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Le corps dénudé des hôtesses, moyen tenace d’appâter le client sur les salons automobiles

Le Vif

Sur les stands du Mondial de l’automobile à Paris, les tenues affriolantes des hôtesses restent un argument de vente, au grand dam des féministes, même si certaines marques rallongent les ourlets ou optent pour des tenues plus sobres type veste-pantalon.

Hôtesses au Mondial de l’auto à Paris: jupes affriolantes et pantalon-veste

« L’hôtesse plante verte n’existe plus! », assure Carole François, responsable clientèle showroom à l’agence Pénélope qui a recruté près de 300 hôtesses pour ce grand rendez-vous commercial.

Certes, certains constructeurs réclament encore du « 1m80 avec taille 36, soit l’impossible », mais selon elle, « on ne voit plus autant de chair » sur les stands. Son explication ? « Les constructeurs savent que les photos vont faire le tour des réseaux sociaux ».

« Ca reste macho. Les pires sont les Italiens », accuse cependant une autre grande agence parisienne qui a recruté 400 hôtesses pour le Mondial.

Pour l’association féministe Les chiennes de garde, la « sexualisation de la voiture, associée au pouvoir masculin, est insupportable ». « On a l’impression qu’on a la fille avec la voiture pour le même prix! » et « quand les constructeurs nous font croire qu’ils ont besoin de ça pour le commerce, ils se moquent de nous », s’insurge Florence Montreynaud, fondatrice du mouvement.

Le corps dénudé des hôtesses, moyen tenace d'appâter le client sur les salons automobiles
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Les professionnels de l’accueil événementiel disent pourtant constater une évolution depuis « environ trois ans » et insistent sur la « formation d’un à trois jours » suivie par les jeunes recrues.

« On est à l’égal du commercial », « pas la potiche à mettre le pied sur la calandre », estime Mathilde, 21 ans, qui a été formée pour exercer ce « job alimentaire » sur le stand, blanc impérial, de Volkswagen.

Chemise bleue ciel sur un jean foncé et tennis blanches, très maquillée, la jeune étudiante vit sa deuxième expérience dans un salon automobile. Son premier salon – avec une autre marque- lui a appris à « accueillir et renseigner le client », mais aussi à s’attendre à des propos salaces de la part de certains « clients plus âgés ».

« Aussi chaude que le moteur ? »

« Une fois, il y en a un qui m’a dit: est-ce que tu es aussi chaude que le moteur? ». « Une autre fois, c’était « est-ce que vous pouvez monter sur n’importe quel châssis? » ».

Recueillir les impressions des hôtesses du salon n’est pas simple, les échanges étant rapidement écourtés par un encadrement soucieux de savoir quel est le sujet.

Dans le monde automobile plus qu’ailleurs, les clichés, y compris les plus éculés, ont la vie dure, comme le note un rapport de la délégation du Sénat aux droits des femmes publié mercredi, avant l’ouverture du salon aux professionnels, pour « interpeller les différents acteurs ».

Ses recommandations: « sortir du registre machiste » dans les publicités, choisir « des tenues vestimentaires qui ne réduisent pas la femme à un rôle de faire-valoir » et recruter « à parité » hôtes et hôtesses pendant les salons, renforcer la mixité professionnelle au quotidien dans le secteur industriel.

Chez Citröen – seule marque française à être dirigée par une femme, la britannique Linda Jackson – la parité est affichée sur les stands, avec autant de garçons que de filles à l’accueil. « Je trouve ça tout simplement juste », sourit le jeune Riwan, 19 ans, pantalon rouge veste beige.

Pour la fondatrice des chiennes de garde, « c’est bon signe qu’une marque évolue dans le sens d’une démarche égalitaire ».

« Mentalité archaique »

Mais, selon elle, « la mentalité égalitaire cohabite avec la mentalité archaïque des années 1950, avec les tenues provocantes ». D’autant que « la notion d’hôtesse est trouble ».

Le corps dénudé des hôtesses, moyen tenace d'appâter le client sur les salons automobiles
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Raphaëlle Rémy-Leleu, qui milite à l’association « Osez le féminisme », pointe du doigt des « pratiques typiques à la fois d’une hypersexualisation des corps des femmes et de leur marchandisation ».

Exemple, sur le podium tournant du sud-coréen Ssangyong: perchées sur des talons de 12 cm, deux hôtesses, une blonde et une brune, moulées dans une robe très courte au dos nu croisé, sont priées de poser avec trois hommes pour un selfie… sans aucune voiture dans le cadre.

Ces deux hôtesses n’ont pas été dotées de tablette pour leur mission d’accueil, comme sur d’autres stands. Leur rôle consiste à « soulever le voile » du nouveau modèle Liv2 et « être une vitrine pour attirer la clientèle », comme l’explique la blonde Irina.

Stand Ssangyong au Salon de l'Auto 2013 à Bruxelles
Stand Ssangyong au Salon de l’Auto 2013 à Bruxelles© Belga Image

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