© BELGA

L’achat d’une nouvelle voiture, le véritable casse-tête

Urbain Vandormael
Urbain Vandormael Spécialiste voitures  

Le Salon de l’Auto est l’occasion pour de nombreux visiteurs d’arrêter leur choix sur un modèle bien particulier de véhicule et de passer à l’achat. Mais entre une voiture diesel ou essence, hybride ou entièrement électrique, le choix est cornélien.

Malgré la neige, l’intérêt du public dépasse déjà les attentes selon les organisateurs de l’édition 2019 du Salon de Bruxelles. Il est encore trop tôt pour faire le point sur le nombre de bons de commande déjà signés dans les stands et chez les concessionnaires, mais le taux de participation élevé prouve que la voiture reste extrêmement populaire. Une enquête auprès des exposants montre que de nombreux visiteurs ont l’intention d’acheter une nouvelle voiture, mais hésitent encore à franchir le pas. Perdus face aux multiples choix qui s’offrent à eux, ils hésitent entre une voiture diesel ou essence, hybride ou entièrement électrique. Et le doute ne fait que s’amplifier.

« A l’aide, nous ne savons pas quel modèle choisir ! » est une phrase entendue des centaines de fois par jour dans les allées du Salon de l’Auto. La préoccupation de nombreux visiteurs est de savoir s’il est encore responsable pour l’environnement et la santé d’acheter une voiture diesel. D’autres questions fusent : combien de kilomètres tient une voiture électrique et combien de temps faut-il pour la recharger ? Ou encore, la recharge est-elle possible à la maison avec l’installation existante ? Qu’en est-il des incitants financiers du gouvernement, quel est le montant de l’intervention ? La déduction fiscale s’applique-t-elle toujours après 2020 ? Quelles villes sont déjà et seront demain interdites aux diesels les plus polluants?

La Belgique, patrie du diesel

Le désespoir des visiteurs du Salon est grand et compréhensible. Les tergiversations du gouvernement ces derniers temps, signe d’un manque de vision et de politique à long terme, a semé la confusion auprès du grand public. Il est légitime que ce qui est prôné aujourd’hui puisse être condamné demain. Jusqu’à il y a quelques années encore, les propriétaires de véhicules diesel pouvaient bénéficier de taux d’accises peu élevés sur le gazole et d’une réduction des taxes, ce qui, combiné à une faible consommation, a entraîné une ruée vers ce type de véhicules.

Pendant longtemps, la Belgique a été LE pays du diesel en Europe, en raison de la forte proportion de voitures de société dans notre pays. Dans les pays voisins, une voiture de société est généralement réservée aux directeurs et chefs de service, alors qu’en Belgique, elle fait partie intégrante de la rémunération, ce qui permet aux employeurs de payer moins d’impôts.

Les gestionnaires de grandes flottes sont obligés de choisir la formule la plus avantageuse pour eux-mêmes et pour leurs clients. Ils le font sur la base de toute une série de paramètres tels que le profil du client, sa consommation, ses coûts de maintenance et sa valeur résiduelle. C’est ce qui explique pourquoi les sociétés de leasing poussent encore à l’achat de voitures diesel. Et cela, malgré le fait que depuis le « dieselgate », il est dépeint par les politiciens comme la cause de tous les maux.

Les politiciens de tous les milieux tentent de détourner l’attention de leurs propres responsabilités. Mais il faut être clair la dessus, ce sont eux et personne d’autre qui ont créé cette zone grise qui a enjoint et permis aux constructeurs d’explorer et de franchir les limites de ce qui est autorisé. Dans ce cas, ils ont discrètement fermé les yeux, pour ne pas mettre en danger l’emploi dans leur propre circonscription électorale ou pays.

L'achat d'une nouvelle voiture, le véritable casse-tête
© BELGA

Heureusement pour elle, personne n’a enregistré le nombre de fois où la chancelière Angela Merkel a joué de son influence au sein de la Commission européenne et des institutions européennes au profit de l’un ou l’autre constructeur automobile allemand. Après le Dieselgate, cela s’est toutefois produit moins souvent ou, en tout cas, de façon moins flagrante.

On peut se réjouir que l’utilisation de combustibles fossiles dans les voitures prenne bientôt fin. Nous devons cependant être conscients que même après 2025 et 2030, il y aura encore des voitures à essence et au diesel dans les rues. Pour la simple raison que le passage à la voiture électrique prend plus de temps qu’initialement prévu. Aussi, parce que la dernière génération de véhicuke diesel est devenue beaucoup plus respectueuse de l’environnement. La mise en oeuvre de filtres à particules et d’adBleu a permis de réduire considérablement les émissions de particules et de NOx.

