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Les sept champs de bataille du sida

Le 1er décembre c’est la journée mondiale du Sida. Aujourd’hui, comme les autres jours, 5205 personnes seront infectées. Les Nations unies espèrent pouvoir éradiquer la maladie d’ici 2030, mais dans les pays en voie de développement la maladie a tué plus d’un million de personnes en 2015.

1. L’église

« J’ai pris une douche après, pour minimiser les risques d’attraper le sida » cette phrase hallucinante a été prononcée en 2006 par Jacob Zuma, le président d’Afrique du Sud lorsqu’il s’est retrouvé devant un juge parce qu’il était accusé d’avoir violé une femme qu’il savait positive. À cette époque le pays avait le plus haut taux de personnes séropositives avec pas moins de 5 millions de personnes infectées. Le président de l’époque Thabo Mbeki était contre les traitements parce que ces derniers n’étaient que du poison envoyé par les entreprises pharmaceutiques dans le but de se faire de l’argent. Il a été prouvé que sa prise de position a coûté la vie entre 2000 et 2005 à plus de 300.000 personnes. 35.000 bébés sont nés avec le sida alors qu’on aurait pu l’éviter. Les croyances comme celle de faire l’amour avec une vierge pouvait guérir du sida ont aussi fait de nombreux ravages. Aujourd’hui la situation s’améliore en Afrique du Sud, mais le combat contre les croyances infondées est loin d’être gagné.

Dans Port-au-Prince, la capitale d’Haïti, l’un des pays les plus touchés au monde, ils sont encore beaucoup à croire que le sida n’est qu’une légende. Le prédicateur Joel Sainton se bat pour faire changer les choses. « Beaucoup n’y croient pas, car ils n’ont encore jamais rencontré quelqu’un qui avoue ouvertement être séropositif. » Il est lui-même séropositif depuis qu’il a été infecté par sa femme. Elle était parfaitement au courant de sa situation, mais avait omis de lui dire, car elle pensait que c’était une erreur de diagnostic.

Lui et sa femme se sont fait éjecter de leur première église. De la deuxième église aussi jusqu’à ce qu’il revienne défendre sa cause. Selon lui les campagnes de prévention se trompent de cible, car « la plupart des séropositifs sont à l’église. Pour éradiquer l’épidémie, il faut toucher les croyants ».

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2. Le terrain de foot

Faire de la prévention est très complexe. On remarque que malgré les nombreuses campagnes, les jeunes mettent de moins en moins des préservatifs. Dans le monde il y a 1,9 million de personnes qui se font infecter chaque année.

Contrairement à ce que les Européens pensent, les Africains n’ont pas plus de partenaires sexuels. C’est juste que la nature des relations est différente. Il n’est pas rare que comme ils doivent souvent travailler loin de leur domicile il ait une femme à la maison, une autre près de leur travail et éventuellement une autre en route. Ils ont donc des partenaires multiples, mais fixes. Mais, c’est cette multiplicité qui fait que le sida est si difficile à combattre. Grassroot Soccer essaye depuis des années de convaincre les jeunes à utiliser des préservatifs et à préférer la monogamie. En formant des coaches sportifs à faire la prévention, car cela leur permet à la fois d’être une personne d’écoute et de donner des perspectives d’avenir.

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3. La table d’accouchement

Peu de temps après être infecté, on montre des symptômes grippaux, mais ceux-ci disparaissent après quelques semaines. Après le corps reprend le dessus et on ne remarque rien durant des mois et même parfois des années. Faire des contrôles régulièrement est essentiel pour éviter la propagation. Notamment pour les femmes enceintes, car la prise des médicaments antirétroviraux durant la grossesse et durant l’accouchement empêche le bébé d’être contaminé. Cuba a été un des premiers pays à réussir à empêcher la transmission de la mère à l’enfant durant la grossesse. Le suivi et un maillage de généralistes proches des gens ont montré qu’il ne fallait pas de gros moyens pour avoir les mêmes résultats que dans les pays occidentaux. Il prouve aussi que la lutte ne doit pas se situer au niveau de la prévention, mais bien au niveau de la détection et du traitement.

