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Les « bébés lotus », ou quand le placenta devient un nouveau grigri

Le Vif

Les « bébés lotus » refont leur apparition. Il s’agit de bébés dont on laisse le cordon ombilical relié au placenta jusqu’à ce qu’il tombe de lui-même. Cette technique présente-t-elle vraiment les vertus vantées par les mères qui la pratiquent ?

Certains parents considèrent qu’il est stressant pour leur bébé de lui couper son cordon ombilical directement à la naissance. Ils ont décidé de le lui laisser jusqu’à ce qu’il tombe de lui-même.

Le journal britannique Daily Mail parle de la réapparition d’un mode de naissance ancestral, d’inspiration hindouiste, baptisée « naissance lotus ». La pratique consiste à ne pas couper le cordon ombilical qui relie le bébé à son placenta au moment de la naissance. L’enfant reste donc attaché par le nombril à son cordon jusqu’à ce que ce dernier se dessèche et tombe de lui-même, généralement entre 3 et 10 jours après sa naissance.

Derrière cette mode, la croyance que l’enfant qui a passé 9 mois relié à son placenta et qui en est séparé brutalement expérimente de la douleur et du stress. À la place, le laisser accrocher à cette organe lui permet d’encore jouir de ses bénéfices et de garder un lien fort avec sa mère. Autre avantage avancé: le nombril du bébé serait plus sain et guérirait plus vite si le cordon tombe de lui-même. Un acte pourtant réalisé dans les règles de l’art à la maternité.

Les médecins ne sont d’ailleurs pas vraiment favorables à ce mode de naissance. Nicolas Dutriaux , sage-femme, sur le site spécialisé Magic Maman donne son avis : « Les soins du cordon ombilical, et surtout du placenta du bébé nécessitent des gestes particuliers pour que ce dernier ne pourrisse pas. Ainsi, les jeunes parents doivent y déposer du gros sel pour qu’il sèche et ensuite l’envelopper dans un drap propre en coton pour éviter les mauvaises odeurs… ».

L’idée que le nourrisson serait de cette façon aussi préservé contre les infections est erronée. En effet, selon les adeptes de « l’accouchement lotus », en gardant le cordon ombilical, le bébé récupérerait la totalité du sang dont il a besoin grâce au placenta. Pour Nicolas Dutriaux : « Aucune preuve scientifique ne vient corroborer cette affirmation. Une fois que le placenta est sorti, il n’y a plus de circulation de sang entre le cordon et bébé, donc pas de bénéfices en termes de santé pour l’enfant ».

Bénéfique pour les prématurés

Sur le site de L’Obs, Philippe Deruelle Professeur en obstétrique nuance: «  Ne pas couper le cordon immédiatement à la naissance peut être bénéfique pour les prématurés. Cela oblige le sang à descendre du placenta. Et pour des nouveau-nés qui sont en déperdition d’hémoglobine et ont un nombre de globules rouges réduit, cela peut éviter la transfusion. » Mais pour lui aussi, laisser l’enfant, une fois né, relié au placenta n’a pas de sens : « le cordon et le placenta sont deux récipients sans interaction l’une avec l’autre, ce sont juste des organes permettant le transfert entre la maman et le bébé pendant la grossesse. » Il ajoute : « Même chose pour les mères qui veulent manger le placenta alors qu’il n’y a pas plus de vitamines dans cet organe que dans le foie et que ses propriétés nutritionnelles ne sont pas exceptionnelles. Le placenta serait donc plus un grigri qu’autre chose. »

Pour les parents, au niveau pratique au quotidien, les « bébés lotus » ne sont pas très mobiles et maniables. « Le bébé est moins mobile si les parents doivent constamment prêter garde au cordon, accroché à son nombril. Les gestes des parents avec bébé sont un peu limités du fait de la présence du placenta… Au niveau pratique, la naissance lotus n’est pas ce qui se fait de mieux !, » assure Nicolas Dutriaux.

Cette mode, qui ne représente pour le moment qu’en épiphénomène, n’est pas non plus possible en maternité car un placenta à l’air libre est risque d’infections. Elle ne serait donc evisageable que pour les mamans qui accouchent à domicile.

Au lieu de « l’accouchement lotus », les professionnels encouragent plutôt au don de sang de cordon ombilical qui contient des cellules souches, proches de celles de la moelle osseuse, que l’on utilise pour greffer des enfants atteints de leucémie ou d’autres maladies du sang. Afin de recueillir et stocker ce sang de cordon, il faut une autorisation préalable de la personne qui accouche. Ce don a des bénéfices largement supérieurs à ceux d’une naissance lotus, insistent les médecins.

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