De plus, les nouveaux moteurs diesel émettent beaucoup moins de CO2 qu’un moteur à essence comparable. Pour cette seule raison, les marques ne seront pas en mesure d’atteindre l’objectif européen plus strict de 95 g/km de CO2 sans le diesel. On peut sincèrement espérer que les moteurs à combustion polluants seront remplacés dès que possible par des moteurs électriques à émission zéro. Mais cela prendra du temps.

Les fabricants ont attendu beaucoup trop longtemps avant d’agir. Ils ont continué à investir trop longtemps dans l’amélioration de la technologie existante plutôt que d’emprunter de nouvelles voies. Ils étaient assurés d’être soutenus par les politiques, mais ça, c’était avant l’arrivée de Tesla et l’éclosion au grand jour du scandale du « dieselgate » chez Volkswagen. Le « dieselgate » a mis profondément à mal la confiance entre la politique berlinoise et les dirigeants des marques automobiles allemandes.

« D’un jour à l’autre, tout le trafic s’immobiliserait »

La pire chose qui puisse nous arriver maintenant, c’est que tout le monde se convertisse subitement à la voiture électrique. D’un jour à l’autre, tout le trafic s’immobiliserait, les trains, les tramways et les métros ne pourraient pas fonctionner. L’alimentation électrique des foyers serait coupée, en raison de la surcharge du réseau électrique. Parce que le système actuel est désespérément dépassé et n’est absolument pas adapté à l’arrivée de la voiture électrique. Concrètement, cela signifie qu’il n’y aurait plus d’eau chaude pour faire la cuisine ou prendre sa douche et qu’il ne serait plus possible d’utiliser Internet ou de regarder la télévision.

Tout cela montre à quel point notre monde est devenu complexe et combien il est difficile de faire des prédictions. Surtout lorsqu’elles ne sont pas fondées sur des faits et des vérités et lorsque les promesses ne sont pas tenues, pour des raisons politiques ou parce qu’elles sont pratiquement impossibles à réaliser. Pour gagner la faveur de l’électeur crédule, les politiciens sont prêts à promettre l’impossible. En conséquence, toute croyance en la politique finira par disparaître. Le passé et le présent ont démontré que ces situations pouvaient mener à des situations dramatiques.

L'achat d'une nouvelle voiture, le véritable casse-tête
© BELGA

Les constructeurs automobiles n’ont pas non plus une liberté totale. Ils savent longtemps à l’avance à quoi s’attendre, à quels critères leurs nouvelles voitures doivent répondre. Pensez à l’introduction du nouveau cycle WLTP. Beaucoup de marques – et pas les plus petites, sans parler d’Audi et de VW – ont réussi à faire homologuer leurs modèles avec un certain retard. En conséquence, les clients ne pouvaient plus commander la voiture de leurs rêves ou ils la recevaient plus tard que prévu.

Il est aussi difficile de comprendre que des marques parlent de mobilité électrique, mais ne disposent que de quelques modèles électriques dans leur gamme. Au Salon de Bruxelles, vous devez les chercher à la loupe. Et si vous en avez trouvé un, il s’avère généralement d’un coût prohibitif. Les exceptions (Hyudai Kona EV, Kia e-Niro, Nissan Leaf, Renault Zoëof e-Smart) confirment la règle. Combien peut donc gagner la personne qui roule en Audi e-tron, Mercedes EQC, Porsche Taycan ou Tesla affiché à un prix de 80 000 euros et plus ?

« Le client n’est plus le roi, mais une vache à lait »

Pour promouvoir la voiture électrique, les hommes politiques et les industriels doivent prévoir la mise en place d’équipements adaptés, comme un réseau dense de bornes de recharge ou un stationnement gratuit à proximité immédiate des bâtiments publics du centre-ville.

L’octroi d’incitations financières s’épuise. Si les constructeurs veulent atteindre leurs objectifs ambitieux, ils doivent mettre sur le marché des voitures électroniques abordables. Pourquoi une voiture électrique devrait-elle rouler à 250 km/h et accélérer jusqu’à 100 km/h en moins de 3 ou 4 secondes si elle est destinée à rouler le plus écologiquement possible de A à B ?

Il est dès lors plus intelligent d’investir dans une réelle autonomie de conduite plutôt que, par exemple, dans une caméra qui remplace le rétroviseur extérieur tout en consommant plus d’énergie. A quoi servent les lampes LED si les phares sont sales et que les buses des phares ont été retirées de la liste des accessoires?

Est-ce exagéré de dire que pour le gouvernement, les objectifs budgétaires l’emportent sur les objectifs climatiques et que les consommateurs sont tenus par les producteurs en recevant de petits cadeaux par-ci, par-là? Qu’ils conduisent avec du diesel et de l’essence, avec un véhicule hybride ou entièrement électrique, d’autres décident entre-temps à leur place. Le client n’est plus le roi, mais une vache à lait.

(Traduction: Ca.L)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire