Bagarre entre jeunes et forces de l'ordre, à Blankenberge: trop de monde sur un trop petit périmètre. © BELGAIMAGE

Coronavirus : la gestion globale de la crise baigne dans le vaste flou

Thierry Fiorilli
Thierry Fiorilli Journaliste

Cinq mois après les premières mesures antipropagation du virus, l’incohérence semble rester de mise dans la gestion belge de la crise. A en juger par un premier bilan d’experts et des décisions contradictoires en matière de mobilité et de santé. Qui ont provoqué le clash à la côte.

Cinq mois, ce jeudi 13 août. Cinq mois que le coronavirus a tout bouleversé. Cinq mois, près de 10.000 morts en Belgique, presque 750.000 dans le monde, vingt millions de personnes contaminées, le confinement de milliards d’autres, les « gestes barrières », les masques, le gel hydroalcoolique, les réserves de papier hygiénique, les frontières fermées, les applaudissements, le télétravail, la catastrophe économique pour nombre de secteurs, les bulles sociales, les courbes qui baissent, puis qui remontent, les reconfinements locaux. Et, à quinze jours de la rentrée scolaire, la première après une année terminée avant même le printemps, toujours cette impression de naviguer à vue.

Entre les experts qui annoncent « la deuxième vague » imminente et ceux qui estiment qu’il n’y en aura pas, entre l’interdiction ici et ce qui est autorisé là, entre les consignes des uns et les décisions des autres, ce n’est pas faire de preuve de négativisme ou de poujadisme qu’affirmer que la gestion globale de la crise sanitaire baigne dans le vaste flou, la contradiction et sans grande cohérence.

A quinze jours de la rentrée, toujours cette impression de naviguer à vue.

Ainsi des événements sont survenus fin juillet et début août à la côte. Vacances et canicule ont poussé des milliers de Belges à prendre la direction de la mer. La SNCB y est allée de son coup de pouce en augmentant le nombre de ses trains vers le littoral. Alors que tous les échelons de pouvoir (fédéral, régionaux et communaux) appelaient à la distanciation sociale et imposaient la limitation ou l’interdiction de rassemblement de foules. Résultat : Ostende et Blankenberge prises d’assaut. Avec ramdam, un dimanche soir, à l’heure du retour, à la gare de la première. Avec bagarre entre jeunes et forces de l’ordre, un samedi, sur la plage de la seconde. Dans les deux cas, parce qu’il y avait trop de monde sur un trop petit périmètre.

Conséquences : plusieurs stations ont décidé d’interdire l’accès à leur territoire à une partie de la population. Les touristes d’un jour, les groupes de plus de cinq, ceux qui n’ont pas réservé leur place… Polémiques à la clé : ce sont les moins nantis, ceux qui ont déjà le plus souffert du confinement, les jeunes des quartiers populaires notamment, qui sont discriminés, s’insurge ainsi et entre autres la Ligue belge des droits humains, qui appelle à arrêter de ne recourir qu’aux interdits pour faire face à la pandémie ; ce sont des fauteurs de troubles qui ont agressé la police, s’étranglent beaucoup d’autres, dont le ministre de l’Intérieur, qui appelle à punir plus sévèrement, plus vite, plus systématiquement.

De son côté, la commission parlementaire spéciale chargée d’évaluer la gestion de la crise en Belgique a tenu sa première réunion, le 7 août, bien plus tôt que prévu (le rapport définitif des experts n’est attendu que fin du mois), vu la recrudescence des cas de contamination. Et trois de ces experts ont dégainé franco : on a minimisé l’épidémie, on a improvisé, on a communiqué de façon catastrophique, on ne savait pas à qui s’adresser, qui devait décider, il y a eu une chasse gardée de quelques experts, on n’a pas été capable de s’inspirer de ce qui se faisait bien ailleurs, on doit s’interroger sur le rôle de l’Organisation mondiale de la santé…

Cinq mois. Et tout le monde semble toujours marcher sur la tête.

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