Maarten Schenk traque les théories du complot sur ses trois écrans. © Jacques Besnard

Ce Limbourgeois passe des heures dans son sous-sol… à chasser les fake news

Le Vif

Depuis son… sous-sol, un Limbourgeois essaie de débusquer la désinformation dans le monde.

Houthalen, paisible commune du Limbourg. Durant des heures, dans son sous-sol, Maarten Schenk, la quarantaine, scrute ses trois écrans à la recherche d’articles falsifiés. Il y a six ou sept ans,  » pour plaisanter « , il a créé Trendolizer, logiciel capable de déterminer les articles les plus partagés sur les réseaux sociaux. L’outil a intéressé des éditeurs de presse souhaitant dénicher, avant les autres, les articles susceptibles de faire du clic.  » Verdens Gang en Norvège, Metro en Belgique… Puis les médias n’ont plus fait appel à nous.  » Sauf Alan Duke. En 2015, cet ancien journaliste de CNN contacte Maarten, qui traverse l’Atlantique pour lancer Lead Stories. Ce site a l’ambition de compléter les informations d’articles viraux censés être véridiques. Les deux collaborateurs captent vite qu’il existe une autre niche.  » Les fake news sont plus virales que les articles écrits par les médias traditionnels. Il y avait des rumeurs sur la mort d’Hillary Clinton et on a démontré dans un article qu’elle n’était pas morte puisqu’elle était en direct à la télé… Notre audience a grimpé en flèche.  » Depuis, Lead Stories publie quotidiennement des articles pour rétablir la vérité et compterait  » entre 100 000 et 200 000 visiteurs uniques par mois « .

Les Américains visés

Au fil du temps, le Flamand a garni une base de données en intégrant tous les sites producteurs de fake news, y compris satiriques, qu’il connaît. En raison de la taille du marché, du prix plus élevé de la pub, la plupart des fake news sont destinées aux citoyens américains et donc écrites en anglais. Les falsificateurs se contentent souvent de reprendre un article mot pour mot en remplaçant quelques éléments.  » Ce qui marche, c’est ce qui va confirmer les biais des gens. Pour qu’ils se disent : « Les médias n’en parlent pas mais je savais que ça existait »… « , argumente Maart en Schenk. Dans sa ligne de mire, les gros gibiers comme News Punch, à Los Angeles, dont le créateur est Sean Adl-Tabatabai, ex-producteur de MTV aujourd’hui accusé de propagande prorusse. Des plus  » petits  » évoluent cachés avec un objectif essentiellement pécuniaire.  » Si vous avez le choix entre l’usine ou un café devant un ordi pour gagner pareil, vous prenez quoi ? N’importe qui peut se faire 300 dollars en copiant-collant des histoires absurdes.  »

Avec l’aide de Nieuwscheckers, plateforme coordonnée par l’université de Leiden (Pays-Bas), et grâce à son logiciel, Lead Stories est parvenu à traquer un réseau macédonien à l’origine de plus de 70 sites ayant engendré plus de sept millions d’interactions sur Facebook et Twitter. Lead Stories suit les indices laissés sur la Toile : l’adresse IP, qui identifie un appareil connecté à Internet, le numéro d’identifiant d’une régie publicitaire en ligne telle que Google AdSense, etc. Ces infos permettent des rapprochements entre les sites, de trouver noms et coordonnées des auteurs…  » Avant, on faisait ces opérations manuellement. Le logiciel de Maarten nous fait gagner beaucoup de temps, assure Peter Burger, coordinateur de Nieuwscheckers. On développe de nouveaux outils pour tracer les producteurs de fake news, eux développent de nouvelles techniques ou changent de réseaux sociaux pour nous échapper.  » Le chat et la souris.

Par Jacques Besnard.

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