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2017: les vrais-faux dirigeants de Nethys

Publifin n’a pas renseigné les dirigeants effectifs de certaines de ses filiales en 2017. La ministre des Pouvoirs locaux a passé l’éponge, mais attend de pied ferme le prochain rapport.

Dans sa mise en demeure du 20 novembre dernier adressée aux membres du conseil d’administration de Publifin, la ministre des Pouvoirs locaux, Valérie de Bue (MR), évoquait la question du management dans les filiales de Publifin. Vraisemblablement, les rémunérations respectent les plafonds fixés, relevait-elle, mais les dirigeants et le personnel ne sont toujours pas au régime salarié ou statutaire. Les deux délégués du gouvernement wallon qui ont scanné Publifin pendant six mois dénoncent, eux, des « rémunérations indirectes non reportées » dans le rapport de rémunérations de l’exercice 2017 remis par Publifin en juin dernier. Le décret « gouvernance » implique, en effet, de déclarer « les rémunérations et tout autre éventuel avantage, pécuniaire ou non, directement ou indirectement accordés aux titulaires des fonctions de direction ». Les deux experts relèvent aussi que les dirigeants sous statut d’indépendant n’ont pas dévoilé leurs rémunérations de 2017.

Les petits jeux autour du décret « gouvernance » ne s’arrêtent pas là. Selon nos informations, certains managers présentés comme des dirigeants de filiales ne sont pas ceux qui exercent effectivement les plus hautes responsabilités. Cela concerne au moins trois sociétés: Voo (pôle télécom), Elicio (énergies renouvelables, ex-Electrawinds) et Win (technologies de l’information et de la communication).

Ainsi, le directeur du département Technology de Voo, Christian Vyncke, est renseigné comme le titulaire de la « fonction dirigeante locale » selon la terminologie absconse du décret, alors que Jos Donvil est manifestement le patron du pôle télécom de Nethys. De la même façon, Philippe Naelten, indiscutable administrateur délégué de Win, est zappé au profit d’un subalterne. Ludo Vandervelden est le directeur général d’Elicio, mais c’est un autre nom qui figure la « fonction dirigeante locale ». Le point commun de tous ces managers? Ils sont indépendants. Un régime de travail que le décret « gouvernance » ne connaît pas… Les auteurs du décret ne pouvaient cependant pas ignorer que des indépendants très qualifiés peuplent les filiales de Nethys. Alors, oubli involontaire ou délibéré? Nethys s’est engouffré dans la faille.

Pour tenter de dénouer ce noeud, plusieurs réunions se sont tenues au cabinet des Pouvoirs locaux, notamment le 25 septembre dernier, en présence du chef de cabinet, de la présidente de Publifin, Stéphanie De Simone, et de l’avocat Jean Bourtembourg. Ce dernier soutenait qu’il faut distinguer la « fonction de direction » et la « fonction dirigeante locale », et qu’en fonction de cette différence, les membres des comités de direction et les personnes qui sont liées par un contrat d’entreprise ne peuvent pas être ceux qui exercent une « fonction dirigeante locale », puisque le décret mentionne que les titulaires de celles-ci sont des contractuels ou des statuaires. S’appuyant sur cet avis juridique maison, Publifin a donc décidé de présenter comme titulaires de la « fonction dirigeante locale » de ses filiales les employés ou statutaires bénéficiant, en 2017, du plus haut salaire dans les filiales en question.

La ministre De Bue a accepté de passer l’éponge pour 2017, au titre de la non-rétroactivité du décret, entré en vigueur le 24 mai dernier. Mais pour 2018, elle a mis en demeure Publifin de « démontrer que les rémunérations respectent les plafonds fixés, ce qui semble le cas selon les documents que (vous avez) produits, mais également et surtout que l’ensemble des fonctions de direction, tout comme le personnel de manière générale, tombent désormais effectivement intégralement sous le régime du contrat de travail ou du statut, ou prennent concrètement cette direction. » En bref, il faut en finir avec les indépendants chez Nethys! L’existence d’un problème d’ordre juridique ne dispensait pas Publifin de respecter, sinon la lettre, du moins l’esprit du décret wallon, lequel aspire à une plus grande transparence des rémunérations et de l’organigramme dans les entreprises publiques ou à participation publique significative. Une mauvaise volonté à rapprocher des deux recours en annulation du décret wallon introduits par Intégrale et Socofe, deux filiales de Nethys, devant la Cour constitutionnelle.

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