Yves Stox

Les deux mesures les plus puissantes du projet de loi sur le “travail faisable”

Yves Stox Senior Legal Counsel chez Partena Professional

Les travailleurs réclament de l’autonomie. Si cette autonomie diminue, leur satisfaction décroît. Les clients s’attendent à bénéficier d’un service flexible. Résultat : les entreprises doivent opérer dans un environnement dynamique et imprévisible. Mais comment y faire face ? Une chose est sûre, l’entreprise qui ne parvient pas à répondre aux attentes des clients et des travailleurs décevra également les actionnaires…

Quoi qu’il en soit, le droit du travail belge n’aide pas les entreprises. L’écart entre les clients et les employés devient intenable. Concilier flexibilité et autonomie avec la compliance s’avère extrêmement difficile. La solution à long terme est de plus en plus sous pression.

Deux mesures gouvernementales promettent une amélioration: les 100 heures supplémentaires volontaires et l’horaire de travail dynamique. Vous n’en avez pas encore beaucoup entendu parler, mais ce sont les deux idées les plus puissantes issues du projet de loi “travail faisable et maniable”. Voici pourquoi.

100 heures supplémentaires volontaires

Chaque année, un travailleur peut prester 100 heures supplémentaires volontaires. L’employeur et le travailleur doivent se mettre d’accord. Cet accord reste valable 6 mois. Inutile de prévoir une durée de validité plus longue. Pas besoin du consentement de l’inspection sociale ou de l’organisation syndicale. Sans justification sur le comment ni le pourquoi.

L’entreprise est tenue de payer les heures supplémentaires volontaires (salaire et sursalaire), mais est déchargée du repos compensatoire. Le planning s’en trouve facilité. Plus aucun effet boule de neige des heures supplémentaires et du repos compensatoire.

Liberté, mais avec des limites

La solution idéale pour l’employeur qui souhaite répondre à une demande urgente. Intéressant pour le travailleur qui veut travailler plus pour gagner plus.

Chaque travailleur peut prester jusqu’à 100 heures supplémentaires par année calendrier. Par jour, le travailleur peut prester un maximum de 11 heures, à concurrence de 50 heures par semaine maximum.

Il est possible de combiner les heures supplémentaires volontaires avec les heures supplémentaires ordinaires. Sur ces heures supplémentaires ordinaires, le travailleur se constitue néanmoins un repos compensatoire.

L’horaire dynamique

Il se peut que votre entreprise applique déjà un horaire de travail dynamique, mais la flexibilité se limite au jour même. Le caractère dynamique est toutefois innovant. Le travailleur peut travailler davantage tel jour, thésauriser ce temps de travail et travailler moins à une date ultérieure.

“Économiser” ou “emprunter” du temps

Grâce à l’horaire glissant, le travailleur peut prester plus que la durée de travail moyenne telle semaine, ou inversement travailler un peu moins une autre semaine. Il “économise” ou “emprunte”, pour ainsi dire des plages de travail mobiles. Ces plages de travail mobiles “économisées” ou “empruntées” sont toutefois limitées à 12 heures pendant la période de référence de 3 mois.

Un horaire de travail dynamique procure beaucoup d’autonomie aux travailleurs

Il y a toutefois des limites : max. 9 heures de travail par jour et 45 heures par semaine. Et dans un trimestre, la durée de travail hebdomadaire moyenne doit être respectée.

Les règles du jeu au sein de l’entreprise

Un horaire de travail dynamique procure beaucoup d’autonomie aux travailleurs. Le work life blend devient réellement possible pour la première fois. L’entreprise peut déterminer elle-même la mise en oeuvre des horaires de travail dynamiques. Comment ? L’employeur a le choix entre une CCT (convention collective de travail) d’entreprise et un règlement de travail. L’employeur doit également prévoir un système de suivi du temps. Juste et logique.

La propre responsabilité

S’il s’avère, à l’issue de la période de référence, que le travailleur a “emprunté” trop de plages de travail mobiles, l’employeur peut retenir le “trop-payé”. Si le travailleur a “épargné” trop de plages de travail mobiles à la fin de la période de référence, ce temps est en règle générale perdu.

Cette responsabilisation du travailleur individuel est neuve. En même temps, c’est la contrepartie logique de la flexibilité que gagne le travailleur pour restaurer l’équilibre travail-vie privée.

“Combiner futé”

Il est parfaitement possible de combiner l’horaire de travail dynamique et les 100 heures supplémentaires volontaires. Par exemple, supposons qu’une entreprise a un horaire de travail hebdomadaire normal de 38 heures.

Du lundi au jeudi, les travailleurs prestent 1 heure de plus par jour, et économisent ainsi une plage de travail mobile d’1 heure. Ajoutez à cela 2 heures supplémentaires volontaires. Du lundi au jeudi, les travailleurs prestent 11 heures par jour, et au total 50 heures par semaine.

Cela peut aller vite

Le timing est serré. Le gouvernement souhaite que ces deux mesures entrent en vigueur le 1 février 2017. Le gouvernement a beau avoir atteint un accord politique en octobre, les textes doivent encore être validés par la Chambre. Mais même si ces mesures n’entreront en vigueur que le 1 mars, les entreprises peuvent d’ores et déjà se mettre à pied d’oeuvre. L’avenir est à nos portes.

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