation. De plus, son électorat en général marqué au centre-droit et concentré plutôt sur les communes cossues de la capitale pourrait voir d’un bon oeil le fait de se focaliser sur un programme court, mais intense à savoir : une rationalisation sans précédent de toutes ces structures publiques coûteuses, inefficaces et dépendantes de subsides politisés, des réformes socio-économiques plus nettes, un renouveau total en matière d’enseignement avec la fin du décret inscription et un remodelage complet du Pacte d’Excellence contesté de toutes parts, une revalorisation de l’enseignement technique et de la formation vers les métiers en pénurie, une révision de la politique de mobilité qui est en train de tuer Bruxelles, un accord sur le dossier des vols de nuit…

Les jours ou semaines qui arrivent nous diront si, malgré l’ensemble des affaires qui touchent le PS depuis des années, ce parti pourra se maintenir ou non dans une partie des gouvernements où il siège aujourd’hui. De toute façon, l’ensemble des partis politiques n’a plus le droit à l’erreur. Soit des gouvernements se mettront rapidement en place avec des majorités capables de réaliser les réformes indispensables dont la partie francophone du pays a besoin, soit le seul grand gagnant des blocages actuels sera le PTB qui continuera à grimper. Personne n’a intérêt à jouer la politique de la terre brûlée d’ici 2019, il serait temps que tous les acteurs en présence prennent leurs responsabilités.

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