« Celui qui touche à la sécurité sociale se verra présenter la note aux élections »

« Si nous souhaitons maintenir notre État-providence, nous devons moderniser notre sécurité sociale, mais les déclarations ronflantes ne font pas avancer les choses » écrit notre confrère de Knack Ewald Pironet.

Représenté sur de grandes affiches électorales reprenant le slogan « Votre sécurité sociale », Louis Tobback dardait un regard perçant sur l’électeur. C’était il y a vingt ans. La campagne du chef de file socialiste répondait au libéral Guy Verhofstadt. À cette époque, Verhofstadt ne laissait pas passer une occasion d’attaquer la sécurité sociale, et du même coup les syndicats et les mutuelles. Malgré leur implication dans le scandale de corruption autour des hélicoptères Agusta, les socialistes ont obtenu un bon résultat aux urnes. La campagne de Tobback, écrirait Dehaene plus tard dans ses mémoires, était « en toute simplicité, un coup dans le mille ».

Aujourd’hui, la sécurité sociale fait à nouveau l’objet de débat depuis que Bart De Wever a déclaré qu’il y avait beaucoup d’argent à y ramasser. Il est clair que le gouvernement fédéral manque d’argent. D’après l’ancien premier ministre Elio Di Rupo (PS), qui cite les calculs de la Banque Nationale, il doit encore trouver 6 milliards d’euros pour atteindre un budget en équilibre d’ici 2018. Et plus les élections approchent, plus la situation sera difficile. Aussi est-il possible que le gouvernement Michel revoie ses objectifs à la baisse et postpose l’équilibre budgétaire. Ceci dit, reste à savoir si l’Europe acceptera un nouveau report.

De Wever a fustigé les indemnités perçues par les syndicats et les mutuelles pour le traitement administratif de dossiers de la sécurité sociale. Les syndicats et la Caisse auxiliaire de paiement des allocations de chômage perçoivent 227 millions d’euros pour le paiement d’allocations de chômage. Les mutuelles touchent, quant à elles, un peu plus d’un milliard d’euros pour la gestion de l’assurance maladie. Il est fort possible qu’on puisse réaliser quelques économies, mais ce n’est pas là qu’on trouvera de grosses sommes. De Wever le sait très bien. Il faut donc comprendre son coup de gueule davantage comme une tentative – à l’instar de Verhofstadt – d’ouvrir une brèche dans le bastion de syndicats et de mutuelles.

Le regard d’avertissement de Louis Tobback

Celui qui touche à la sécurité sociale se verra présenter la note aux élections

Si le gouvernement souhaite trouver de l’argent dans la sécurité sociale, il devra prendre des mesures qui font mal. Il pourrait accélérer la cessation progressive de la prépension, limiter les allocations de chômage dans le temps, sanctionner les malades de longue durée qui refusent du travail et ne pas rembourser certains traitements chers. Ou il peut encore diminuer les pensions déjà très peu élevées. Cependant, aucun parti de la majorité ne souhaite entendre parler de telles mesures. On ignore les projets précis de la N-VA par rapport à la sécurité sociale. Cependant, le regard d’avertissement de Louis Tobback est clair : celui qui touche à la sécurité sociale se verra présenter la note dans l’isoloir.

Tout cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a rien à entreprendre. Suite au vieillissement, les dépenses des pensions augmentent jusqu’à plus de 50 milliards d’euros et les dépenses en soins de santé risquent d’exploser, en partie aussi parce que la médecine devient de plus en plus innovatrice et chère. Il faut se demander si tout cela reste payable. En arrivant à mettre plus de personnes au travail, on réussirait peut-être. Moins de personnes vivraient de la sécurité sociale, mais y contribueraient.

L’emploi

Si nous voulons maintenir notre État-providence, nous devons moderniser notre sécurité sociale. Les déclarations ronflantes n’en font pas partie. On peut certainement augmenter l’efficacité de notre sécurité sociale, mais il faudra beaucoup de petites interventions, parfois très techniques, qui auront de grandes conséquences à long terme. Cependant, il sera primordial que beaucoup plus de gens trouvent un emploi et le gardent. C’est sur l’emploi qu’on jugera le gouvernement Michel.

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