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J’étais à la conférence d’Éric Zemmour à Paris, et tout est vrai

Officiellement invitées par Le Figaro pour écouter Eric Zemmour à l’occasion de la sortie de son dernier livre, Un quinquennat pour rien, c’est pourtant avec son précédent ouvrage sous le bras, Le Suicide français, que plus de 900 personnes se pressent sous les portiques de sécurité ultrarenforcée de la salle Gaveau, à Paris.

Sold out depuis deux mois, la conférence promet d’être un succès. Question public, à première vue, on a un peu l’impression de prendre le thé entre cheveux gris à Neuilly. Mais la réalité est plus contrastée. Si une partie du public semble bien sortie d’un meeting de Christine Boutin, l’autre relève du gratin parisien, comme en témoignent quelques vieux beaux comparant leurs implants capillaires devant leur compagne de 35 ans. Entre les deux, des petites madames au sac à main usé et des messieurs un peu voûtés dans leur imper élimé qui, eux aussi, déboursent sans rechigner les 25 euros de droit d’entrée.

La salle est pleine à craquer quand une petite porte s’ouvre, enfin, sur deux bodyguards appelés à sécuriser la scène et installer l’histrion sous les acclamations d’un public fiévreux. Salve d’applaudissements. Zemmour se tortille de contentement sur sa chaise, se mordille les doigts de satisfaction, se frotte le nez et baisse faussement les yeux devant l’éloge qui lui est rendu dans son introduction.  » Eric, le catcheur des plateaux télé  » ;  » Eric, notre Johnny de la dédicace  » ;  » Un écrivain qui ne se voyait qu’en Balzac ou Chateaubriand « , etc. Hum. Zemmour, qui snobe toujours son public en ne lui offrant même pas l’ombre d’un regard, démarre sur son parcours de gamin d’immigré (juif algérien) et son enfance passée dans une cité de Drancy où, pour sûr,  » il ne pourrait plus jamais mettre les pieds « . Salve d’applaudissements. L’essayiste évacue ensuite rapidement le contenu de son dernier livre – dont on retient surtout sa grande nostalgie pour Napoléon – pour retomber sur l’émission de Laurent Ruquier, sur France 2, qu’il utilisait comme  » machine de propagande politique « , assumant fièrement son rôle de  » curé du pauvre « . Le conférencier n’oublie pas d’échauffer une audience déjà grisée par un  » l’aristocratie a changé mais le mépris de classe, lui, est toujours là « . Tonnerre d’acclamations du parterre et des trois balcons.

Arrive le chapitre sur l’islam et la France. Tout un programme, si l’on pense à la préface d’un de ses livres où le polémiste précise que l’ennemi n’est pas l’islam politique, ni l’islamisme, mais tout simplement l’islam. Trente minutes où un public très attentif apprend que l’islam ne sera jamais compatible avec la république car il entend avant tout reconquérir ce territoire qui fut jadis le sien. Echange rapide de questions-réponses où un Zemmour, à deux doigts de la lévitation, rassure ses fans :  » Je n’ai pas peur de continuer mon combat, car je sais que vous êtes là.  » Avant d’acquiescer à cette remarque d’un spectateur :  » L’assimilation n’est plus possible, il est temps de nous replier sur notre communauté.  »

C’est l’heure des dédicaces. Une longue file serpente dans les allées du célèbre théâtre, les ouvrages s’achètent en masse. La France qui a peur s’équipe. Puis s’éclipse.

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