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Crèmes solaires : les avis (contradictoires) d’experts sur leur toxicité

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Des toxicologues et dermatologues néerlandais tirent la sonnette d’alarme sur la toxicité des crèmes solaires qui contiennent une substance présumée cancérigène, l’oxybenzone. Des spécialistes belges minimisent leurs propos.

Les crèmes solaires et certains produits cosmétiques contiennent de l’oxybenzone, une substance qui fait fonction de filtre UV. Sa présence dans les crèmes pour enfants inquiète les toxicologues et les dermatologues. Plusieurs études ont, en effet, démontré ces dernières années que cette substance pouvait causer des allergies et que, une fois absorbée par la peau, elle pouvait se comporter comme des oestrogènes dans un organisme, perturbant le système hormonal.

Selon le journal Algemeen Dagblad, des chercheurs néerlandais sont convaincus que l’oxybenzone est mauvaise pour la santé. Après avoir réalisé des tests sur des rats, le dermatologue néerlandais David Njoo a observé que cette composante perturbe le bon fonctionnement des hormones thyroïdiennes et des hormones sexuelles. L’oxybenzone peut aussi causer des démangeaisons et de l’eczéma. En outre, l’oxybenzone favoriserait le développement de cancer, ajoute, de son côté, Jacob de Boer, toxicologue à l’Université d’Amsterdam. En badigeonner le corps des enfants serait dès lors néfaste.

Des experts belges émettent cependant des doute sur ces mises en garde. Ils ne sont pas d’avis que cette substance soit si dangereuse. Jan Tytgat, toxicologue à la KU Leuven, confirme sur le site du Morgen que lors de tests sur des animaux, il est apparu qu’une grande concentration d’oxybenzone pouvait en effet causer des cancers, des problèmes de régulation hormonale et de développement des embryons. Mais le spécialiste nuance ces résultats. « En Belgique et dans le reste de l’Europe, la dose maximale autorisée d’oxybenzone dans les crèmes solaires est de seulement 6 %. C’est vraiment minime. Elle ne présente pas de danger pour la santé« , réfute Tytgat.

« Une tempête dans un verre d’eau »

Par prévention, l’universitaire préconise quand même d’éviter au maximum d’en utiliser chez les enfants. En optant plutôt pour des crèmes solaires avec des filtres minéraux composées d’oxyde de zinc ou de dioxyde de titane. Ces composantes ne pénètrent pas (ou très peu) dans la peau. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ces crèmes laissent une fine couche blanche quand on les étale.

Mais pour la toxicologue Vera Rogiers de la VUB, prendre cette mesure de précaution, c’est aller un pas trop loin. « En 2006 et 2008, la Commission européenne a mené des recherches approfondies sur les dangers éventuels des filtres UV, dont l’oxybenzone. Les 10 % alors tolérés avaient été réduits à 6 %, afin que la sécurité soit assurée pour tous les groupes d’âge, et donc aussi pour les enfants », explique Rogiers, qui a présidé la recherche au niveau européen.

La commission ayant décrété une marge de sécurité supplémentaire, « Il n’y a donc pas de raisons d’écarter les produits contenant de l’oxybenzone. Tout ce tintouin autour des substances chimiques n’est rien qu’une tempête dans un verre d’eau », selon Rogies. « L’oxybenzone se trouve surtout dans les crèmes solaires bon marché. Pas parce qu’elles sont de moins bonne qualité, mais parce que les fabricants n’ont tout simplement pas les moyens de se payer les nouveaux filtres« , précise la toxicologue.

Les nouvelles technologies de filtres UV sont en effet très coûteuses et les brevets sont d’abord acquis par les marques les plus onéreuses. Les labels bon marché sont alors contraints d’utiliser les « vieux » filtres dans leurs crèmes. Rogiers insiste toutefois sur le fait que les produits des nouveau labels présents sur le marché sont beaucoup mieux supportés par la peau. « Les crèmes solaires avec du dioxyde de zinc et du dioxyde de titane, qui sont souvent conseillées pour les enfants, pénètrent moins dans la peau et causent moins de réactions allergiques. »

Autre raison plus écologique cette fois de l’éviter: l’oxybenzone est aussi responsable de dégâts sur l’environnement, en faisant mourir les coraux et en empoisonnant les poissons. Des résidus de crèmes solaires sont en effet dispersés dans les eaux par les baigneurs ou y parviennent via les égouts. Ces effets ne sont cependant pas complètement prouvés à ce jour.

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