© DR

Quand le cinéma repart à la guerre

En attendant Dunkerque de Christopher Nolan, retour vers quelques films majeurs sur le Débarquement.

Il a fait de Dunkerque son projet le plus personnel depuis Inception en 2010. Christopher Nolan est un passionné d’histoire. Et comme nombre de Britanniques, celle de la Seconde Guerre mondiale l’intéresse particulièrement. L’épisode qu’il a choisi d’évoquer dans son nouveau film (sortie le 19 juillet, lire la critique sur focusvif.be le même jour) est celui de l’opération Dynamo, destinée à évacuer les soldats britanniques encerclés en mai 1940 – avec des Français et des Belges – par les troupes allemandes dans la poche de Dunkerque, sur la côte du nord de la France. Cette superproduction battant pavillon Warner Bros réunit entre autres Tom Hardy, Kenneth Branagh, Mark Rylance et Cillian Murphy. Ce pourrait être l’événement cinématographique de l’été. Une belle occasion pour revenir sur quelques grands films ou séries ayant pris pour sujet non point l’embarquement salvateur de l’opération Dynamo au tout début de la guerre, mais bien l’opération Overlord : le débarquement du Jour J qui en marqua, le 6 juin 1944, le commencement de la fin…

Le Jour le plus long (1962)

Le D-Day est l’unique sujet de cette superproduction hollywoodienne adaptée du livre best-seller de Cornelius Ryan. La Fox n’a négligé aucune ressource pour faire un événement d’un film tenant son titre d’une expression attribuée au… maréchal allemand Rommel (surnommé  » le Renard du désert « ). Quatre réalisateurs se partagent la mise en scène de segments différents : les Américains Andrew Marton et Darryl F. Zanuck (également producteur), le Britannique Ken Annakin et le Suisse d’expression allemande Bernhard Wicki. D’illustres écrivains ont contribué au scénario, dont Romain Gary, Noel Coward et Erich Maria Remarque. Et la distribution est constellée de stars : John Wayne, Henry Fonda, Richard Burton, Robert Mitchum, Sean Connery, Robert Ryan, et – côté allemand – Curd Jürgens et Gert Fröbe. Sans compter le chanteur Paul Anka ! The Longest Day dure près de trois heures et propose un spectacle haletant, efficacement choral et appuyé sur le plan historique par des conseillers militaires ayant vécu les événements. Les spécialistes n’ont pas manqué d’y relever quelques erreurs factuelles, mais le film constitue, aujourd’hui encore, une référence que son immense succès contribue à rendre incontournable.

Au-delà de la gloire (1980)

On ne peut plus différenteest l’approche de Samuel Fuller pour son remarquableThe Big Red One, ainsi titré en hommage à la 1re division d’infanterie américaine, dont c’est le surnom. L’ex-reporter devenu cinéaste utilise certains souvenirs personnels (il a servi dans cette division et a participé aux débarquements de Sicile et de Normandie) pour un récit centré sur une escouade de fusiliers qu’emmène un sergent (Lee Marvin) vétéran de la Première Guerre mondiale. Son budget limité ne nuit pas trop à un film tenant de la fresque intime où un petit groupe d’hommes traverse les horreurs du conflit avec un regard volontiers ironique mais aussi, chevillée au coeur, une volonté de rester malgré tout humain. En dépit de quelques maladresses – dans les scènes  » belges  » surtout -, Au-delà de la gloire reste une oeuvre fascinante et très émouvante. Un film de guerre antiguerre, au fond, soulignant l’absurdité des choses sans pour autant virer à l’angélisme pacifiste. On notera que Fuller refusa que John Wayne joue le personnage du sergent, car  » il n’était pas bon pour ce rôle « . Et aussi, tristement, que les producteurs firent opérer de nombreuses et fâcheuses coupures pour la sortie du film. Une version reconstruite, plus longue d’une cinquantaine de minutes, est heureusement venue rendre justice, en 2005, au film le plus ambitieux et le plus personnel de son scénariste-réalisateur.

Il faut sauver le soldat Ryan (1998)

Rien ni personne ne nous avait préparés à la longue séquence d’ouverture, proprement terrifiante et révolutionnant la manière de filmer la guerre. Steven Spielberg nous plonge littéralement, à hauteur d’homme, dans l’enfer d’un Débarquement où tant de soldats périrent sous la mitraille allemande avant même d’avoir atteint la plage. Ces 27 minutes à Omaha Beach (en partie reconstituée en Irlande) sont le résultat de recherches d’une précision hallucinante, comprenant des tests sur la pénétration des balles dans l’eau et dans la chair des combattants. Aux effets spéciaux s’ajoute l’emploi de figurants réellement amputés, pour un résultat sans précédent, établissant un nouveau standard d’hyperréalisme dans le film de guerre. A ce monstrueux prologue succède dans Saving Private Ryan un récit à résonance morale où un capitaine (Tom Hanks) emmène un petit groupe de soldats à la recherched’un simple troupier (Matt Damon) dont les trois frères ont étés tués au combat. Une mission où la priorité n’est plus militaire mais humaine et symbolique…

Frères d’armes (2001)

Dans la foulée du succès d’Il faut sauver le soldat Ryan, Spielberg entreprend cette minisérie remarquable, adaptée d’un livre de l’historien Stephen Ambrose et produite pour HBO, la chaîne référence qui nous tiendra plus tard en haleine avec Game of Thrones, True Detective et Westworld. Frères d’armes (Band of Brothers en v.o.) s’attache avec réalisme, 10 épisodes d’une heure durant, aux soldats du 506e régiment d’infanterie parachutée – surnommé non sans ironie Easy Company – ainsi que de la 101e Division Aéroportée (les Screaming Eagles, ou Aigles hurleurs). Et ce depuis la phase d’entraînement jusqu’à la fin de la guerre. Le Débarquement y figure en bonne place, la compagnie y connaissant un désastre avec le ratage des zones de sauts et l’éparpillement des parachutistes dans tout le Cotentin, tandis que l’officier commandant meurt dans l’explosion de son avion…

A l’assaut de Juno (2010)

Il faut encore citer ce docudrame de Tim Wolochatiuk évoquant l’assaut des troupes canadiennes sur la plage de Juno. Mélange de recréation des faits avec des comédiens et d’interviews avec les protagonistes encore en vie, ce témoignage prenant compense une relative absence de moyens par une approche intimiste, où les émotions comptent au moins autant que l’action.

Et aussi…

D’autres films et téléfilms ont encore abordé le Débarquement. Mais on s’en voudrait surtout de ne pas mentionner… un jeu vidéo : Call of Duty. Pas moins de 11 missions proposées aux gamers y concernent les combats en Normandie !

PAR LOUIS DANVERS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire