Un déchet organique pour une batterie verte ? © istock

L’urine, un déchet organique pour une batterie verte?

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Son nom ressemble à une blague potache : la « pee-pile ». Et pourtant, il n’y a rien de rigolo ou de futile dans cette batterie monobloc qui transforme de l’urine en courant continu, grâce à des bactéries.

Produire de l’électricité avec de l’urine constitue évidemment un enjeu humanitaire de taille, quand on sait qu’un milliard de Terriens sont, aujourd’hui encore, privés d’énergie, principalement en Afrique. Or, sans lumière, c’est toute l’activité humaine, y compris le développement technologique et économique, qui est ralentie. Au Burundi ou au Burkina Faso, par exemple, 85 à 95 % de la population n’ont pas accès à l’électricité.

Si l’on sait comment transformer de l’urine en électricité, ce déchet organique constitue donc une matière première infinie dont on peut disposer partout : chaque jour, chaque être humain produit, en moyenne, 1,5 litre d’urine. Forts de ce constat, de jeunes chercheurs de l’école d’ingénieurs Sup Biotech, en France, ont planché pendant trois ans sur leur projet de biopile, tantôt nommé  » pee-pile « , tantôt  » Everlux « . Quel que soit le nom définitif de cette batterie verte, le prototype existe bel et bien aujourd’hui et ses inventeurs sont activement à la recherche d’investisseurs, afin d’optimiser et de commercialiser leur invention.

Le principe est aussi simple qu’ingénieux : il consiste à introduire certaines bactéries dans de l’urine, afin de produire un courant continu, au lieu d’utiliser de l’hydroxyde de potassium, présent notamment dans les piles alcalines, une substance polluante et corrosive dont la préparation dégage des vapeurs toxiques. Ces bactéries vont naturellement dégrader un composant de l’urine en produisant des électrons, donc du courant électrique. Entre deux réservoirs d’électrolytes, une pile peut ainsi créer une différence de potentiel. Et, cerise sur le gâteau : cette pile biologique, facile à alimenter et à transporter, ne rejette comme seul déchet que… de l’engrais : 1 000 litres d’urine fournissent suffisamment d’engrais pour faire pousser 135 kilos de maïs.

En 2015 déjà, des chercheurs britanniques de l’université de Bristol, en partenariat avec l’ONG Oxfam, qui lutte contre la précarité et la faim dans le monde, avaient mis au point un urinoir révolutionnaire capable de transformer l’urine en électricité, grâce à des bactéries. Son nom ? Le  » Pee-Power  » (la  » force du pipi « , en français). L’idée était de permettre à l’université d’être éclairée en permanence grâce à une source d’énergie verte, mais aussi d’équiper les camps de réfugiés (notamment) avec de tels urinoirs, afin d’éclairer et de sécuriser les sanitaires où les femmes sont souvent victimes d’agressions.

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