© CHRISTOPHE SIMON

Un après-midi avec les pro-armes à feu, j’y étais et tout est vrai

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

Il est 14 heures, ce samedi-là, et beaucoup vaquent à des activités agréables. A l’inverse d’un vaillant journaliste du Vif/L’Express, qui a tout de même décidé d’aller écouter une conférence de John Lott, écrivain et avocat américain des armes à feu.

Devant lui, une soixantaine d’amateurs d’armes, qui ne savent pas trop pourquoi ils aiment ça, et le journaliste, qui tente de ne pas se faire repérer en arborant une mine sévère, pour avoir l’air d’un amateur d’armes – allez savoir pourquoi. Ou d’un électeur du Parti populaire (PP). Ou d’un électeur du Parti libertarien (P-Lib). Soit les deux seuls partis qui ont répondu à l’invitation de la Défense active des amateurs d’armes (DAAA).

Il y a deux traducteurs pour restituer, en français et en néerlandais, le discours de John Lott à la face du monde de la salle du premier étage du Parker Hotel de Diegem. Sur un stand, on peut acheter un livre dont le titre est censé nous convaincre qu’un monde sans armes, c’est très très mal et totalitaire : Bas les armes ! Le désarmement des Juifs et des ennemis intérieurs du IIIe Reich. Avec 15 minutes de retard, John Lott prend la parole. C’est un grand monsieur très gentil, très passionné, mais potentiellement très ennuyant pour ceux que le sujet des armes laisse indifférents :  » Je peux en parler des heures « , prévient-il, et tout le monde rit, sauf le journaliste, qui se demande alors si sa seule présence en ce jour de week-end ne vaudrait pas une augmentation.

John Lott affirme qu’on ne pourra jamais comparer scientifiquement le taux d’homicide d’un pays à l’autre, avec ou sans armes, parce qu’il y a trop de critères qui entrent en compte. Puis il montre plein de graphiques qui comparent scientifiquement le taux d’homicide d’un pays à l’autre, avant ou après l’interdiction de posséder une arme : avant l’interdiction, la ligne descend, après, elle augmente, tellement qu’on en oublie tous les autres critères (historiques, socio-économiques, géopolitiques) entrant en compte. La ligne du temps commence et s’arrête toujours aux années que John Lott a décidé de montrer.

Puis, il compte les morts et les blessés dans un tableau, aux Etats-Unis et en Europe. La détention d’armes dissimulées, dit-il, peut aider à contrer une tuerie de masse. Son échantillon montre qu’il y a eu 0,083 tué par million d’habitants dans ce contexte en Europe, contre 0,089 tout au plus aux Etats-Unis, alors-pourquoi-bannir-les-armes. Mais il montre aussi que le ratio des blessés s’élève à 0,19 en Europe, contre 0,087 aux Etats-Unis, alors-pourquoi-bannir-les-armes.

Enfin, il y a les questions-réponses. Tellement interminables qu’on aimerait finalement détenir une arme dissimulée pour suggérer avec insistance à l’assemblée d’arrêter de poser des questions qui en amènent d’autres.  » Monsieur Lott, nous sommes déjà convaincus, mais comment convaincre ceux qui ne pensent pas comme nous, vu que la presse ne nous aide pas ? « , demande l’un. Monsieur Lott se le demande aussi. Craignant d’être harcelé sur cette question lors du drink qui n’arrive jamais, le journaliste perd de sa vaillance. Et décide de reprendre sa liberté avant la fin, faisant fi de la revendication salariale qui lui avait traversé l’esprit.

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