© JupiterImages

Ce qu’il faut savoir sur la reconstruction mammaire

Le Vif

La présentatrice flamande, Ann Reymen, a relancé cette semaine le débat sur les reconstructions mammaires trop coûteuses dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé Maggie de Block. Mais combien coûte réellement une telle opération ? Le journal De Morgen fait le point sur la situation.

« Une nouvelle paire de seins, ce n’est pas une nouvelle paire de chaussures », voilà le pavé (re)lancé dans la marre par la présentatrice flamande Ann Reymen. (lire la lettre ici). Dans une lettre ouverte à la Ministre de la santé Maggie De Blocks, Ann Reymen s’offusque des écarts de prix dans les différentes possibilités de reconstructions mammaires après une mastectomie. En moyenne, une femme doit dépenser 4000 euros pour une nouvelle paire de seins réalisée à partir de sa propre peau, comparée à des implants en silicone, pour lesquels l’opération est totalement remboursée. « Trop cher ! » s’exclame la présentatrice qui parle de sa propre expérience, ayant subi récemment une ablation préventive des seins. Pour elle, un tel choix ne devrait pas dépendre de son budget. Un système de remboursement adapté est donc prioritaire.

Le fait que de nombreuses femmes doivent débourser autant d’argent pour se faire reconstruire une poitrine digne de ce nom avec leurs propres tissus – une opération aussi appelée reconstruction par lambeau ou reconstruction autologue (voir l’encadré ci-dessous) – fait débat depuis quelque temps. Le problème remonte à l’INAMI et aux chirurgiens. Ces derniers considèrent que 1.527 euros pour la reconstruction d’un sein réalisé avec la propre peau d’une patiente, ce n’est pas assez. « Une telle reconstruction prend facilement 8 heures et mobilise toute une équipe « , déclare le professeur de chirurgie plastique Philip Blondeel (UZ Gent) au Morgen. Selon ses calculs, si deux chirurgiens sont à l’oeuvre, cela leur revient à environ 22 euros nets de l’heure. « A ce prix-là, on n’engage aucun homme de métier« , commente-t-il. Résultats : les chirurgiens esthétiques comptent des suppléments qui ne sont pas toujours remboursés. Généralement, deux semaines avant l’opération, la patiente doit déjà débourser de sa propre poche entre 2.600 et 4.000 euros. Une somme qui n’est pas toujours possible de récolter pour certaines femmes concernées.

u003cemu003eu0022Les implants n’ont jamais été une option pour moi. Je ne voulais pas de corps étranger dans mon corps. Et certainement pas quelque chose que j’allais devoir remplacer dans les 5 à 10 ans u003c/emu003eu0022

Le journal flamand donne aussi l’exemple de Yamina Krossa. Maman solo avec deux ados et un revenu de remplacement, elle a décidé de faire reconstruire ses seins avec sa propre peau. « Les implants n’ont jamais été une option pour moi. Je ne voulais pas de corps étranger dans mon corps. Et certainement pas quelque chose que j’allais devoir remplacer dans les 5 à 10 ans « , explique-t-elle. Krossa a finalement réussi à récolter l’argent nécessaire à son opération grâce à des dons de son entourage, de ses amis et de sa famille. Elle a ensuite créé l’ASBL « Benetiet », via laquelle elle soutient une vingtaine de femmes qui n’ont pas les moyens de se payer une reconstruction mammaire comme la sienne.

Il est difficile d’évaluer en Belgique le nombre de femmes qui sont dans une telle situation. Krossa, tout comme le professeur Blondeel, estiment à environ 1000 par an les reconstructions de sein de ce type. « Le fait que cette option n’est pas prise par difficulté financière n’est mentionné nulle part ». Blondeel estime qu’il s’agit d’un nombre limité de femmes, vu les millions d’assurances hospitalisation qui sont contractées. Certaines assurances remboursent en effet ce type d’intervention.

Quel type de reconstruction privilégier ?

Mais du côté de la Ligue contre le Cancer, le son de cloche est différent. Ward Rommel est expert en traitement contre le cancer, il se base dans son argument sur des chiffres d’une enquête réalisée par la Ligue sur les coûts élevés d’une reconstruction de sein avec du tissu propre. Quelque 600 rescapées d’un cancer y ont participé. A la question de savoir pourquoi elles n’avaient pas opté pour une reconstruction autologue, 38,4 % ont répondu que ce type d’intervention était trop chère. De plus, 21,3 % parmi ces femmes ont déclaré avoir rencontré des problèmes financiers à cause de cette opération. « Nous ne pouvons pas extrapoler ces chiffres, mais ils montrent quand même qu’il y a quelque chose qui ne va pas« , déclare-t-il.

A côté de l’aspect financier, la question est aussi de savoir quel type de reconstruction privilégier? Le professeur Blondeel ne jure que par la reconstruction autologue en raison de la très grande satisfaction rencontrée chez ses patientes. Sur le plus long terme, elle serait aussi plus rentable. « En cas de reconstructions avec des implants, il faut en effet souvent faire des retouches« . Selon le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE), aucune donnée scientifique ne permettent toutefois d’arriver à cette conclusion. « Des risques sont inhérents aux deux types d’opérations » laisse entendre le centre.

u003cemu003eu0022Des risques sont inhérents aux deux types d’opérationsu0022u003c/emu003e

La ministre De Block a réagi, hier, à la lettre d’Ann Reyman en avançant que « les patientes fragiles concernées doivent être protégées contre des exigences impropres en ce qui concerne le remboursement des suppléments dits ‘esthétiques’ ajoutés aux honoraires et autres suppléments courants ». Via son porte-parole, la Ministre ajoute que cela ne relève pas de son ministère, mais de l’INAMI ». L’accord Medicomut 2013-2014 avait comme objectif d’obtenir des garanties sur la limitation au prorata des suppléments. Les chirurgiens n’étaient pas d’accord. La Ministre a alors demandé une étude au Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE). L’étude a ensuite été envoyée à l’INAMI. De Block se demande aussi si de telles opérations complexes ne devraient pas plutôt être prises en charge par des centres de référence, afin d’améliorer la qualité, mais aussi d’optimaliser l’efficacité du traitement, ce qui devrait avoir un effet positif sur les coûts.

A l’INAMI, on annonce que des discussions réunissant toutes les parties concernées devraient reprendre à ce sujet à la mi-novembre et que pour la fin de l’année, une solution devrait être trouvée.

La reconstruction mammaire en détails

La reconstruction par lambeau utilise les propres tissus d’une patiente (peau, graisse, muscle) pour récréer le volume du sein, en les déplaçant depuis une autre partie du corps (dos, ventre). Cette technique est aussi appelée « reconstruction autologue ». Différents types de lambeaux sont utilisés selon les cas : le lambeau du muscle grand dorsal, le lambeau du muscle grand droit de l’abdomen ou encore un lambeau de peau et de graisse prélevé au niveau de l’abdomen dit DIEP (de l’anglais Deep Inferior Epigastric Perforator).

Avantages

Les résultats de cette technique sont souvent satisfaisants d’un point de vue esthétique. La forme et la souplesse du sein sont plus naturelles, moins figées qu’avec un implant mammaire, puisque le sein est constitué des propres tissus de la patiente.

Inconvénients

L’intervention est plus complexe et plus longue que dans le cas de la pose d’un implant mammaire. 12 à 18 mois sont souvent nécessaires à l’obtention d’un résultat satisfaisant sur le plan physique et psychologique.

(Source : ecancer.fr)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire