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« Notre cerveau fonctionne encore comme à l’Age de pierre »

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Notre cerveau n’aurait pas beaucoup évolué depuis la Préhistoire. Et cela ne devrait pas s’améliorer avec les avancées technologiques, prédit le psychologue de l’évolution, Mark van Vugt de la Vrije Universiteit d’Amsterdam.

C’est un véritable anachronisme que soulèvent le psychologue Mark Van Vugt et l’auteur Ronald Giphart dans leur ouvrage Mismatch : notre cerveau n’évolue pas à la même vitesse que notre époque. Pour eux, la manière de fonctionner de notre cerveau n’est pas en phase avec les évolutions de notre société. Alors que la société évolue à la vitesse de la lumière, notre cerveau est resté à l’âge préhistorique expliquent les deux psychologues.

Une situation assez paradoxale : « Alors que nous sommes capables de faire évoluer notre environnement très rapidement, notre cerveau et notre corps sont désespérément à la traîne » déclare Van Vugt dans le journal De Morgen. « Si notre cerveau était en phase avec la société actuelle, il devrait être très différent. Nous devrions être beaucoup plus effrayés par les voitures que par les araignées et les serpents, par exemple. Mais vu que notre cerveau est encore bloqué à l’Age de pierre, nous les voyons toujours comme de grands dangers. »

Ce décalage entre le monde extérieur et notre cerveau se manifeste d’autres manières. Pensons à la manière dont nous choisissons nos dirigeants de par le monde. «  George Bush avait en effet les caractéristiques physiques de ce que nous attendons d’un leader qui doit nous défendre, mais notre cerveau ne réalise pas encore que ce leader n’encoure plus de risques physiques en situation d’urgence « , explique Van Vugt. « Prenons encore l’exemple des enfants qui ont peur de dormir seuls quand ils sont en bas âge. Pourquoi ? Parce que notre cerveau est toujours programmé pour dormir en famille, comme à l’âge de pierre. Quand nous mangeons trop, notre cerveau réagit aussi comme en temps de disette et fait des réserves au cas où il n’y aurait plus de nourriture disponible. »

100 000 ans

Il est pourtant étrange que notre cerveau n’ai pas évolué depuis ces temps très anciens vu que c’est quand même l’homme qui a créé la révolution industrielle et toutes les nouvelles technologies qui en découlent. Et pourtant, les hypothèses de l’ouvrage Mismatch sont confirmées par Mark Nelissen, professeur émérite en biologie comportementale à la UAntwerpen.

« Le problème est survenu il y a de cela 30 000 ans lorsque l’homme est devenu intelligent. Il a développé sa créativité, s’est lancé dans l’art et a commencé à cultiver les terres il y a 10 000 ans. Depuis, notre société n’a jamais plus cessé d’évoluer. Seul notre « hardware », notre pool de gênes, n’a pas accompagné ces changements depuis ces temps », commente Nelissen. Résultat : un fossé s’est créé et ne peut plus être comblé. « Il faut 100 000 ans pour que l’évolution se manifeste dans nos gênes et c’est encore une estimation optimiste« .

Inutile cependant de céder à la panique face à ce retard difficile, voire impossible, à rattraper, car l’être humain est habitué à s’adapter aux situations qu’il rencontre. Le seul fait d »être conscient de notre « vieux cerveau » est déjà une étape importante », déclare Van Vugt qui rajoute que «  notre créativité peut nous mener très loin « .

L’ouvrage Mismatch explique aussi les raisons pour lesquelles de nombreuses personnes souffrent de maux de dos, de maladies cardiaques, de diabète et d’obésité, ainsi que de dépressions et de burn-out. Leurs découvertes montrent aussi comment cette discrépantie entre notre cerveau et la réalité influence la façon dont nous élevons nos enfants, la politique, le travail.

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