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« Embrassez votre insomnie et restez tranquillement éveillé »

Thé relaxant, huile de lavande, programmes d’endormissement, compléments alimentaires… Selon deux coaches du sommeil, de telles « solutions rapides » ne permettent pas d’améliorer le sommeil sur le long terme. Pour pouvoir dormir, on ne doit pas toujours en faire plus, mais au contraire en faire le moins possible.

Boire moins de café, bouger plus, éviter écrans et repas lourds avant d’aller au lit… Les astuces pour mieux dormir ne manquent pas. Pourtant, les insomniaques sont toujours aussi nombreux. 15 à 20% des Belges dorment mal ou ne sont pas satisfaits de la qualité de leur sommeil. Ils ont du mal à s’endormir, se réveillent souvent ou beaucoup trop tôt. D’autres dorment, mais ne se sentent que rarement reposés.

Lorsque ces problèmes deviennent chroniques, on est face à ce qu’on appelle des troubles du sommeil, dont l’insomnie est le plus courant. D’autres troubles qui perturbent le sommeil sont le somnambulisme, la narcolepsie, l’apnée du sommeil, la difficulté à s’endormir, etc.

Un trouble du sommeil peut avoir un impact important sur la vie quotidienne. Ces personnes sont fatiguées, ont plus de risques d’avoir des problèmes de santé graves comme les maladies cardiovasculaires et la dépression. Beaucoup se sentent aussi impuissantes. Le fait qu’elles ne parviennent pas à dormir les entraîne dans un cercle vicieux où c’est la peur de ne pas dormir qui les maintient éveillés. Beaucoup optent alors pour toutes sortes de remèdes. Chaque jour, pas moins de 1,2 million de somnifères et sédatifs sont vendus en Belgique. Et on ne sait combien de compléments alimentaires ou autres relaxant sans prescription sont vendus .

Dormir mieux sans artifices

Dans leur livre ‘Premiers secours pour un meilleur sommeil’, deux coaches néerlandais Aline Kruit et Irma Leijten nous disent qu’il ne faut pas faire aveuglement confiance aux recettes de grands-mères et aux gadgets coûteux. Après tout, le sommeil est un processus autonome. Il ne peut être forcé et certainement pas selon des règles strictes. « Bien qu’il soit bien naturel de partir à la recherche d’aide pour s’endormir, cela ne constitue pas une solution pour un problème de sommeil chronique. Si un remède se révèle un temps efficace, il va vite s’imposer comme une routine indispensable et va créer une dépendance. De quoi plomber votre confiance en votre capacité à vous endormir sans artifices », écrivent Kruit en Leijten.

Or c’est justement ce rythme naturel sommeil-éveil qui vous permet de bien dormir. Pour le rétablir, Kruit et Leijten demandent aux personnes ayant des troubles du sommeil d’embrasser leur biorythme et de faire quelque chose qui paraît un peu fou : rester éveillées. Après tout, rester éveillé est le premier pas vers une bonne nuit de sommeil, même si, dans un premier temps, le fait de ne pas pouvoir dormir n’est pas évident. Kruit et Leijten ici vont à l’encontre du conseil habituel qui veut que l’on doive se lever quand on reste éveillé trop longtemps, sous peine d’associer son lit au fait de rester éveillé. Pour les coachs du sommeil,  » quand vous vous levez du lit pour faire quelque chose, vous devenez actif. Votre cerveau associe alors le réveil à la sortie du lit et à l’action. Cela éloigne donc encore plus le sommeil que le fait de rester simplement dans son lit. Si vous avez la capacité de vous allonger tranquillement dans votre lit et d’apprécier ce repos, vous donnez le signal que vous êtes en sécurité à votre cerveau. Votre cerveau se détend. C’est un signe d’abandon, qui est l’une des conditions du sommeil. Le fait de lutter contre l’insomnie va au contraire vous réveiller.

Se coucher éveillé, mais tranquille ? Comment fait-on ça ?

C’est bien beau, mais, pour la plupart des gens, il semble impossible de rester éveillé tranquillement. Surtout en sachant qu’il faut se lever dans quelques heures et qu’une longue journée de travail chargée nous attend.

