Les terrains synthétiques sont-ils dangereux ?

Les questions de toxicologie, de santé et d’environnement soulevées par le dossier des terrains synthétiques « doivent être appréhendées avec la plus grande rigueur scientifique et ces problématiques nécessitent, au regard de leur technicité, la mobilisation d’expertises qui dépassent très largement le périmètre de base de l’aménagement des infrastructures sportives », a affirmé vendredi soir le Service public de Wallonie (SPW).

La RTBF s’apprête à diffuser dans l’émission « On n’est pas des pigeons », un nouveau reportage consacré aux terrains synthétiques incorporant des billes de caoutchouc SBR et à leur danger éventuel pour la santé. Selon la chaîne publique, les résultats des analyses menées sur plusieurs de ces terrains synthétiques sont loin d’être encourageants, contrairement à ce qu’affirme depuis un mois la ministre des Infrastructures sportives, Valérie De Bue (MR). Le terrain de Frasnes-lez-Anvaing, ainsi, ne répondrait pas aux nouvelles normes fixées par la ministre. Il comprendrait trop de zinc ainsi que du nickel et du chrome en grande quantité. D’après la RTBF, c’est également le cas des terrains situés à Chapelle-lez-Herlaimont et à Andenne, ce que conteste cette dernière.

« Nos analyses, reçues par un laboratoire agréé ce 8 octobre, sont conformes aux normes actuelles, mais également aux futures normes qu’Infrasports exigera concernant les HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques). Le taux de zinc, sur l’un de nos terrains, est au-dessus des normes selon ce premier rapport de HVS (Hainaut Vigilance Sanitaire) mais, précise ce dernier, il s’agit ‘d’une teneur normale à celle que l’on peut rencontrer dans une telle matière (pneus)' », affirme ainsi la Régie sportive andennaise qui a toutefois demandé, en raison de doutes sur la méthode utilisée, une analyse contradictoire de ces résultats, pourtant conformes, afin de bénéficier d’une nouvelle expertise comparative. « Nous attendons les résultats de cette expertise comparative et nous l’avons expliqué à la RTBF », ajoute la Régie sportive qui dit dès lors « s’étonner des informations transmises » par la chaîne publique.

Un imbroglio qui fait écho au constat posé par le SPW. « Chacun constatera que les questions évoquées en lien avec la composition chimique du matériau mis en cause relèvent d’un très haut niveau de technicité et d’expertise, la communauté scientifique semblant elle-même partagée quant au contexte de récolte des données qui font aujourd’hui l’objet de débats, mais également quant à leur interprétation et à l’impact éventuel de l’utilisation de ces billes sur la santé et l’environnement », estime l’administration wallonne.

« Des terrains synthétiques ont été construits en Wallonie depuis une quinzaine d’années. Le cadre normatif qui a été appliqué a toujours été aligné sur différentes normes et règlements établis notamment à l’échelle européenne », ajoute-t-elle en rappelant que dès l’été 2017, la Région « a initié un ensemble de mesures visant à réduire de manière drastique les seuils de différents composés chimiques » à propos desquels les scientifiques s’interrogent.

« Cette action est résolument volontariste par rapport à différentes normes et valeurs-guide existant au niveau européen et est sans précédent », se défend encore le SPW selon lequel « le cadre normatif appliqué aux terrains subsidiés, et dont le respect conditionne tout octroi de subvention wallonne, a été drastiquement revu et rencontre les recommandations les plus strictes des études de référence les plus récentes sur le sujet ».

Pour compléter ce cadre, un guide de bonnes pratiques est par ailleurs en voie de finalisation.

« Différents services publics sont aujourd’hui mobilisés afin d’objectiver l’ensemble de ces problématiques au regard de l’évolution du cadre normatif, des différentes méthodologies d’essais, de leur interprétation et de l’évaluation des risques en matière de santé ou d’environnement », poursuit l’administration. « Les équipes mobilisées travaillent selon une approche scientifique afin d’objectiver la situation de manière rationnelle et de produire des diagnostics pertinents au regard des enjeux qui sont soulevés. Elles feront rapport régulièrement aux autorités compétentes dans les différentes matières examinées », conclut-elle.

Une approche « rationnelle » qu’entend également promouvoir la ministre De Bue. Pour avancer, il faut se mettre autour de la table, faire appel à des experts et pas semer la panique au sein de la population, y estime-t-on à son cabinet où l’on plaide par ailleurs pour davantage de cohérence aux niveaux belge et européen.

La Wallonie subsidie 156 terrains synthétiques, dont 80% sont composés de billes SBR, ces granules de caoutchouc fabriquées à partir de pneus recyclés.

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