© JULIETTE LÉVEILLÉ

Haute école ou université : la guerre des clichés

Bien connaître pour mieux choisir ! En se lançant dans l’enseignement supérieur, l’étudiant met les pieds dans un tout nouvel univers. D’où les préjugés ne sont certainement pas absents…

C’est souvent présenté comme un choix décisif : ira-t-il à l’unif ou en haute école ? En réalité, ce n’est qu’un choix parmi d’autres. Et encore : dans certains cas, il n’y a pas le choix. Si votre fille veut faire médecine, elle devra faire l’unif. Et si votre fils se rêve instit, il ira en haute école. Mais la réalité est parfois plus complexe. Ainsi, certaines hautes écoles proposent des formations… de type universitaire !

 » Au lieu de distinguer hautes écoles et universités, il vaut mieux parler d’études de type court et d’études de type long, précise Philippe Fonck, directeur du Centre d’information et d’orientation. Ces deux filières présentent de vraies différences, particulièrement du point de vue des compétences mobilisées, des objectifs de formation et du profil des enseignants. Passage en revue des quelques clichés qu’il convient (parfois) de démonter.

« Il vaut mieux parler d’études de type court et d’études de type long »

Les études sont plus courtes en hautes écoles : pas toujours vrai. Quoi qu’il fasse, l’étudiant commencera ses études par un bachelier. Certains bacs sont professionnalisants : ils doivent permettre à l’étudiant de trouver du boulot après trois ans d’études. Ces bacs sont proposés en haute école et dans l’enseignement supérieur artistique. Les autres bacheliers sont dits  » de transition « . Ils ont pour but de préparer l’étudiant au master, d’une durée habituelle de deux ans. Les universités ne sont pas les seules à proposer des masters. En revanche, il n’y a qu’à l’université que l’étudiant aura accès, au terme de son master, aux études de troisième cycle : la formation doctorale.

Les hautes écoles, c’est plus pratique : vrai. Dès la première année, l’apprenti instituteur est immergé dans des classes de primaire, tandis que l’étudiante en soins infirmiers fait ses premiers pansements. Pendant ce temps, en silence, le jeune universitaire prend des notes dans un vaste auditoire. C’est un fait : en haute école, l’enseignement est orienté vers l’action. Les pratiques professionnelles sont au coeur de l’apprentissage. Le plus souvent, d’ailleurs, les profs eux-mêmes sont des praticiens, ancrés sur un terrain. A la fac, l’étudiant apprend à comprendre, à analyser, à critiquer et à innover. Ses études sont davantage marquées du sceau du savoir. Ce qui ne veut pas dire qu’il va nécessairement se perdre dans une tour d’ivoire. La plupart des universitaires effectuent également des stages – mais ceux-ci sont généralement proposés dans la seconde partie de leurs études.

Haute école ou université : la guerre des clichés
© JULIETTE LÉVEILLÉ

Les hautes écoles, c’est plus facile : faux. Certains élèves optent pour la haute école, croyant obtenir plus facilement leur diplôme. Grossière erreur ! Une analyse des taux de réussite respectifs indique qu’il n’existe aucune différence significative entre les deux filières. Dans l’une comme dans l’autre, il faut bosser pour réussir ! Une différence toutefois : les rythmes scolaires ne sont pas tout à fait les mêmes. En haute école, l’étudiant est davantage contraint de travailler tout au long de l’année. Devant assister à de nombreux cours (obligatoires), il doit aussi rendre des travaux et effectuer des stages. A l’unif, l’étudiant est moins contrôlé. Et même si le travail régulier est (hautement) préférable, c’est en période de blocus que le gros du boulot est généralement à fournir.

L’unif, c’est mieux : faux. Le préjugé a la vie dure. Il habite certains jeunes. Souvent, il influence aussi leurs parents qui, à leur tour, influencent leurs enfants.  » Mon fils ira à l’unif « , proclame, trop heureux, ce fier papa – sans pour autant lui avoir vraiment demandé son avis. Si, en Belgique, les universités jouissent d’un prestige particulier, il faut savoir que dans d’autres pays, ce sont les hautes écoles qui ont davantage la cote. Par ailleurs, comparativement, il n’est guère prouvé que le diplôme universitaire ouvre davantage les portes de l’emploi – dans certaines filières, c’est même l’inverse. La morale ? Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises études. En revanche, certaines formations conviennent parfaitement à certains étudiants. Et d’autres franchement pas.

Le rôle des parents

Ils sont en première ligne. Et souvent influents. Ainsi, 74 % des jeunes qui demandent conseil sur le choix de leurs futures études se tournent (notamment) vers leurs parents. Et pourtant, ceux-ci sont souvent mal pris. Tentés de projeter sur leur fils leurs propres ambitions. Induits à diriger leur fille vers une filière qui lui garantira un emploi sûr. Ou incapables de laisser à leur rejeton sa nécessaire autonomie.

« La période de construction et de choix que vit l’enfant renvoie le parent à son histoire, à la façon dont il a effectué ses choix, décodent les experts du Centre d’information et d’orientation, qui se sont penchés sur la question. Le parent est donc invité à faire le point sur sa propre histoire afin de ne pas projeter ses désirs et ses inquiétudes sur son enfant. Cela rendra celui-ci plus libre de réaliser ses choix », dit-on au Centre d’information et d’orientation de l’UCL.

Pour les parents, une autre difficulté consiste à ne pas demeurer enfermé dans les réalités économiques d’hier. Un exemple : en 2017, le diplôme n’est plus le sésame absolu vers l’emploi. Mais est devenu un atout parmi d’autres. « Dans ce contexte, le parent doit aider le jeune à prendre conscience de ses ressources, voire à les diversifier », suggère encore le CIO.

« Etre parent d’un jeune qui s’oriente », Les Cahiers du CIO, n° 5. A commander en ligne via www.cio.be

Les universitaires sont mieux payés : pas toujours vrai. Un rapide tour d’horizon permet de constater que la plupart des universitaires sont davantage payés que les gradués. Et de fait : les diplômés de l’enseignement de type long bénéficient de barèmes plus avantageux. C’est notamment manifeste dans l’enseignement : un prof du secondaire supérieur gagne plus qu’un instituteur. En même temps, le diplôme ne fait pas tout ! Le salaire dépend moins du diplôme que de la fonction exercée et du secteur d’activité. Sans oublier que l’argent seul ne suffit pas à rendre un professionnel heureux.

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