4. L’estomac

Qu’entre 2010 et 2015 le nombre de personnes décédées du sida ait baissé de 1,5 millions à 1,1 million de personnes est en grosse partie due aux anti-rétroviraux. Ils ne soignent pas la maladie, mais permettent au corps de mieux se défendre face au HIV et l’empêche de passer au stade du sida.

En 2015, ils étaient 17 millions à y avoir accès. C’est deux fois plus qu’en 2010. 3,4 millions rien qu’en Afrique du Sud. Problème, certains commencent un traitement, mais l’arrête en cours de route ce qui rend le virus résistant. Il l’arrête souvent, car le traitement donne faim et qu’ils n’ont souvent pas de quoi se nourrir. Tout comme le prix des transports en commun pour se rendre aux hôpitaux peut être prohibitif.

5. Le portefeuille

Dans le monde, 46% des patients HIV on accès aux soins de santé. Pour 2030, 95 % devraient avoir été dépistés et 95% soignés. Pour cela il faut beaucoup d’argent. Pour 2020, il faudrait un budget de 35,6 milliards de dollars. « Si dans les 5 prochaines années, on investit 3 dollars par malade on peut éradiquer la maladie » a déclaré le directeur de UNIAIDS Michel Sidibé en 2014.

Dans la pratique, c’est moins limpide. Les antirétroviraux ont longtemps été gratuits parce qu’ils étaient payés par la banque mondiale et USAID. Mais depuis que ces programmes ont été arrêtés, les patients doivent payer eux-mêmes leur traitement. Le docteur Aminu Magashi craint le pire pour son pays le Nigeria si les autorités ne se lancent pas un refinancement drastique de ses soins de santé. C’est le pays où on compte le plus grand nombre de personnes infectées après l’Afrique du Sud. 1,8 million d’enfants sont orphelins à cause de l’épidémie.

6. Sortir du placard

Shuga, une série qui vise à sensibiliser les jeunes, a été diffusée en 2008 au Kenya. Pour atteindre une plus large audience, la série déménage en 2013 au Nigeria, qui est la capitale du cinéma en Afrique. Diffusée sur 88 chaînes, elle touche un public de 550 millions de familles.

Une médiation du sujet d’une importance capitale, car avec une mortalité élevée et les nombreux tabous qui règnent encore au Nigeria, ceux qui sont séropositifs font encore l’objet de nombreuses discriminations. Ce qui fait que les malades ne disent que très rarement qu’ils sont séropositifs même dans leur cercle proche. Pour beaucoup ce serait comme un suicide social. « Souvent lorsqu’on est séropositif, on est associé à des drogués ou des homosexuels. Même si en Afrique du Sud ce n’est pas vrai. »

7. L’entrejambe

Depuis 2010, la circoncision est l’un des chevaux de bataille de la lutte contre le Sida. Le fait d’enlever ce bout peau qui absorbe facilement le virus fait baisser le risque de contagion de 60 %. Des campagnes de circoncision gratuites ont donc été mises en place. 300.000 ont déjà été effectuées.

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Les patients HIV en Belgique

Chaque année, il y a en moyenne 755 nouveaux malades qui ont le HIV. L’année dernière près de 15.266 patients ont été suivi parce qu’ils étaient contaminés par le HIV. En 2015 , le nombre de nouveaux cas a baissé. Mais pas chez les hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes. Ils représentent la moitié des diagnostics. Pour lutter contre le virus, un dépistage précoce demeure efficace, car le risque de mortalité d’un patient diagnostiqué tardivement est seize fois supérieur à celui d’un patient diagnostiqué précocement. Lancé il y a une semaine, les autotests de dépistage du VIH ont été commandés en masse par les pharmacies belges. Plus de 9.000 tests ont déjà été livrés, et quelque 10.000 de plus le seront dans les jours qui viennent.

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