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Banques : « Plus jamais ça ! » Vraiment ?

Jean-Marc Damry
Jean-Marc Damry Rédacteur au Vif L'Express

Tirer les leçons du passé en modifiant les dispositions légales et réglementaires est une bonne chose. Mais les tentations ou les occasions de les contourner sont bel et bien là…

Qu’il s’agisse d’un Tsunami financier, comme en 2008, ou d’un Tsunami social comme ces jours-ci, le discours politique, est toujours le même : « Plus jamais ça ! ». Et, tirant les leçons du passé, des adaptations législatives et/ou réglementaires sont souvent prises pour éviter de retomber par la suite dans les mêmes travers. Revenons ici sur l’affaire Dexia où, parmi les griefs formulés dans la gestion alambiquée du groupe franco-belge, on avait pointé l’irrigation des structures françaises au moyens des énormes liquidités logées dans Dexia Banque Belgique, bref, au moyen de l’épargne de nos concitoyens. Le « Plus jamais ça » avait finalement amené l’Europe à brider, beaucoup plus que par le passé, les banques pour ce qui est de l’affectation des capitaux qui leur sont confiés. De son côté, le régulateur belge, anticipant d’ailleurs largement les échéances européennes, entendait quant à lui limiter dès octobre 2010 la concentration du risque des établissements financiers sur leur maison-mère, dans des limites correspondant à 100 % du capital réglementaire. Et ce n’est pas un secret, ces nouvelles dispositions indisposaient notoirement Deutsche Bank Belgium, filiale du groupe éponyme. En effet, à fin 2010, pas moins de 10 milliards d’euros d’épargne belge remontaient ainsi vers la maison-mère à Francfort, une somme qui correspondait d’ailleurs à pas moins de 95 % (sic !) des actifs de la filiale belge et à 29 fois ses fonds propres…

La lettre plutôt que l’esprit

Pour que les capitaux collectés en Belgique continuent à remonter vers Francfort sans enfreindre les dispositions belges d’abord, européennes eusuite, la Deutsche Bank a assez vite et facilement trouvé la parade : transformer sa filiale belge en une simple succursale de la maison mère allemande, bref, d’amener nos concitoyens à devenir clients de la Deutsche Bank allemande, au même titre que n’importe lequel de ses clients de Francfort, Berlin, Cologne ou Hannovre ! Les déboires récents de la première banque de la première puissance économique de la zone euro ont d’ailleurs été l’occasion de rappeler cette particularité et qu’en cas de défaillance, ce serait la garantie publique allemande sur les dépôts qui serait activée, pas la belge…

Chez BNP Paribas Fortis, la difficulté de remployer la forte base de dépôts dont elle bénéficie n’est pas non plus sans poser problème. En 2011 déjà, alors que l’exposition de BNP Paribas sur la Grèce faisait largement débat et mettait le cours à mal sur les marchés boursiers, nos confrères du Soir pointait que l’ex-Fortis Banque recyclait près de 30 milliards d’euros auprès de sa maison-mère parisienne. Là aussi, les nouvelles dispositions légales et réglementaires ont mis le holà à ce genre de pratique. Il n’empêche, est-ce vraiment un hasard si BNP Paribas envisage aujourd’hui de céder à BNP Paribas Fortis Arval, sa filiale de location de voitures (présente dans 28 pays et gérant près d’un million de véhicules) ? Il semblerait en tout cas que les transferts vers une filiale opérationnelle belge poseraient moins de problème que des flux de capitaux vers une maison-mère hors frontière

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