Rosanne Mathot © xzarobas

Oh, la vache !

Où il est question d’un retour de boomerang, de journalistes et de vaches en maillots.

Parfois, l’absurdité n’est pas gentille. Elle peut cacher de grands malheurs. Il pensait à ça, Le Fleuri, dans la torpeur de juin qui précédait la pétarade du premier service, au Geyser. En savates, sur sa terrasse à ciel ouvert, du haut de son maigre mètre nonante, il tenait à deux mains une tasse de café au lait, selon une méthode de convoiement rustique, mais qui, pour l’anxieux chef de salle, s’était souvent avérée on ne peut plus efficace.  » J’en connais, des journalistes ! qu’il dit soudain au citronnier rachitique à qui il se confiait, tous les soirs, comme on va à confesse. Je vais peut-être te choquer, mais les journalistes, ce ne sont pas tous des collabos ou des crapules. Ce ne sont pas tous des sous-produits gauchistes de l’humanité, mi-hommes, mi-bêtes, selon une vision trop facilement admise par les politiques, de nos jours. C’est vrai que j’en ai connu des spéciaux, qui menaient une vie nomade, vraiment rude, à la lisière de la pauvreté sauvage, tu vois ? Une existence totalement différente de l…  »

BAM ! Un objet volant en bois laqué, propulsé depuis le nord de la frontière linguistique, percuta alors de front le front du Fleuri qui se tut sur le coup. Le café au lait ruissela, avant de s’évaporer dans un horizon blanc devenu chiffon.

Lorsque Le Fleuri revint à lui, allongé entre les rhododendrons et le citronnier rachitique, le front douloureusement boomerangisé par l’objet laqué en bois non identifié qui l’avait flanqué par terre, le chef de salle crut qu’il était mort (1).

Et pour cause : un pis mollasson et tiède, ballotté dans un maillot de bain mouillé, lui bouchait la vue. Une langue râpeuse lui malaxait la nuque. Vu de plus près, c’était tout un troupeau de vaches qui l’entourait. La scène était inhabituelle, fantastique et approximative, comme un croquis de cour d’assises.

Les vaches qui s’activaient autour de lui affirmèrent s’être échappées du festival SuperVliegSuperMouche (2), qui venait de donner à Bruxelles des faux airs agricoles, le temps d’un week-end.

Il y en avait en lunettes de soleil. D’autres en maillot de bain. D’autres étaient entièrement nues. L’une se démarquait carrément : l’insouciance polychrome qui émanait de son paréo rose et vert semblait indiquer une provenance exotique. Enfin, dans un superbe tremblement de mamelles, une vache serbe (qui disait se nommer Penka et être sous la protection de Paul McCartney (3) ) baissa la tête et lui colla un baiser joyeux dans la nuque.

 » Si je suis en train de me faire embrasser par une vache serbe en maillot échancré, il est tout à fait possible qu’il existe un « porc belge en Méditerranée » « , contrairement à ce qu’a raconté Charles Michel aux journalistes, l’autre jour, au sujet de l’Aquarius, se dit Le Fleuri (4). Avant de s’évanouir à nouveau, il confia au citronnier rachitique :  » Tu sais ce qui est dommage ? C’est que souvent, le plus important, ce n’est pas la vérité. Le plus important, c’est souvent ce qu’on a envie de croire.  »

Mais c’est pas tout ça : l’heure tourne ! Où est encore passé le serveur ? S’agirait pas de louper le film, qui va démarrer, sur la Une, à 20h15…

(1) Fin mai dernier, Theo Francken promettait un  » retour de boomerang  » dans l’affaire du décès de Mawda.

(2) La 7e édition du festival d’art pour enfants a eu lieu dans le parc de Forest (avec quatre vaches).

(3) La fugue de Penka, la vache bulgare ayant fui en Serbie, s’est muée en affaire européenne. Même Paul McCartney s’est ému de son sort. Elle ne devrait pas être abattue.

(4)  » La Belgique n’a pas de port en Méditerranée « , lâché par Charles Michel, le 11 juin, en présence du Premier ministre français, à propos de l’affaire de l’Aquarius.

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