Migraine, même chez les enfants

La migraine est un mal de tête courant chez les enfants, d’une fréquence estimée entre 5 et 10 %. Le diagnostic n’est pas toujours aisé car parfois, les symptômes sont très différents de ceux de l’adulte, voire carrément éloignés du crâne. Quant au traitement, il représente un vrai challenge.

La réputation de la migraine est d’être féminine, c’est bien connu… Pourtant, avant la puberté, elle touche autant de garçons que de filles. L’âge moyen de début diffère cependant : 7 ans pour les garçons, 11 pour les filles. Mais pour tous, les facteurs déclenchants sont multiples et dominés par les stimuli émotionnels. Et dans environ 25 % des cas, on constate des signes annonciateurs (appelés auras), qui doivent attirer l’attention.

Le mal de tête migraineux peut sembler peu de chose mais le confort des enfants est plus perturbé qu’il n’y paraît : 33 % ressentent des douleurs au ventre, 40 % vomissent, 52 % se plaignent de vertiges, 50 % pleurent pendant la crise et 84 % voient leurs jeux perturbés. D’ailleurs, le retentissement des migraines peut être sévère puisqu’il entraîne un absentéisme scolaire important : de 7 à 15 jours par an selon différentes statistiques.

Les signes propres à l’enfant
Les indices pour parler de migraine sont bien codifiés : il faut au moins cinq crises d’une durée de 1 à 72 h, d’un seul côté de la tête ou des deux, donnant une impression de battements dans le crâne, aggravées ou provoquées par l’exercice physique, accompagnées de nausées ou vomissements et d’intolérance à la lumière vive et aux bruits intenses. En réalité, par rapport aux adultes, les enfants se plaignent plus souvent de douleurs au niveau du front ou des deux côtés de la tête, et la sensation est moins un battement qu’une impression d’être serré au niveau du crâne.

Les crises diffèrent selon l’âge de l’enfant : plus il est jeune, plus vite il sera sur pied, surtout grâce à un sommeil réparateur. Les signes associés perturbent souvent le diagnostic : yeux qui pleurent, nez qui coule, changement de couleur du visage. Les indices prémonitoires sont courants (67 % des cas) : pâleur, cernes, fatigue, irritabilité et même véritable phénomène annonciateur qui peut être visuel (points brillants, taches noires, colorées ou scintillantes, zigzags lumineux, images floues), parfois auditif (sifflements, bourdonnements, bruits plus complexes) ou encore cutané (engourdissements, picotements).

Les maux de tête liés aux tensions musculaires du cou (céphalées de tension) se distinguent de la migraine par une intensité plus faible, surtout au retour de l’école, sans retentissements sur la digestion ou l’énergie, et disparaissant spontanément sans médicament.

Le stress à l’école coupable ?
Des chercheurs munichois ont demandé à 1200 lycéens d’évaluer eux-mêmes leur stress lié à une pression trop forte (surmenage scolaire ou social, incitation à la performance) ou dû à un manque de retour (absence de félicitations pour leur travail, de mise en valeur par les autres enfants, manque de copains). Pour l’ensemble des jeunes, environ 10 % présentaient des maux de tête dont la moitié relevait de la céphalée de tension, et l’autre moitié de migraines, souvent associées aux tensions musculaires. Mais à regarder de plus près le groupe d’enfants qui se plaignaient de maux de tête, il a été constaté que les scores de stress étaient nettement plus élevés, mais différemment selon le type de mal de tête. Les plus stressés dans tous les aspects de la vie étaient sans conteste les migraineux.

Au Japon, une autre enquête auprès de 50 jeunes patients d’une moyenne de 12 ans, traités en consultation de la migraine – une discipline que l’on retrouve dans de nombreux hôpitaux belges – affirme que la moitié de ces enfants présente une phobie scolaire, trouble caractérisé par un refus d’aller à l’école lié à une peur intense et irrationnelle. Les jeunes atteints de la sorte souffrent aussi plus souvent d’anxiété et de problèmes d’intégration scolaire, comme être la tête de Turc de leurs camarades ou développer un conflit ouvert avec un enseignant. Des problèmes familiaux sont retrouvés plus souvent aussi : absence du père, mésentente des parents. Il est vrai que le système scolaire japonais est réputé reposer sur le culte de la réussite, ce qui peut favoriser la phobie scolaire.

Comment soigner mon enfant ?
L’hygiène de vie reste la pierre angulaire des conseils à donner : sommeil suffisant, alimentation saine, exercice physique, réduction du stress, éviction des facteurs déclenchants, reconnaissance des signes annonciateurs. La tenue d’un agenda des crises et des événements qui les entourent est très importante pour mieux cerner quels facteurs les influencent. Le plus souvent, on retrouvera le bruit, la chaleur, la luminosité, le sport, l’effort, le changement de rythme (migraine du lundi ou de la grasse matinée) mais aussi les facteurs psychologiques : contrariétés, émotions, problèmes familiaux. On retrouve des migraineux dans la famille de 80 % des enfants qui se plaignent de maux de tête.

Comme pour les adultes, l’usage trop fréquent des antidouleurs est possible et peut mener à un cercle vicieux : la douleur revient de plus en plus souvent et s’installe même tous les jours. C’est un risque plus fréquent à l’adolescence. Chez les tout jeunes enfants, on peut éviter les médicaments et se contenter de les coucher dans le noir ; ils se réveilleront guéris. Pour les plus âgés, la rapidité du traitement est importante et passe par le paracétamol suivi de l’ibuprofène.

Un médicament de la crise, plus fort et d’utilisation en spray nasal, est accessible sur prescription après 12 ans, mais ce traitement est cher et non remboursé. De plus, il est contre-indiqué pendant les signes précurseurs de la douleur. Si l’on propose un médicament préventif quotidien aux adultes qui présentent plus de deux jours de douleur par semaine, cela ne convient pas à l’enfant. À l’heure actuelle, mis à part l’évitement des causes, seules les méthodes de relaxation peuvent être recommandées pour éviter la migraine de l’enfant, aucun traitement de fond ne valant vraiment la peine sans effets secondaires.

Quand la migraine est avérée, les parents s’inquiètent souvent de l’évolution de l’affection dans le futur. Dans un suivi suédois d’enfants pendant 40 ans, la moitié avait encore des migraines à la cinquantaine et retrouvait leurs symptômes chez un ou plusieurs de leurs enfants.

Chantal Maton

Migraine chez l’adulte La douleur se focalise d’un côté de la tête

Généralement une douleur intense

Se manifeste sous forme de battements, martèlements

S’accompagne souvent de nausées et de vomissements

Intolérance à la lumière, au bruit et aux odeurs

Incapacité à faire des efforts, qui aggravent la douleur

Débute soudainement, dure de 4 heures à 3 jours (si non traitée)

Migraine chez l’enfant La douleur se situe souvent des deux côtés de la tête ou au niveau du front

Douleurs modérées, parfois aucune douleur

Se manifeste sous forme de battements, mais aussi d’une sensation de compression de la tête

S’accompagne de nausées, vomissements, mais aussi diarrhée, maux de ventre, de problèmes visuels, somnolence, vertiges, pâleur…

Intolérance à la lumière, au bruit et aux odeurs

Incapacité à faire des efforts, qui aggravent la douleur

Débute soudainement, dure de 2 heures à 2 jours (si non traitée). Disparaît souvent avec le sommeil

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