Pourtant, nous l’avons tous déjà au moins expérimenté une fois, selon les coachs. Alors qu’à cinq heures et demie du matin, on est toujours là, à se retourner dans son lit, on se dit : « c’est foutu, encore une autre nuit perdue ». Et c’est à ce moment qu’on se réveille en sursaut au bruit du réveil. C’est quand on abandonne la bataille pour dormir qu’on s’endort. Le mot clé du sommeil est donc « acceptation ». Si vous cessez de faire de votre mieux pour dormir, vous mettez votre cerveau en position de repos. Cela exige une certaine pratique au début. Vous devez apprendre à gérer les pensées et les émotions négatives qui sont associées aux insomnies. En apprenant à les dompter, elles vous paraîtront moins menaçantes. Il deviendra dès lors plus facile de vous allonger et de vous reposer en leur compagnie.

Un défi un peu plus grand est celui du taraudage nocturne : « Demain, je dois faire ceci, j’aurais dû faire cela, pourquoi n’ai-je pas mieux fait ceci, etc. « . Kruit en Leijten recommande de ne pas chercher à se débarrasser de ces pensées ni de les transformer en pensées positives. Acceptez vos pensées et décidez ensuite si vous en faites quelque chose ou pas. Cette attitude d’ouverture et de curiosité est exactement ce que fait la pleine conscience et qui peut se révéler particulièrement instructif.

Sur quoi repose cette théorie ?

La méthode décrite par les coachs est basée sur les résultats de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), une forme moderne de thérapie comportementale qui s’est avérée efficace pour traiter diverses formes de problèmes psychologiques, tels que l’anxiété, la dépression, la toxicomanie et la douleur chronique. Selon eux, elle s’applique particulièrement bien au traitement de l’insomnie. Dans une thérapie par ACT, il est essentiel que vous cessiez de lutter contre des phénomènes sur lesquels vous n’avez aucune influence. C’est souvent cette lutte qui est la cause d’une aggravation des symptômes. De plus, cette résistance vous coûte tellement d’énergie qu’elle ne laisse plus de place pour les choses que vous aimez faire.

Kruit en Leijten admettent que leur méthode n’a pas un effet immédiat. Mais c’est justement en n’en faisant pas un élément central de sa vie que l’on a un rapport plus détendu avec le sommeil et que l’on s’endort plus facilement. Cela vous permet aussi de vous concentrer davantage sur la vie. Bref, de dormir pour vivre plutôt que de vivre pour dormir.

Quelques faits sur le sommeil

Il est normal de se réveiller la nuit

Nous nous réveillons tous la nuit, consciemment ou inconsciemment. C’est la réaction à ce réveil qui est différente pour chaque individu. L’un se retourne et se rendort, l’autre s’inquiète directement du fait qu’il ne pourra plus se rendormir. Votre réaction au réveil est déterminée par des caractéristiques personnelles, mais aussi la quantité de cortisol, hormone du stress.

Certains rituels du sommeil encouragent les insomnies sur le long terme

Malheureusement, lorsqu’il s’agit de dormir, de nombreuses mesures qui semblent dans un premier temps atténuer le problème viendront ensuite l’amplifier. Lorsqu’un nouveau remède semble fonctionner, on s’y attache. Vous avez l’espoir que cette mesure est la solution miracle. Or cela déplace inconsciemment la confiance vers une mesure ou une habitude qui vous est extérieure. Plus vous développez de rituels de ce genre, moins vous croirez que vous pouvez vous endormir de vous-même. Et plus vous devenez dépendant de vos rituels.

Vous dormez souvent plus que vous ne le pensez

Parfois, vous avez l’impression de ne pas avoir fermé les yeux de la nuit, mais saviez-vous que pendant le sommeil léger, qui représente cinquante pour cent du sommeil total, vous pouvez entendre, penser et sentir ? C’est pour ça qu’on a l’impression d’être resté réveillé. Certaines personnes pensent qu’elles sont éveillées toute la nuit, mais en réalité, elles ne se sont réveillées que plusieurs fois tout en restant plongées dans un sommeil léger.

Pas toujours un problème de mélatonine

Un problème de sommeil n’est généralement pas causé par une carence en mélatonine. Vous pouvez même aggraver vos problèmes de sommeil en avalant des comprimés de mélatonine. Évitez-les ou alors n’utilisez-les qu’en cas d’urgence.

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