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Résistance aux antibiotiques : l’urgence de développer les remèdes à 12 « superbactéries »

Le Vif

Face au défi de santé préoccupant que représente la résistance aux antibiotiques, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié lundi une liste de 12 familles de bactéries contre lesquelles elle juge « urgent » de développer de nouveaux traitements.

« Cette liste a été établie pour essayer d’orienter et de promouvoir la recherche-développement de nouveaux antibiotiques », en ciblant « les 12 familles de bactéries les plus menaçantes pour la santé humaine », explique l’agence santé des Nations unies, qui veut empêcher la résurgence de maladies infectieuses incurables.

Le risque est jugé « critique » pour trois familles de bactéries: les Acinetobacter, les Pseudomonas et les entérobactéries (dont l’E.coli), résistantes y compris aux antibiotiques les plus récents, dits de dernier recours, et à l’origine de la plupart des infections graves en milieu hospitalier.

« La résistance aux antibiotiques augmente et nous épuisons rapidement nos options thérapeutiques. Si on laisse faire le marché, les nouveaux antibiotiques dont nous avons le besoin le plus urgent ne seront pas mis au point à temps », a alerté Marie-Paule Kieny, sous-directrice générale à l’OMS pour les systèmes de santé et l’innovation.

L’OMS classe ensuite en « priorité élevée » six familles de bactéries responsables d’infections généralement contractées à l’extérieur de l’hôpital et résistantes à plusieurs types d’antibiotiques.

Il s’agit du staphylocoque doré, des salmonelles, de l’Helicobacter pylori (la bactérie responsable notamment des ulcères de l’estomac) ou encore de la Neisseria gonorrhoeae (qui cause la gonorrhée, une infection sexuellement transmissible très répandue).

Trois autres familles de bactéries sont elles placées en « priorité moyenne »: le pneumocoque, qui peut conduire à des pneumonies et des méningites, l’Haemophilus influenzae, responsable d’infections comme les otites, et les Shigella spp., cause d’infections intestinales telles que la dysenterie.

Déjà 700.000 décès par an

Les bactéries résistantes aux antibiotiques pourraient tuer jusqu’à 10 millions de personnes par an d’ici 2050, soit autant que le cancer, selon un groupe d’experts internationaux formé en 2014 au Royaume-Uni, et auteur de plusieurs rapports sur le sujet.

Selon ce groupe d’experts, présidé par l’économiste Jim O’Neill, le phénomène cause déjà 700.000 décès par an, dont 50.000 en Europe et aux Etats-Unis.

En France, on estime que la résistance antibiotique cause 12.500 décès par an, selon un rapport remis en 2015 au ministère de la Santé.

L’OMS tire régulièrement la sonnette d’alarme sur ce sujet. En septembre, elle avait appelé à mobiliser fonds publics et privés pour favoriser la recherche de nouvelles classes d’antibiotiques et encourager les traitements alternatifs.

En 50 ans, « seules deux nouvelles classes d’antibiotiques sont apparues sur les marché », car le retour sur investissement pour ce type de médicaments est insuffisant pour les laboratoires, avait alors souligné la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan.

Cette publication de l’OMS représente « un pas en avant important », a salué la Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses (ESCMID).

« Nous espérons que cela va pousser les gouvernements et les groupes de recherche (…) à fixer les bonnes priorités », et ainsi, « à faire baisser le nombre des décès dus aux infections résistantes », a commenté Evelina Tacconelli, membre du comité exécutif de l’ESCMID et qui a contribué à l’élaboration de la liste de l’OMS.

Cette liste constitue « un outil précieux et dont on avait un besoin urgent », a aussi commenté l’ONG Médecins sans frontières, qui se dit confrontée « tous les jours » sur le terrain au problème de la résistance aux antibiotiques.

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