The Mint ouvrira en octobre prochain. Un trait d'union entre la rue Neuve et l'Ilot sacré. © AG REAL ESTATE/ARCH : DDS&PARTNERS

Le  » commercial  » se surpasse

Les attentats et les problèmes de mobilité ont fragilisé la santé du commerce à Bruxelles en 2016. Pourtant, sur le plan purement immobilier, les enseignes ont signé un nombre de baux record.

L’année 2016 n’a pas été de tout repos pour les professionnels de l’immobilier commercial en Belgique. Les grandes enseignes ont été prises de… bougeotte et nombre de cellules ont changé de locataire à travers le pays, tant en rues commerçantes qu’en shopping centerset en retail parks. Ainsi, au total, pas moins de 368 400 mètres carrés de surface commerciale ont été pris en occupation selon les calculs du courtier en immobilier professionnel CBRE, qui a publié une étude sur la question en janvier dernier. Un record.  » Nous avons dénombré 891 transactions signées au cours de l’année écoulée « , renseigne Sébastien Vander Steene, senior director chez CBRE, en charge du retail pour la Belgique.  » C’est aussi une année record pour nous en matière de charge de travail « , ajoute-t-il.

On ne peut pas en dire autant des… retailers eux-mêmes. A l’échelle du pays, et à Bruxelles plus encore qu’ailleurs.  » Entre le lock-down qui a suivi les attentats de Paris en novembre 2015 et le climat de peur installé par ceux de Bruxelles en mars 2016, les commerçants de la capitale ont vécu des moments très difficiles « , souligne l’expert. D’autant que le sort s’est acharné sur eux.  » On pense d’abord au piétonnier, commence-t-il. Certes, les retombées seront positives à long terme, mais, dans l’immédiat, le projet a péché et pèche toujours par le manque de communication qui l’accompagne.  » Sans oublier le bilan désastreux en matière de mobilité, aggravé par un blocage prolongé des tunnels Stéphanie/Louise et Montgomery. Et Sébastien Vander Steene de compléter cette liste noire par les grèves à répétition qui ont bloqué l’aéroport de Bruxelles-National.

Le malheur des uns…

Tant et si bien que plusieurs enseignes se sont lancées dans des opérations d’arbitrage, en fermant quelques boutiques. Voire en mettant carrément la clé sous la porte, comme Marks & Spencer ou Eram, qui cessent leurs activités en Belgique.  » De quoi ouvrir le marché à d’autres, qui attendaient de pouvoir étendre leur réseau de magasins ou, tout simplement, investir le marché belge pour la première fois « , relève Sébastien Vander Steene. Car la place est comptée dans les top locations (rues commerçantes et shopping centersà forte fréquentation) et le turnover (rotation des locataires), plutôt lent, pour ne pas dire souvent inexistant.  » Il y a bien eu quelques projets neufs ou extensions de complexes existants en phase de commercialisation – Docks Bruxsel dans la capitale, Rive gauche à Charleroi, Les Bastions à Tournai, Les Grands Prés à Mons -, mais en nombre limité « , précise-t-il.

Au rang des enseignes les plus actives en 2016, Sébastien Vander Steene cite Primark, le géant irlandais du prêt-à-porter à petits prix. Si cela fait des années que sa venue est annoncée ici et là – souvent à tort, d’ailleurs – ce dernier s’est enfin décidé à louer 5 000 mètres carrés chaussée d’Ixelles, à Bruxelles, 8 000 mètres carrés sur le Meir anversois, 4 550 mètres carrés Grand-Rue, à Mons, et 5 800 mètres carrés dans le futur Rive gauche carolorégien (lequel ouvrira ses portes le 9 mars prochain). Autres acteurs de taille, Zara (8 600 mètres carrés pour trois prises en occupation) et H&M (6 magasins ouverts et l’extension d’un existant). Soit 41 200 mètres carrés signés par ces seuls trois grands.

Bruxelles, la plus bankable

De là à augurer une reprise pour 2017, il n’y a qu’un pas, joyeusement franchi par Sébastien Vander Steene – qui ne fait par ailleurs aucun secret de sa nature optimiste.  » Malgré les récentes difficultés, lorsqu’on se penche sur le bilan annuel des enseignes, il s’avère que la situation est moins dramatique qu’anticipée.  » Bien sûr, certaines accusent un recul de 5 à 10 % de leur chiffre d’affaires. Mais d’autres s’en sortent… en gagnant même quelques pourcents.  » On est loin d’une croissance à deux chiffres, mais on ne constate pas non plus de chutes de -15, -20 ou -30 % « , souffle-t-il.

Contre tout attente, l’étude réalisée par CBRE fait même de Bruxelles la championne belge des villes faisant recette, éclipsant son éternelle rivale, Anvers.  » A la surprise générale, les 118 retailers nationaux et internationaux que nous avons sondés ont, pour la plupart, réalisé leurs meilleures performances à Bruxelles, assure le senior director. 23 % des répondants en attestent, contre 20 % pour Anvers.  » La raison ?  » Bruxelles peut s’appuyer sur ses centres commerciaux, qui engrangent de bons résultats.  » Même si ceux-ci pourraient être rénovés, étendus et… globalement repensés pour entrer dans l’ère du shopping 2.0, admet Sébastien Vander Steene.

Uniqlo et Kiabi au Mint ?

Après Docks Bruxsel, qui a ouvert en octobre dernier au nord de Bruxelles, près du pont Van Praet, un effectif de plus viendra s’ajouter à cette force de frappe bruxelloise en octobre 2017 : The Mint. Porté au centre-ville par AG Real Estate, bras immobilier du groupe AG Insurance, le projet occupera le socle du Centre Monnaie sur deux étages entièrement vitrés et quelque 15 000 mètres carrés. Pour l’instant, aucun nom d’enseigne locataire ne circule. Tout au plus Sébastien Vander Steene évoque l’intérêt potentiel d’un Kiabi,  » le Primark français « , d’un Uniqlo, son équivalent nippon, ou encore d’un Hema. Quoi qu’il en soit, l’expert ne cache pas son enthousiasme à l’idée de l’ouverture prochaine du shopping.  » Ce sera le trait d’union manquant que tous attendent pour relier la rue Neuve, surtout arpentée par des Bruxellois, à l’Ilot sacré entourant la Grand-Place (rues du Marché-aux-Herbes, des Fripiers, et avoisinantes), que fréquentent aussi les touristes « , se réjouit-il.

Quid de la santé de Docks, quatre mois après son inauguration en grande pompe ?  » Deux tendances prévalent, décrit l’expert. D’un côté, les enseignes mass market ont beaucoup de succès ; de l’autre, le haut de gamme peine un peu. Je pense qu’à terme, le mix commercial sera repositionné sur le seul mass market.  » Au bénéfice du propriétaire du shopping puisque  » les loyers payés par les enseignes mass market sont traditionnellement plus élevés, car calculés en partie sur leur chiffre d’affaires « , conclut-il.

PAR FRÉDÉRIQUE MASQUELIER

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