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L’inculpation de la fille du roi d’Espagne fait trembler la monarchie

Le Vif

L’infante Cristina devra comparaître devant le juge pour répondre des accusations de fraude fiscale et de blanchiment d’argent. Ces déboires vont aggraver le désamour des espagnols pour la famille royale.

Un juge espagnol a inculpé mardi la fille du roi Juan Carlos, l’infante Cristina, pour fraude fiscale et blanchiment de capitaux, et l’a convoquée pour le 8 mars, a annoncé le tribunal de Palma de Majorque.

C’est le point de non retour. L’inculpation de l’infante Cristina pour fraude fiscale et blanchiment d’argent, marque la chute de la famille royale dans l’opinion publique espagnole. Cristina Borbon y Grecia, la plus jeune des filles du roi Juan Carlos, est appelée à comparaître devant le juge le 8 mars prochain.

L’annonce est tombée après des mois de bras de fer entre le juge d’instruction qui estimait avoir les preuves suffisantes, et le parquet qui tentait à toute force de freiner le processus. Elle jette le discrédit sur la monarchie dans un moment difficile, alors que le roi Juan Carlos, 76 ans, est très affaibli physiquement, après avoir subi opération sur opération depuis son malencontreux safari au Botswana en avril 2012.

Lors d’une cérémonie officielle, hier, il est apparu titubant sur ses béquilles, visiblement fatigué et peinant à bafouiller son discours.

Le désamour des Espagnols pour la famille royale

L’image pénible d’une monarchie à bout de souffle, usée physiquement, discréditée moralement, éclaboussée par les scandales de corruption, s’impose. Un sondage publié il y a quelques jours par le quotidien El Mundo dévoile comment la popularité du souverain s’effondre. A peine 38% des Espagnols font un bilan positif de son règne, contre 75% il y a deux ans, et 62% considèrent qu’il devrait abdiquer en faveur du prince héritier Felipe qui continue de bénéficier d’une bonne image.

Mais est-ce le moment pour le roi de laisser le trône, alors que le pays est en pleine crise? interroge le politologue Fernando Vallespin, professeur de sciences politiques de l’université autonome de Madrid, qui plaide pour une passation de pouvoir tranquille, accompagnée d’un vrai renouvellement institutionnel. Selon lui, l’inculpation de la fille du roi est le signe du bon fonctionnement de la démocratie: « cela prouve que la famille royale n’est pas au dessus de la loi et pourrait même aider la monarchie à renforcer son image, dit-il. La vision d’une infante protégée en dépit de tout aurait été bien plus désastreuse.  »

Pas réellement une surprise

Les porte-paroles de la famille royale avaient pourtant tenté à toute force d’installer un pare-feu pour séparer Cristina des démêlés judiciaires de son mari, Iñaki Urdangarin, mis en examen en 2011 dans une vaste affaire de corruption, évasion fiscale et détournement de plus de 6 millions d’euros de fonds publics.

Le parquet qui avait refusé une première fois l’inculpation de Cristina en avril 2013 a dû s’incliner. Difficile de lutter devant l’accumulation minutieuse de documents et de faits, établie par le juge José Castro dans son épais acte d’inculpation de 227 pages. C’est à peine une surprise. Depuis des mois, les journaux filtrent un goutte à goutte de factures, de courriers électroniques et de détails triviaux qui laissent entrevoir un mode de vie tranquillement financé par de l’argent détourné issu de la corruption: de l’achat de CD, de fleurs, les restaurants avec les amies, les voyages en famille et les anniversaires des enfants… jusqu’aux salaires du personnel de maison ou aux travaux somptueux dans la vaste villa acquise dans le meilleur quartier de Barcelone. Elle est attendue le 8 mars prochain par le juge pour s’en expliquer.

De notre correspondante Cécile Thibaud

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