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Coronavirus: un rebond de l’épidémie est-il déjà en cours ?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Ces derniers jours, le nombre de nouvelles admissions à l’hôpital liées au coronavirus a légèrement augmenté. Le taux de reproduction est également passé de 0,6 à 0,8, alors qu’il faut, selon les experts, le maintenir en dessous de 1. Ces données indiquent-elles un rebond ? Le point.

Depuis plusieurs jours, voire semaines, les différentes statistiques données par Sciensano vont « dans le bon sens », soit une tendance à la baisse pour les paramètres surveillés par les spécialistes : personnes contaminées, nouvelles hospitalisations, patients en unité de soins intensifs… Mais depuis quelques jours, les nouvelles admissions dans le secteur hospitalier ne diminuent plus, voire sont en légère hausse. Après être descendues sous la barre des 50 (43 précisement), les nouvelles admissions sont remontées à 70, 81 et 67 respectivement les jours suivants.

Coronavirus: un rebond de l'épidémie est-il déjà en cours ?
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Un relâchement « pré-déconfinement »

Une situation qui inquiète les spécialistes, dont Marius Gilbert, épidémiologiste (ULB) et membre du Groupe d’experts sur l’exit strategy (GEES). S’il trouve ces statistiques particulièrement « préoccupantes », c’est parce qu’elles ne peuvent pas encore être l’effet du début du déconfinement. « Si on avait suivi la tendance à la décrue qu’on a observé au cours des dernières semaines, on aurait dû, déjà dès ce week-end, avoir moins d’admissions que ce qu’on a eu. On parlait de bons chiffres, mais ils n’étaient pas suffisamment bons », a-t-il exprimé sur le plateau de la RTBF.

Si ces chiffres ne sont pas le reflet du déconfinement, comment les interpréter ? « Cela se confirme avec les derniers chiffres : on est à la fin de cette période de décrue. Mais les chiffres qu’on a maintenant sont plutôt consécutifs à l’annonce des mesures du 4 mai. » Lors de la conférence de presse suite au Conseil national de Sécurité annonçant les étapes du déconfinement, il y a eu un effet de relâchement, observé aujourd’hui. Selon lui, ce n’est que dans les semaines qui viennent « que l’on va voir, graduellement, les effets de ces 3 vagues de déconfinement successives. »

De son côté, Yves Van Laethem le porte-parole interfédéral Covid-19, nuance. Si la statistique était importante au plus fort de l’épidémie pour éviter une saturation des hôpitaux, il n’est pas anormal qu’elle ne soit pas en constante baisse : « C’est un indicateur qui fluctue très fort, surtout dans cette période de décroissance », explique-t-il au micro de La Première. « C’est quelque chose qui va et qui vient. C’est pour ça que depuis quelques jours on a une autre manière de l’interpréter, qui est l’évolution sur une semaine de temps et plus au jour le jour. Jusqu’à mercredi, cette évolution était tout à fait décroissante. Je pense qu’on reste dans la logique de descente continue. » Notons également que le nombre total de patients occupant un lit d’hôpital (soit la différence entre les admissions et les sorties) est quant à elle en constante décroissance.

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Plusieurs critères à prendre en compte

Plusieurs critères sont pris en compte pour juger de l’évolution, bonne ou mauvaise, de l’épidémie de coronavirus en Belgique, a indiqué Yves Van Laethem lors de la conférence de presse du Centre de crise et du SPF Santé publique.

« Nous ne nous focaliserons pas sur un seuil mais plutôt sur des tendances, notamment celle de l’évolution du nombre d’hospitalisations », a-t-il expliqué. « Et celle-ci est bonne pour le moment ». Il assure que ce chiffre est suivi au quotidien et qu’il en sera tenu compte, tout comme seront attentivement scrutés le nombre de nouvelles contaminations, le taux d’absentéisme au travail et le nombre de personnes souffrant de syndrome respiratoire aigu. « C’est à partir de là que nous devons être capables de réagir en temps voulu. »

Surveiller la vitesse d’un éventuel rebond

Le taux de reproduction (ou R0), c’est-à-dire le nombre de gens qu’une personne va contaminer, a également un peu augmenté. Ces derniers jours, il est passé de 0,6 à 0,8. C’est parallèle à la stagnation des nouvelles admissions à l’hôpital. « Si les hospitalisations restent stables, ce taux va se rapprocher de1 progressivement », explique Marius Gilbert. Or, le but, dans la stratégie de déconfinement, est bien de garder cette valeur en dessous de 1. « Il faut en tenir compte, mais il y a plusieurs manières de le calculer », précise Yves Van Laethem. Moins il y a de personnes hospitalisées, plus la fluctuation du R0 peut être importante. C’est pour ça qu’on utilise d’autres indicateurs pour affiner les tendances.

Marius Gilbert ne s’inquiète pas particulièrement du retour à l’école ce lundi. Mais il conseille, malgré le beau temps et les tentations de shopping, de faire le plus d’effort individuel pour éviter les possibilités de transmissions. « C’est ça qui fera en sorte que, si remontée il y a, elle ne soit pas trop rapide et qu’on puisse la gérer. » Il se dit quand même « préoccupé » par la possibilité de reprise. « C’est maintenant qu’on va voir les effets des déconfinements, à partir de la semaine prochaine. Il est difficile d’imaginer que ça n’augmente pas. Mais le grand point d’interrogation, c’est de savoir à quelle vitesse. Il va falloir y garder un oeil de façon extrêmement précise », conclut-il.

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