Recherche alternative

Vincent Genot
Vincent Genot Rédacteur en chef adjoint Newsroom

Pour contrer l’hégémonie de Google, Jacques Chirac et Gerhard Schröder ont rêvé d’un grand moteur de recherche européen. Un an plus tard, le projet Quaero –  » je cherche « , en latin – profite surtout aux entreprises qui ont pris le train en marche

C’était à l’occasion du cinquième Conseil des ministres franco-allemand d’avril 2005… A cette époque, Google envisageait de numériser le contenu de toutes les bibliothèques du monde. Et quoi ? Une entreprise américaine allait nous imposer l’indexation de notre culture ? Comme si la vieille Europe n’était pas capable de classer, elle-même, son savoir. Ni une, ni deux, dans un grand élan désintéressé, Jacques Chirac et Gerhard Schröder annoncent la création d’un moteur de recherche capable de trier et d’indexer textes, images et sons. Le projet Quaero est sur les rails. La presse applaudit ce salutaire sursaut européen. D’autant qu’une kyrielle de sociétés du Vieux Continent garantissent le sérieux de l’affaire. France Télécom, Deutsche Telekom, Thomson, Exalead (moteur de recherche français), le groupe français des écoles de télécommunications (GET)… possèdent, chacun dans leur domaine respectif, une belle expérience.

Un an plus tard, l’élan tient plus du piétinement que de l’envol.  » Quaero a souvent été présenté, à tort, comme le Google européen. Il n’en est rien, explique François Bourdoncle, président d’Exalead. C’est plutôt un programme d’investissement visant à créer une filière de compétences autour de l’indexation, de la traduction et de la recherche en ligne. Il s’agit de mutualiser de la recherche et développement (R&D), des équipes et des technologies issues d’entreprises privées et de laboratoires pour atteindre les objectifs industriels définis par le projet…  »

Dans cette optique, le rôle d’Exalead consiste à apporter sa technologie de recherche à Quaero. Fondée en 2000 par des pionniers des moteurs de recherche – François Bourdoncle est un ancien d’Altavista – la société Exalead est, en effet, spécialisée dans la simplification de tous les aspects liés à la requête en ligne.  » Pour faire simple, poursuit Bourdoncle, je dirais que nous en sommes à la troisième génération de moteurs de recherche. Dans un premier temps, il était important d’indexer le plus grand nombre de pages. C’est l’époque d’Altavista. Ensuite, la recherche a tenu compte de la popularité. Les pages les plus demandées étaient automatiquement présentées en tête. C’est ce principe du page ranking qui a fait la renommée de Google. Maintenant, il s’agit d’aider l’utilisateur à faire un choix, notamment par un système d’association d’idées. En la matière, je pense qu’Exalead a un avantage sur Google. Il présente un profil plus neutre que le moteur américain qui ressemble de plus en plus à un groupe de médias.  » A l’image de Microsoft, l’hégémonie de Google dans le domaine de la recherche joue, en effet, en sa défaveur. Est-ce, par exemple, un hasard si c’est l’adresse d’un service de blogs géré par Google qui s’affiche en première position dans le résultat d’une requête portant sur le mot blog ? Comment faire confiance à la neutralité des résultats d’un moteur de recherche qui contrôle de plus en plus de services en ligne ?

A défaut d’un grand moteur de recherche européen, la version grand public d’Exalead sera lancée dans le courant du mois de septembre. Outre l’indexation de plus de 8 milliards de pages, le moteur présentera une interface épurée qui permettra, entre autres, de lancer une recherche par date ou d’afficher les résultats d’une requête sous forme de vignettes. En utilisant la version bêta du moteur, on peut dire que la recherche Exalead est centrée sur l’utilisateur et non pas sur l’agencement de la base de données. L’écran de recherche est ainsi segmenté en fenêtres qui proposent, chacune, des moyens d’affiner la recherche (termes associés, type de document, localisation géographique, etc.) et de mieux exploiter l’information. Après utilisation, on se demande si l’utilisateur lambda trouvera son compte dans cet outil, certes puissant, mais qui demande une bonne prise en main avant de dévoiler tout son potentiel ?  » Avec Exalead, nous parions sur un public qui a envie d’en savoir plus, pas sur un public qui a envie d’être éduqué, termine Bourdoncle. Ce n’est pas pour rien que la version professionnelle de notre technologie est la préférée des documentalistes et des bibliothécaires. Nous ne voulons pas brider les fonctionnalités de notre moteur. On essaie plutôt de trouver le juste équilibre entre les fonctions et la facilité d’utilisation. Je pense que c’est de cette manière que nous trouverons notre place dans le marché. Actuellement, celui-ci est dominé par quatre grands acteurs regroupés dans un peloton de tête : Google loin devant, suivi par Yahoo !, MSN Search et Askjeeves. Exalead est actuellement le leader du deuxième groupe. A brève échéance, en prenant de 3 à 5 % des parts du marché, nous espérons devenir le cinquième élément du premier peloton. Je ne cache pas que, pour y arriver, Quaero est une excellente publicité qui nous apporte de la visibilité.  » Dommage qu’il ne soit qu’une bonne publicité. Elle avait du panache, cette idée d’un grand moteur de recherche européen…

Informations : www.exalead.com

Vincent Genot

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