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Une bactérie buccale suspectée de causer Alzeihmer

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Une bactérie présente dans la bouche qui cause des gingivites pourrait jouer un rôle dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer. C’est du moins la conclusion de chercheurs publiée dans la revue Science Advances et basée sur une série d’expériences réalisées sur des humains et des souris. Ils présentent également un médicament pour combattre cette bactérie, relaie De Morgen.

La maladie d’Alzheimer est une forme de démence qui touche plus de 200 000 personnes en Belgique. Les patients rencontrent progressivement de plus en plus de problèmes de mémoire, mais aussi de langage. Des gestes du quotidien comme la préparation du café peuvent devenir une réelle épreuve. En moyenne, les patients atteints de la maladie d’Alzheimer meurent dans les huit années qui suivent le diagnostic.

Des scientifiques, dirigés par l’équipe de Jan Potempa, de l’Université de Cracovie, ont trouvé de l’ADN d’une bactérie buccale, de son petit nom scientifique P. gingivali, dans le cerveau de patients Alzheimer. Cette bactérie est l’une des principales causes de la parodontite, une inflammation grave des gencives qui peut entraîner la perte des dents, entre autres. La parodontite est relativement fréquente chez les personnes âgées.

Les chercheurs ont également trouvé plus de gingipaïne dans le cerveau des patients atteints d’Alzheimer décédés que chez les personnes non atteintes de la maladie. La gingipaïne est une enzyme qui produit la bactérie gingivale et provoque une inflammation. Les chercheurs pensent donc que ces infections peuvent mener à la maladie d’Alzheimer.

Lors d’une expérience chez la souris, ils ont remarqué que la gingipaïne provoquait une augmentation de la protéine bêta-amyloïde dans le cerveau.

Chez les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer, ce bêta-amyloïde s’accumule dans les plaques entre les cellules du cerveau. Par conséquent, ces cellules ne peuvent plus bien communiquer entre elles, ce qui entraîne la démence. Jusqu’à présent, on ne sait pas exactement quand et pourquoi de telles accumulations d’amyloïdes se produisent. Il semble maintenant que la bactérie P. gingivalis pourrait en être, en partie, responsable.

Santé bucco-dentaire

« C’est une étude étonnante« , déclare Wim Crielaard, professeur de biologie moléculaire au Centre universitaire de dentisterie d’Amsterdam (ACTA) qui n’a pas pris part à cette recherche. « L’idée que la santé buccodentaire et la maladie d’Alzheimer peuvent être liées existe depuis cinq ans », dit-il. « Ces résultats corroborent bien cette hypothèse ». Cependant, le professeur souligne que de nombreuses autres bactéries jouent un rôle dans la parodontite, et peut-être aussi dans la maladie d’Alzheimer.

Wiep Scheper, professeure de neurodégénérescence moléculaire à l’université, reste prudente quant à des conclusions hâtives. « Je ne suis pas encore convaincue que cette bactérie soit responsable de la maladie d’Alzheimer « , déclare la spécialiste de l’UMC d’Amsterdam. « D’autres recherches sont vraiment nécessaires. De par les expériences sur les corps des patients, par exemple, il en résulte surtout des preuves indirectes. »

« Convaincant »

Wiep Scheper souligne également que les chercheurs, dans leurs expériences réalisées sur la souris, ont constaté des accumulations amyloïdes, mais aucune formation de plaque. « C’est nécessaire pour que l’étude soit concluante « . Pour ce faire, ils auraient dû tester un autre type de souris, selon Scheper, à savoir une souris possédant un gène amyloïde similaire à celui de l’homme. « Les souris amyloïdes sont différentes des humains et ne s’accumulent pas dans les plaques de toute façon. »

Elle se montre toutefois enthousiaste à l’idée d’un médicament qui pourrait inhiber la gingipaïne. Dans leur publication, les scientifiques ont démontré l’efficacité de cette méthode dans des expériences en laboratoire. « Convaincant« , dit Scheper. Mais contrairement aux chercheurs – qui ont annoncé qu’ils allaient étudier si les patients atteints de la maladie d’Alzheimer en bénéficieront cette année – Scheper pense que ce traitement pourrait lutter contre les maladies de gencive graves. « Pour l’instant, le lien avec cette maladie est beaucoup plus clair qu’avec la maladie d’Alzheimer. »

Le professeur Crielaard de l’ACTA trouve cette idée intéressante, bien que, selon lui, le besoin d’un médicament pour éliminer la bactérie Gingivalis ne soit pas une priorité. « En général, les gencives sont déjà très faciles à garder en bonne santé, surtout avec les soins d’un bon dentiste. »

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