Une technologie pour améliorer la qualité et la sécurité des aliments tout en réduisant les coûts de production. © Jeremy Woodhouse/getty Images

Des fruits dopés à la pulsion électrique

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Si le docteur Frankenstein avait eu vent de la technologie des « champs électriques pulsés » (CEP), il nous aurait probablement concocté, en sus de sa créature, des salades de fruits plus que jolies-jolies, des vins rouges succulents aux robes sombres, et des huiles d’olive aux qualités gustatives et nutritionnelles étonnantes, le tout purgé de microbes, frais et de longue conservation.

Selon les scientifiques du projet de recherche européen FieldFood (qui vient de s’achever), soumettre des fruits et légumes à de très brefs courants électriques n’a que des avantages. Ainsi, à l’université de Saragosse, en Espagne, le professeur de technologie alimentaire Javier Raso, coordinateur du projet FieldFood, explique que, grâce au CEP, le consommateur va pouvoir disposer d’aliments meilleurs pour la santé, ayant un goût plus agréable et des qualités nutritionnelles dopées. Bref, des  » superaliments  » qui, en outre, resteront frais et consommables plus longtemps, sans être gavés de conservateurs.

Depuis longtemps utilisé en génie génétique (pour fusionner deux cellules ou pour faire pénétrer un brin d’ADN dans une cellule), le procédé des champs électriques pulsés, appliqué désormais au domaine alimentaire, consiste donc à soumettre des aliments à des champs électriques de très forte intensité (5 à 55 kV/cm), de manière répétée (pulsée), pendant des temps très courts (de l’ordre de la microseconde), en vue de détruire les micro-organismes qu’ils contiennent ou d’inactiver certaines enzymes : en fait, c’est une  » pasteurisation  » nouvelle génération.

Mais ce n’est pas tout : grâce au CEP, le goût des aliments serait accentué. Ainsi, pour ce qui est du vin, que l’on produit à l’université de Saragosse, on nous précise que, grâce au CEP, les cellules de la peau des raisins sont rendues poreuses, ce qui raccourcit le temps de macération :  » Un changement s’opère au niveau des polyphénols « , précise l’oenologue Marcos Maza.  » C’est pour ça qu’on peut sentir et voir que le vin produit par champ électrique pulsé a une robe plus sombre : il contient plus de polyphénols que le vin fabriqué de manière traditionnelle.  »

Grâce à cette technologie, aussi développée par FieldFood à Cahir, en Irlande, les pommes produisent, par exemple, 3 à 4 % de jus supplémentaire. Comme les cellules de leur peau sont poreuses, l’extraction du jus est plus facile ; un jus qui – en outre – reste frais et consommable quinze jours après ouverture, sans ajout de conservateurs.

Au niveau financier aussi, le CEP aurait de quoi séduire les petites et moyennes entreprises de l’agroalimentaire : selon Elisa Luengo, chercheuse en transformation alimentaire, les investissements initiaux pourraient en effet être très sérieusement compensés. De quoi électriser positivement les bilans.

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