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Combien coûte vraiment une opération de reconstruction des seins?

Si la chirurgie renconstructrice après un cancer du sein est en théorie couverte par l’assurance-maladie, de nombreuses femmes ont été récemment amenées à payer des « suppléments esthétiques » parfois onéreux, souligne dans un rapport publié vendredi le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE).

Ces suppléments concernaient notamment les reconstructions autologues (à l’aide de peau, muscle et ou graisse de la patiente). Pour les chirurgiens plasticiens, l’honoraire prévu par l’Inami est jugé trop bas au vu de la complexité des procédés. C’est pourquoi il a été demandé au KCE d’établir des données chiffrées pouvant servir de base de discussion à une éventuelle révision de ces tarifs Inami.

En Belgique, 14 à 20% des femmes qui ont subi une opération du sein optent pour la chirurgie reconstructrice. Ces dernières années, des patientes ont signalé avoir dû payer des « suppléments esthétiques » d’en moyenne 2.620 euros, d’après une enquête de la Vlaamse Liga tegen Kanker (VLK, ligue flamande contre le cancer). Or, le remboursement d’une telle chirurgie est théoriquement couvert, puisque pour une « intervention lambeau libre de type DIEP » (la plus courante en Belgique) par exemple, qui consiste à déplacer de la peau, du tissu graisseux et des vaisseaux sanguins sous le thorax, l’Inami rembourse actuellement 1.527 euros. Un honoraire jugé trop bas par les chirurgiens plasticiens.

Face à l’impasse des négociations entre ces derniers et l’Inami, le KCE a évalué les coûts moyens d’une intervention de lambeau DIEP, en mesurant la durée des différentes étapes de l’opération, multipliée par un tarif horaire pour chacun des intervenants. Avec la complexité toutefois de « l’absence d’un tarif horaire de base généralement accepté pour la profession médicale », précise Karin Rondia, du KCE. Il est aussi difficile d’estimer le revenu brut d’un chirurgien plasticien, étant donné le nombre de prestations non remboursées pratiquées, ajoute-t-elle.

Le premier scénario, basé sur les tarifs actuels, présente un coût variant de 1.125 à 2.142 euros. Ce scénario étant jugé trop bas par les chirurgiens concernés, le KCE a établi deux autres options. Le second scénario, « calqué sur une estimation de la rémunération moyenne de tous les médecins spécialistes », propose une variation de 1.341 (soit toujours moins que les tarifs Inami) à 2.584 euros. Enfin, le dernier est une extrapolation des coûts horaires des reconstructions par prothèses mammaires (un coût à l’heure connu puisque l’intervention est remboursée, explique Mme Rondia). Ce scénario évoque un minimum de 1.816 euros et un maximum de 1.998 euros. Ces tarifs ne prennent pas en compte les éventuelles interventions secondaires (lipofilling, liposuccion, reconstruction du mamelon, etc.).

« Une reconstruction ne doit pas dépendre de facteurs financiers »

Pour l’association de femmes victimes de cancer du sein « Vivre comme avant », il est plus « qu’important de se pencher sur ce dossier ». « La reconstruction est un choix personnel, et ce choix ne doit pas dépendre » de facteurs financiers, « ce qui est le cas actuellement », témoigne Evelyne, membre de l’association. « De nombreuses femmes n’ont pas recours à la reconstruction à cause de son coût, elles ne peuvent pas se le permettre financièrement. » « Une reconstruction est comme une récupération d’une opération, c’est un élément post-opératoire qui devrait être entièrement pris en charge. (…) Un cancer du sein touche la personne, mais aussi son entourage, mais aussi la féminité et le bien-être personnel. Un seul sein, cela se voit d’office. »

Ces chiffres, « dont la validité est limitée », ne peuvent être vus que comme une solution temporaire, avertit le KCE, la véritable réponse relevant d’une « réévaluation globale des honoraires médicaux », telle que déjà proposée par le Centre d’expertise. « La grande question sous-tendant le débat auquel nous touchons ici sera de définir ce que serait, d’un point de vue sociétal, un revenu horaire médical équitable, juste et raisonnable. C’est un très vaste chantier », conclut celui-ci.

Chaque année, plus de 10.000 femmes sont touchées par un cancer du sein en Belgique.

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