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Plus de moyens pour la recherche, mais peu de nouveaux médicaments

Le Vif

Malgré une forte augmentation des investissements dans la recherche biomédicale ces cinquante dernières années aux Etats-Unis, le rendement en termes de gain en espérance de vie et de nouveaux médicaments stagne, conclut une étude lundi.

Alors que depuis 1965 le nombre de chercheurs a été multiplié par plus de neuf et que le budget des Instituts nationaux de la santé (NIH) a quadruplé, le nombre de nouveaux médicaments approuvés par la Food and Drug Administration (FDA) a seulement doublé pendant la même période.

Quant au gain en espérance de vie, il est resté constant à environ deux mois par an, précisent les auteurs. Leur recherche paraît dans la dernière livraison des Comptes-rendus de l’Académie nationale américaine des sciences (PNAS).

« L’objectif de la recherche biomédicale est d’améliorer la santé, mais on constate de plus en plus de frictions dans le système », relève le Dr Arturo Casadevall, professeur de microbiologie moléculaire à l’Université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland), un des deux co-auteurs.

« Nous dépensons plus d’argent seulement pour obtenir les mêmes résultats que nous avions dans le passé… », résume-t-il notant que nombre des médicaments les plus efficaces pour traiter des pathologies ont été mis au point il y a plusieurs décennies, dont l’insuline pour traiter le diabète ou les bêta-bloquants pour les maladies cardiaques.

Bureaucratie et réglementations

Selon le Dr Anthony Bowen, de la faculté de médecine Albert Einstein à New York, et autre co-auteur, « une confluence de facteurs paraissent expliquer ce manque de rendement des fonds investis dans la recherche médicale ».

Ces deux chercheurs citent entre autre un accroissement de la bureaucratie et des réglementations sur la recherche comme par exemple le long processus pour obtenir l’autorisation de faire des prélèvements sanguins, ou le fait de devoir remplir des demandes compliquées pour le moindre déplacement à une conférence.

D’autres experts ont aussi fait valoir que la recherche a fait les percées médicales « faciles » et s’attaque désormais à des maladies plus complexes comme Alzheimer, et la plupart des cancers et des pathologies auto-immunes.

Les docteurs Casadevall et Bowen mentionnent également des incitations « perverses » qui poussent des chercheurs à sur-simplifier leurs recherches de manière à ce qu’elles soient plus facilement acceptées dans les plus prestigieuses publications médicales.

Cette pratique a entraîné ce que les auteurs appellent « une épidémie de rétractations » et de résultats qui ne peuvent pas être reproduits car ils se révèlent scientifiquement incorrects.

« La littérature médicale n’est pas d’aussi bonne qualité qu’avant », juge le Dr Casadevall.

28 milliards inutilisables

Selon une autre analyse récente, plus de 28 milliards de dollars sont dépensés annuellement dans la recherche pré-clinique publique et privée aux Etats-Unis, dont les résultats ne peuvent pas être reproduits. Et la moitié de ces études se retrouvent publiées dans les revues spécialisées.

« Nous avons un nombre sans précédent de revues médicales et de recherches publiées, mais le nombre de publications biomédicales a très largement surpassé le nombre de nouveaux médicaments qui sont essentiels pour améliorer la santé publique, surtout pour des maladies où il n’existe pas de traitement efficaces », pointe le Dr Bowen.

Cette étude précise que le budget des « National Institutes of Health » (NIH), plus grand organisme mondial de recherche médicale publique, a cru exponentiellement de 1965 à 1999.

Il a ensuite doublé les quatre années suivantes avant de nettement diminué de 2003 à 2014 pour se situer à 30,3 milliards de dollars en 2015. Mais, soulignent les auteurs, cette baisse est encore plus prononcée qu’elle ne paraît en raison de l’augmentation rapide du coût des expériences scientifiques.

Avec l’AFP

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