John H. Glenn Jr., pilote de l'engin spatial Mercury Atlas 6 (MA-6) pose à côté du Mercury "Friendship 7" © REUTERS

Le quotidien effrayant des premiers astronautes en danger de mort permanent

Le Vif

John Glenn a accédé au statut de héros en devenant le premier Américain mis en orbite autour de la Terre, mais durant plus d’une heure, la Nasa a craint qu’il ne meure dans une boule de feu lors du retour de sa capsule dans l’atmosphère.

John Glenn a accédé au statut de héros en devenant le premier Américain mis en orbite autour de la Terre, mais durant plus d’une heure, la Nasa a craint qu’il ne meure dans une boule de feu lors du retour de sa capsule dans l’atmosphère.

En fait, les sept premiers astronautes américains du programme Mercury ont risqué leur vie pour explorer les frontières de l’espace à l’aube des années 1960, une épopée dramatique pour certains d’entre eux.

Le décès jeudi à 95 ans de John Glenn, qui était le dernier survivant de ce groupe de pionniers recrutés en 1959, a permis de rappeler le chemin parcouru par les programmes spatiaux ces dernières décennies.

« Avant que des hommes ne soient effectivement envoyés dans l’espace, les médecins n’étaient même pas sûrs qu’il était possible d’y survivre », rappelle John Logsdon, expert en politiques spatiales. « C’était un tout nouveau territoire ».

Le premier survivant du programme spatial américain fut un chimpanzé nommé Ham, envoyé à bord d’une nouvelle fusée Mercury 7 en 1961. Le fait que les Russes soient parvenus à envoyer Youri Gagarine dans l’espace et qu’il revienne sur Terre indemne a aussi levé quelques inquiétudes chez les candidats astronautes américains. Mais pas toutes…

‘Sceptiques et très inquiets’

En effet, les fusées mises au point par la Nasa tour à tour explosaient, s’effondraient en une gerbe de flammes ou retombaient après leur décollage avec une inquiétante constance.

« Beaucoup d’entre nous étaient sceptiques et très inquiets que la Nasa envoie le pilote d’essai Alan Shepard dans ce qui allait devenir le premier vol spatial » américain, a raconté l’ancien journaliste Walter Cronkite dans un livre paru en 1997, « A Reporter’s Life » (« Une vie de reporter »).

Alan Shepard a finalement survécu à son vol dans l’espace, mais tous ses collègues n’ont pas été aussi chanceux.

Ainsi, en 1967, une étincelle enflamme la capsule Apollo 1 lors d’un test au sol: ses trois membres d’équipage sont prisonniers et meurent brûlés dans l’engin. L’un d’eux, Gus Grissom, un des sept astronautes originaux, avait été le premier homme envoyé deux fois dans l’espace.

Les premiers astronautes étaient tous des pilotes d’essai militaires dont la force mentale a été décrite dans le livre de Tom Wolfe (1970) et le film (1983) éponyme « L’étoffe des Héros ».

« Les pilotes d’essai, par définition, poussent les limites de leurs machines », reprend M. Logsdon. « Ils étaient habitués à risquer leur vie avant même de participer au programme spatial ».

Voir aussi notre diaporama: Disparition de John Glenn, premier astronaute à avoir effectué un vol orbital

Héros téméraires

Mais un autre critère était indispensable: ils devaient être… petits. Impossible de rentrer dans les minuscules capsules spatiales pour les plus de 1,80 m. La capsule Mercury qui a emmené John Glenn en orbite faisait par exemple seulement 2 mètres de long, et environ autant de large.

« Quand vous voyez une capsule Mercury aujourd’hui c’est incroyable que quelqu’un ait accepté d’entrer là-dedans, pour s’asseoir sur un moteur qui dégage une énergie équivalente à une petite arme nucléaire, tout ça pour être envoyé dans un environnement extraterrestre », souligne encore M. Logsdon.

John Glenn était souvent interrogé sur les sentiments qu’il avait éprouvés avant de s’envoler: « Je me sentais exactement comme vous, si vous étiez prêt à décoller en sachant que vous êtes assis sur deux millions de pièces… toutes construites par des entreprises ayant remporté l’appel d’offre du gouvernement pour produire au plus bas prix ».

Le décollage de John Glenn s’était bien passé, mais alors qu’il effectuait trois rotations autour de la Terre, un signal de télémétrie s’était allumé, suggérant une anomalie.

L’anomalie faisait craindre que le bouclier thermique de la capsule Mercury, qui doit l’empêcher de se consumer lors de la réentrée dans l’atmosphère, ne fonctionne pas correctement.

Charles Murray, coauteur du livre « Apollo: The Race to the Moon », a raconté en 1989 que les ingénieurs au sol « ont été convaincus pendant plus d’une heure qu’ils allaient perdre ce gars ».

Mais heureusement, le signal s’était allumé par erreur et John Glenn a pu amerrir sans encombres.

Vendredi, Barack Obama a ordonné que tous les drapeaux soient mis en berne sur les bâtiments publics et militaires jusqu’au jour des obsèques de John Glenn, en signe de respect pour le dernier de ces héros téméraires.

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