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Les végétariens ont-ils raison sur toute la ligne ?

Le Vif

Le choix d’une alimentation végétarienne ou végétalienne est tout bénéfice sur le plan écologique et économique. Mais il l’est plus encore pour la santé, selon l’auteur Johan Albrecht, qui en parle d’expérience.

Il y a huit ans, Johan Albrecht, professeur à la faculté d’Économie de l’Université de Gand, a consulté son médecin pour un check-up préventif doublé d’une analyse de sang. À l’aube de sa 40e année, cela lui semblait judicieux. Il affichait un poids correct, mangeait sainement, n’avait jamais fumé et faisait régulièrement du sport… Il s’attendait donc à ce que tout soit en ordre. À son grand étonnement, il a appris que son taux de cholestérol était beaucoup trop élevé et qu’il risquait, à terme, de développer des problèmes cardiaques. Le médecin lui a alors recommandé un médicament anti-cholestérol. L’alimentation avait, selon ce dernier, peu voire pas du tout d’influence sur le taux de cholestérol. Comme il n’avait pas envie de prendre un médicament anti-cholestérol toute sa vie, Johan Albrecht a cherché des alternatives. Aujourd’hui, son taux de cholestérol est parfaitement normal, sans avoir pris le moindre médicament. En revanche, il a complètement modifié son mode alimentaire : plus aucun produit d’origine animale, mais beaucoup de fruits, de légumineuses, de noix et de céréales complètes. De cette expérience, il a retiré quatre messages principaux.

 » Les patients chroniques sont trop peu informés de l’importance d’une alimentation saine.  »

Un régime végétarien entraîne chez la plupart des patients cardiaques une diminution de l’artériosclérose, et ce sans médication. Il a également un effet positif sur la pression sanguine et le taux de cholestérol. Un fait déjà connu depuis que le Dr Dean Ornisch a publié en 1990 les résultats de son Lifestyle Heart Trial. Mais le sait-on assez ? La recherche montre que les patients souffrant de problèmes cardiovasculaires ou de diabète de type 2 ne sont pas suffisamment informés par leur médecin de l’importance des bons choix alimentaires. Johan Albrecht le regrette :  » Dommage, car c’est justement ce groupe qui a tout intérêt à limiter les symptômes existants, à réduire la consommation de médicaments et à prévenir des problèmes de santé futurs. Comment cela se fait-il ? Les médecins sont parfois trop peu informés eux-mêmes, mais certains patients font parfois comprendre aussi qu’ils n’ont pas besoin de cette information, estimant qu’ils se nourrissent déjà sainement… D’autres préfèrent prendre un médicament. Avaler une pilule tous les jours tout en conservant son mode de vie, cela semble tellement plus facile. Mais les effets secondaires d’un traitement médicamenteux chronique ne sont pas à sous-estimer, alors que le choix d’une meilleure alimentation n’a que des effets positifs, dont un surplus d’énergie et une perte de poids. Si les médicaments vous empêchent de remettre en question votre mode alimentaire, il y a de fortes chances pour que vos problèmes de santé s’aggravent.  »

À cela s’ajoute la quasi impossibilité pour un médecin de donner un éventail de recommandations alimentaires, souligne le Pr Albrecht :  » Idéalement, le médecin devrait envoyer son patient chez un nutritionniste, par exemple, qui l’accompagnera dans la transition vers un régime alimentaire plus végétal. Mais, en pratique, ce n’est pas si facile à réaliser, indépendamment du fait que l’industrie pharmaceutique n’encourage pas cette évolution.  »

 » Nous consacrons moins d’argent que jamais à l’alimentation, mais plus en soins de santé.  »

Nous dépensons actuellement beaucoup en soins de santé et ces dépenses connaissent une hausse structurelle, entre autres à cause de l’essor des maladies chroniques, et ce contrairement à ce que nous consacrons globalement à l’alimentation. Des chiffres de 1960 montrent que, comparativement aux décennies passées, une part toujours plus faible de notre budget familial moyen va à l’alimentation.  » On peut manger bon marché de nos jours : pour quelques euros, on se procure au supermarché un hamburger, du pain blanc ou une lasagne toute prête. Les légumes et les fruits sont de plus en plus chers. Pourtant, à terme, un régime alimentaire sain apporte des avantages difficiles à convertir en euros, comme une meilleure santé, une meilleure qualité de vie et un moindre risque de surpoids. Est-ce un hasard si les coûts de santé ont grimpé de manière spectaculaire au fur et à mesure que la part de nos revenus consacrée à la nourriture a considérablement baissé ?  »

 » La consommation de produits d’origine animale n’est pas essentielle aux prestations sportives.  »

On demande souvent aux végétariens et végétaliens s’ils ne risquent pas de souffrir de carences et s’ils ne perdent pas une énergie bien nécessaire pour leurs prestations sportives. Johan Albrecht ne le pense pas :  » L’idée que l’on a besoin de produits d’origine animale pour garder sa force physique est effectivement un malentendu tenace. L’alimentation végétarienne contient tout ce dont vous avez besoin, à condition évidemment que cette alimentation soit variée et équilibrée. Que mange un coureur cycliste le matin d’une course ? Pas de bifteck-frites, mais un repas le plus léger possible, pour ne pas alourdir la digestion. Sans viande ni poisson, on peut parfaitement fonctionner et aligner d’excellentes performances sportives. Le triathlète végétarien Dave Schott a remporté six fois l’Ironman de Hawaï et le végétalien Scott Jurek a été pendant plusieurs années le meilleur ultra-marathonien. On trouve des végétariens et des végétaliens parmi les plus grands champions olympiques. Quant à moi, je fais du vélo depuis des années. Et non, mes performances cyclistes n’ont pas souffert de mon alimentation végétarienne. Que du contraire !  »

 » L’alimentation végétarienne offre la meilleure prévention contre les maladies cardiovasculaires.  »

L’American Academy of Nutrition and Dietetics, instance qui fait autorité, a publié l’an dernier un rapport dont la conclusion principale s’énonce comme suit : une alimentation végétalienne est le moyen le plus efficace pour réduire le risque de maladies cardiovasculaires.  » Les végétariens réduisent de 25 à 30 % leur risque de développer une maladie cardiaque ; pour les végétaliens, ce risque est encore plus faible. De même, les végétariens diminuent de 15 % le risque de développer un cancer, comparativement aux mangeurs de viande. Un cancer sur trois serait la conséquence directe de mauvais choix alimentaires, comme une consommation élevée de produits d’origine animale. Ce sont des chiffres importants qui, selon moi, ne sont pas ou peu connus, même chez d’ex-cancéreux qui mettent tout en oeuvre pour rester en bonne santé. C’est clair : une alimentation saine est avant tout une alimentation végétale. L’adoption d’un régime végétarien ou végétalien entraîne non seulement une réduction des dépenses en soins de santé et des économies pour l’assurance maladie, mais peut à terme sauver de nombreuses vies.  »

Carine Stevens

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