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Accord sur le durcissement de la libération conditionnelle

Le Vif

Le Conseil des ministres a approuvé vendredi le projet de loi durcissant le régime de libération conditionnelle, y ajoutant pour les condamnés à une lourde peine l’approbation de leur demande à l’unanimité de cinq juges.

Un accord sur la réforme de ce régime, prévue dans la déclaration du gouvernement Di Rupo, avait été approuvé en comité ministériel restreint en septembre dernier, notamment à la suite de l’émotion suscitée par la libération conditionnelle de Michelle Martin, l’ex-épouse et complice de Marc Dutroux.

Il prévoit notamment qu’un condamné à 30 ans ou à perpétuité ne puisse plus introduire sa demande de libération au tiers de sa peine, mais à la moitié.

Le régime est aussi durci pour les récidivistes. Pour une personne initialement condamnée en correctionnelle à 3 ans au moins et qui récidiverait avec une peine de 30 ans ou perpétuité, la demande ne pourra être introduite avant un délai qui passe de 10 à 19 ans. Pour celle condamnée en assise à 5 ans au moins et qui récidiverait avec une peine de 30 ans ou perpétuité, la peine minimale avant l’introduction de la demande sera portée de 16 à 23 ans.

La réforme supprime l’automaticité de la transmission de la demande de libération au tribunal d’application des peines ; cette demande devra être faite explicitement par le condamné.

Nouveauté introduite dans le projet, la décision sur une demande introduite par un condamné à 30 ans ou à perpétuité et mise à disposition du gouvernement devra être adoptée à l’unanimité de cinq juges, et non plus à la majorité simple de trois juges.

Cette disposition vise des profils criminels tels que celui de Marc Dutroux, condamné en 2004 à perpétuité et à une mise à disposition du gouvernement de dix ans. L’assassin pédophile verra sa demande de libération sous surveillance électronique examinée le 4 février prochain par le TAP.

Actuellement, cette décision est prise par un juge en appel et deux assesseurs à la majorité des voix. Mais « quand des criminels durs demandent la surveillance électronique ou une libération conditionnelle, ceci a un impact sur la société », fait observer la ministre de la Justice, Annemie Turtelboom (Open Vld).

« C’est la raison pour laquelle nous joignons pour ces cas graves deux juges de fond au tribunal d’application des peines. Ces juges de fond, qui normalement décident de la peine appliquée, doivent dorénavant prendre une décision à l’unanimité avec le juge d’application des peines et les deux juges laïcs » (assesseurs), commente-t-elle.

Ces procédures seront applicables dès la mise en oeuvre de la nouvelle loi et concerneront aussi ceux qui ont déjà été condamnés. Le gouvernement a demandé au parlement l’urgence sur cette réforme.

Enfin, le ministre de la Justice se voit accorder un droit d’injonction lui permettant de charger le ministère public de former un recours contre une décision du TAP, devant la Cour de cassation.

Rik Torfs soulève des objections

Le sénateur CD&V Rik Torfs s’inquiète de ce droit d’injonction que s’arroge le ministre de la Justice, y voyant une atteinte à la Constitution.

Pour M. Torfs, cette disposition enfreint la Constitution, qui prévoit dans son article 151 que « le ministère public est indépendant dans l’exercice des recherches et poursuites individuelles, sans préjudice du droit du ministre compétent d’ordonner des poursuites et d’arrêter des directives contraignantes de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite ».

En permettant au ministre de la Justice de charger le ministère public de former un recours contre une décision du TAP, l’indépendance du parquet se voit limitée, en contradiction avec la Constitution, conclut Rik Torfs.

A ses yeux, le droit d’injonction va en outre à l’encontre de la philosophie du TAP, qui avait été institué pour éviter que le ministre de la Justice décide des libérations conditionnelles.

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